Le Cercle du Phénix
pense que nous devrions nous marier.
Andrew demeura la bouche ouverte, se demandant visiblement si Cassandra
ne se moquait pas de lui.
— Ce…
ce n’est pas drôle, bredouilla-t-il, médusé.
— Je
ne plaisante pas. Je n’ai même jamais été aussi sérieuse.
Andrew la dévisagea en silence, puis ses traits s’obscurcirent.
— Est-ce
de la pitié de ta part ? interrogea-t-il d’une voix sèche. À moins que ce
ne soit de la culpabilité ?
— Bien
sûr que non ! se révolta Cassandra. Comment oses-tu proférer de telles
horreurs !
— Excuse-moi,
rétorqua Andrew froidement, mais j’essaie de trouver une explication
rationnelle à ce mariage précipité.
Atterrée, Cassandra secoua la tête.
— Il
ne s’agit pas de pitié ou de culpabilité, juste d’amour, dit-elle à voix basse.
— C’est
de la folie, murmura-t-il, et toute trace de colère avait disparu dans sa voix.
Est-ce réellement ce que tu souhaites ? Épouser un mort en sursis ?
— Qu’y
aurait-il là de si extraordinaire ? riposta Cassandra avec amertume. Tu
sembles avoir une bien piètre opinion des sentiments que je te porte !
Andrew lui prit la main et la serra dans la sienne.
— Pardonne-moi,
je ne voulais pas te blesser. C’est juste que ta proposition m’a surpris.
J’adorerais devenir ton époux, mais je ne dois pas céder à la tentation.
T’imposer une union sans avenir serait très égoïste de ma part.
— Pourquoi
es-tu si fataliste ? s’emporta Cassandra. Tu parles comme si tu étais déjà
mort !
— À
quoi bon se voiler la face ? soupira Andrew. Tu dois accepter la réalité
telle qu’elle est.
— Jamais !
Cassandra avait presque crié. D’indignation, elle serra les poings.
— Jamais !
répéta-t-elle d’un ton farouche. Jamais je ne m’avouerai vaincue !
Elle ne parla pas cependant à Andrew de son entrevue avec Angelia et de
l’accord passé avec sa sœur, car elle savait qu’il n’aurait pas approuvé. Elle
se contenta de se blottir contre lui, et les doigts d’Andrew glissèrent dans
ses cheveux. Son regard s’était voilé, et il la contemplait d’un air de
profonde tristesse.
— Cassandra…
Je suis désolé…
— Si
nous nous marions, le coupa Cassandra qui refusait d’abandonner la partie, et
si… s’il t’arrivait quelque chose… je pourrais veiller sur Megan à ta place.
Andrew ne put s’empêcher de rire et il la serra plus fort contre son
torse.
— Tu
es vraiment entêtée ! N’utilise pas Megan pour parvenir à tes fins !
Cassandra rit aussi, puis son expression redevint sérieuse.
— Peut-être
devrais-tu lui parler de ta maladie. Elle a le droit de connaître la vérité.
— Voilà
des années que j’essaye, murmura Andrew, mais à chaque fois le courage me
manque au moment fatidique. Elle est encore si jeune… Je répugne à lui infliger
ce fardeau. Mais tu as raison : je ne peux pas reculer indéfiniment.
Cassandra l’encouragea d’un sourire. Subjugué, il se pencha vers elle
pour l’embrasser.
*
La porte claqua violemment contre le mur et Megan, le visage défait et
les yeux gonflés de larmes, fit irruption comme une furie dans la chambre de
Cassandra.
Assise
à lire près de la fenêtre, la jeune femme se leva à son entrée et
murmura :
— Andrew
t’a parlé…
— Oui,
il m’a tout dit…
Megan tremblait de colère et ses ongles labouraient rageusement sa jupe.
— Alors
vous voulez vous marier ? Tu ne prends pas un grand risque maintenant que
tu sais qu’il est mourant ! Avec un peu de chance, tu seras veuve avant
même que les vœux n’aient fini d’être prononcés !
— Megan !
Andrew, très pâle, était apparu sur le pas de la porte. Sa sœur serra les
lèvres et le défia du regard.
— Pourquoi
m’avoir menti si longtemps ?
— Je
cherchais simplement à te protéger…
— Je n’ai pas besoin d’être
protégée ! cria Megan. Son visage se chiffonna comme celui d’un enfant et
elle s’effondra en sanglots dans les bras de son frère.
Celui-ci échangea un regard navré avec Cassandra.
*
En dépit des réticences de Megan, le mariage eut lieu trois jours plus
tard dans une petite église paroissiale perchée sur une hauteur dominant
Londres et le manoir Jamiston. C’était une antique bâtisse, flanquée de deux
lourds arcs-boutants et surmontée d’une tour carrée. Seuls Megan et Julian
étaient présents, car
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