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Le Chant de l'épée

Le Chant de l'épée

Titel: Le Chant de l'épée Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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corriger Guthrum.
    — Alfred va partir en guerre contre l’Estanglie ?
s’étonna Gisela.
    — Non, ma dame. Juste le corriger. (Il
avait dû manger la moitié d’un cochon et ne semblait pas encore repu.) Guthrum
ne veut pas la guerre, ma dame, mais il faut lui apprendre à ne point abriter
de païens. Alors il envoie le seigneur Æthelred attaquer le camp de Gunnkel sur
la Sture et en profiter pour voler du bétail à Guthrum. Juste pour lui donner
une leçon. Dommage que tu ne puisses venir, me dit-il.
    — Certes.
    Et pourquoi, me demandai-je, Alfred avait-il
choisi Æthelred pour mener une expédition punitive contre Guthrum ? Æthelred
n’était même pas un Saxon de l’Ouest, bien qu’il ait prêté allégeance à Alfred
de Wessex. Mon cousin était mercien, et les Merciens n’ont jamais été de bien
fameux navigateurs. Alors pourquoi ? Pour moi, la seule explication, c’était
que le fils aîné d’Alfred, Edward, était encore un enfant dont la voix n’avait
pas mué et qu’Alfred était malade. Il redoutait de mourir et craignait que le
chaos ne s’abatte sur le Wessex si Edward montait sur le trône si jeune. Il
offrait donc à Æthelred l’occasion de racheter son échec à la Medwæg et de se
faire une réputation suffisante pour convaincre les thanes et ealdormen de
Wessex que le seigneur de Mercie pouvait les gouverner si Alfred mourait avant
qu’Edward soit en âge de lui succéder.
    La flotte d’Æthelred était un message d’Alfred
pour les Danes d’Estanglie : si vous vous attaquez au Wessex, nous
riposterons. Nous harcèlerons vos côtes, incendierons vos maisons et coulerons
vos navires. Alfred avait fait d’Æthelred un Viking et j’étais jaloux. Je
voulais prendre mes navires mais, ayant l’ordre de demeurer à Lundene, j’obéis
et regardai l’impressionnante flotte faire voile. Le plus grand des vaisseaux
pris à l’ennemi avait trente rames par bord, et il y en avait six comme lui ;
le plus petit en comptait vingt. Æthelred menait plus de mille hommes aguerris
provenant de sa garde et de celle d’Alfred. Accompagné de prêtres et, bien sûr,
d’Æthelflæd, qu’il exigeait toujours avec elle, il était à bord du grand navire
naguère orné d’une tête de corbeau, rebaptisé le Rodbora, le « Porteur
de la croix », et dont la proue figurait un énorme crucifix.
    C’était l’été. Ceux qui n’ont jamais vécu dans
une ville en pareille saison ne peuvent imaginer la puanteur et les mouches qui
y règnent. Des milans se repaissaient de charognes dans les rues qui
empestaient la pisse et la fiente des tanneries et des égouts quand le vent
était au nord. Le ventre de Gisela enflait, et ma crainte grandissait chaque
jour.
    Aussi souvent que possible, je prenais la mer
avec l’ Aigle-des-Mers et l’ Épée-du-Seigneur, descendant la Temse
et la remontant avec les marées. Nous traquions les navires de Beamfleot, mais
les hommes de Sigefrid avaient retenu la leçon et ne quittaient plus leur
criques qu’escortés d’au moins trois navires. Cependant, malgré leur présence, le
négoce atteignait de nouveau Lundene car les marchands avaient appris à
naviguer en grands convois d’une dizaine, avec des hommes armés à bord, et les
prises de Sigefrid étaient maigres, tout comme les miennes.
    C’est au bout de deux semaines que j’eus des
nouvelles de l’expédition de mon cousin, lors de l’une de ces incursions dans l’estuaire.
C’était toujours un bonheur de quitter la fumée et la puanteur de Lundene pour
retrouver le vent frais venu du large.
    Ce jour-là, l’air était envahi de papillons
bleus qui nous suivaient et se perchaient à bord. L’un d’eux vint se poser sur
mon index.
    — C’est de bon augure, seigneur, me dit
Sihtric.
    — Vraiment ?
    — Plus longtemps il restera, plus durera
ta chance, expliqua-t-il en tendant vainement sa main.
    — On dirait que tu n’en auras point, plaisantai-je
en songeant à Gisela et à notre enfant et en priant pour qu’il ne quitte pas
mon doigt.
    — J’en ai, seigneur, sourit Sihtric. Ealswith
se trouve à Lundene.
    C’était la catin dont il était amoureux.
    — Il y a plus à faire pour elle ici qu’à
Coccham, répondis-je.
    — Elle a cessé, répliqua-t-il.
    — Vraiment ? m’étonnai-je.
    — Oui, seigneur. Elle veut m’épouser.
    C’était un beau jeune homme bien bâti au
visage de faucon et aux cheveux noirs. Je le connaissais depuis presque son
enfance,

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