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Le Chant de l'épée

Le Chant de l'épée

Titel: Le Chant de l'épée Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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pas sauvé ni n’a retenu ma lame. Ton
roi veut que l’œuvre de Dieu soit accomplie et il s’agit de tuer des Danes, et
non de se distraire à contempler la nudité d’une jouvencelle !
    — C’est l’œuvre de Dieu ! cria Æthelred.
    J’eus envie de le tuer. Ma main tremblait sur
le pommeau de mon épée, mais au même instant la vieille revint.
    — Elle…
    — Parle, femme ! ordonna Erkenwald.
    — Elle ne montre nul signe, seigneur. Sa
peau est sans marques.
    — Ventre et cuisses ? insista l’évêque.
    — Elle est pure, répondit Gisela en
revenant, Æthelflæd dans ses bras.
    Erkenwald parut déçu, mais il se ressaisit et
reconnut de mauvaise grâce qu’Æthelflæd était en effet pure.
    — Elle est d’évidence sans disgrâce, seigneur,
dit-il à Æthelred en m’ignorant.
    Derrière les prêtres qu’il tenait en respect, Finan
sourit en voyant Aldhelm et Æthelred, pourtant armés, qui n’osaient point lever
la main sur moi.
    — Ton épouse est sans disgrâce, dis-je à
mon cousin. C’est toi qui la disgracies.
    Il sursauta comme si je l’avais giflé.
    — Tu es…
    Je laissai alors libre cours à ma colère. J’étais
bien plus grand et robuste que mon cousin, et je le poussai sans ménagement
contre le mur avant de lui dire son fait. Il fut le seul à pouvoir m’entendre. Aldhelm
fut peut-être tenté de venir à son secours, mais Finan le surveillait et la
réputation de l’Irlandais suffisait à le retenir.
    — Je connais Æthelflæd depuis son enfance,
dis-je à mon cousin. Et je l’aime comme ma propre fille. Comprends-tu cela, vermine ?
Elle est comme une fille pour moi et c’est une bonne épouse pour toi. Et si tu
la touches encore, mon cousin, si je vois la moindre marque sur le visage d’Æthelflæd,
je viendrai te tuer. (Il ne pipa mot. Je me retournai vers Erkenwald.) Et qu’aurais-tu
fait, l’évêque, si les cuisses de dame Æthelflæd avaient pourri ? Aurais-tu
osé tuer la fille d’Alfred ?
    Erkenwald murmura qu’il l’aurait vouée au
couvent. Je n’écoutais déjà plus et j’étais allé retrouver Aldhelm.
    — Et toi, dis-je, tu as frappé la fille d’un
roi.
    Je lui assenai un tel coup qu’il pirouetta et
parvint à peine à rester debout. J’attendis pour lui donner la possibilité de
riposter, mais comme il n’en avait pas le courage je le frappai de nouveau, avant
de reculer et d’annoncer, assez fort pour que tous entendent :
    — Et le roi de Wessex ordonne au seigneur
Æthelred de faire voile.
    Alfred n’avait rien ordonné de tel, mais Æthelred
n’oserait demander confirmation à son beau-père. Quant à Erkenwald, il
rapporterait sans nul doute au roi que j’étais entré en armes dans une église
et l’avais menacé, et Alfred en serait fâché. Il m’en voudrait bien plus d’avoir
profané une église qu’aux prêtres d’avoir humilié sa fille, mais je voulais qu’il
soit fâché. Je voulais qu’il me punisse en me libérant de ma parole et de mon
devoir. Je voulais qu’il fasse à nouveau de moi un homme libre, avec son épée, son
bouclier et des ennemis. Je désirais être débarrassé d’Alfred, mais le roi
était trop malin pour m’y autoriser. Il savait précisément comment me punir. En
me forçant à tenir ma parole.
    Deux jours plus tard,
longtemps après la fuite de Gunnkel de Hrofeceaster, Æthelred fit enfin voile. Sa
flotte de quinze navires, la plus puissante qu’eut jamais assemblée le Wessex, descendit
la Temse au jusant, à la suite d’un message courroucé de Steapa, venu de
Hrofeceaster : Alfred exigeait de savoir pourquoi la flotte traînait alors
que les Vikings vaincus s’enfuyaient.
    Steapa séjourna cette nuit-là chez moi.
    — Le roi est mécontent, me dit-il au
souper. Jamais je ne l’ai vu si fâché !
    Gisela fut fascinée de voir Steapa manger. D’une
main, il portait à sa bouche des côtes de porc qu’il déchiquetait, tandis que
de l’autre il s’enfournait du pain.
    — Très fâché. La Sture, ajouta-t-il
mystérieusement.
    — La Sture ?
    — Gunnkel y avait établi un camp et
Alfred pense qu’il y est retourné.
    La Sture était un fleuve d’Estanglie au nord
de la Temse. J’y étais allé une fois et me rappelais un large estuaire protégé
des tempêtes par un long banc de sable.
    — Il est à l’abri là-bas, dis-je. C’est
le territoire de Guthrum.
    — Guthrum l’a accueilli, répondit Steapa.
Cela irrite Alfred. Il dit qu’il faut

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