Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Chant des sorcières tome 2

Le Chant des sorcières tome 2

Titel: Le Chant des sorcières tome 2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
Vom Netzwerk:
raccompagna jusqu'à la porte de son bureau. Soulagé par la tournure des événements, Enguerrand se rendit à la capitainerie et s'inquiéta du premier navire en partance. C'était un chebek qui se dirigeait vers Gênes. Il paya sa traversée et celle de Mounia, puis se présenta au couvent avec le sauf-conduit signé du grand maître. Ramener Mounia au port fut facile. S'embarquer, moins. Ils étaient devant la tour de Naillac lorsque Hugues de Luirieux leur barra la route. De toute évidence, quelqu'un de la capitainerie ou du couvent avait dû l'avertir.
    — Tu outrepasses tes droits, Sassenage. Cette femme est à moi, grinça-t-il.
    D'un geste, Enguerrand rabattit Mounia derrière lui avant de poser la main sur la garde de son épée.
    — J'ai ici un titre de propriété qui prouve le contraire.
    Le regard d'Hugues de Luirieux s'étrécit dans ses orbites creuses.
    — On n'achète pas une chrétienne.
    — J'ai renié ma parole. Je refuse d'abjurer ma foi, s'exclama Mounia par-dessus l'épaule d'Enguerrand.
    Hugues de Luirieux devint enragé.
    — Chienne ! Tu oublies ce que tu me dois. Tu ne t'en tireras pas ainsi, tu peux m'en croire ! Soldats !
    Le port grouillait de monde autour d'eux, indifférent à leur querelle. Pourtant, deux hospitaliers commis à la sécurité se précipitèrent, comme s'ils n'avaient attendu que cet ordre pour intervenir. À leur demande, Enguerrand déroula les documents en sa possession.
    — Tout est en règle. Vous et votre esclave pouvez embarquer, conclurent-ils, visiblement à regret.
    — C'est impossible. Qui a signé ? s'étrangla Hugues de Luirieux.
    — Le grand maître lui-même.
    Il blêmit. De toute évidence, c'était une hypothèse qu'il n'avait pas envisagée et contre laquelle il ne pouvait rien. Enguerrand le toisa avec mépris tout en entraînant Mounia par l'avant-bras.
    — Nous nous reverrons, Sassenage. Toi et ta putain me paierez cet affront, je t'en fais serment.
    — Qu'il t'étouffe ! lança Mounia en riant, avant de s'élancer vers la passerelle.
    Malgré les tempêtes incessantes qui les contraignirent à rester enfermés, cette belle gaieté lui était restée le temps de la croisière. Refusant de parler d'elle, Mounia ne cessa de l'interroger sur son pays, les coutumes de ses seigneurs, sur celles de la cour. Elle aspirait aussi à tout connaître de l'homme qui par deux fois l'avait sauvée d'une mort certaine, sans rien exiger en retour. Car Enguerrand mit un point d'honneur, dès lors que le navire s'écarta de la côte, à se tenir distant et réservé, pour bien marquer sa différence avec Hugues de Luirieux. D'autant plus que cette histoire contenait de nombreuses zones d'ombre qu'il eût aimé élucider.
    Au deuxième jour de la traversée, il lui en parla :
    — Pendant votre captivité avec le prince, auriez-vous surpris quelque propos qui justifierait l'empressement du sire de Luirieux à vos épousailles?
    — Rien, non. Je ne l'avais même jamais rencontré avant qu'il me serve d'escorte. J'ai tout de suite vu que je lui plaisais. Sans doute ai-je eu tort de lui manifester de l'intérêt moi-même, mais je craignais pour ma vie et j'avoue, honteusement, que j'espérais par ce moyen l'y attacher. Si j'avais su en quel piège cela me plongerait, je jure que je m'en serais gardée.
    — Je ne crois pas que ce soit la seule raison, Mounia. Un petit seigneur comme lui remis dans la vie civile pour sauver son nom et son titre par une descendance, cherche un hyménée propre à le grandir, pas une ancienne esclave dépourvue de dot et d'alliance. Et quand bien même sa perversité aurait eu besoin de discrétion, les putains de l'île s'en seraient accommodées. Non. Je suis convaincu que vous pouviez lui apporter autre chose. Quelque chose de précieux pour lui ou pour l'homme qu'il sert. Reste à savoir qui est cet homme. Bayezid ? Il aurait pu vouloir des informations précises sur la captivité de son frère ? Ou un autre qui, à l'inverse, serait favorable à Djem ? À Rhodes on ne parle que de lui dans tous les endroits où j'ai trompé mon ennui. À mots couverts souvent, car à ce que j'ai compris, les partisans de Djem sont plus nombreux qu'il paraît. Nombre de souverains rêvent d'une reprise des croisades quand d'Aubusson essaie, lui, de préserver la paix, favorable à la prospérité de l'Ordre.
    Mounia baissa les yeux et, une fraction de seconde, Enguerrand eut le sentiment qu'elle savait de quoi il

Weitere Kostenlose Bücher