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Le Chant des sorcières tome 3

Le Chant des sorcières tome 3

Titel: Le Chant des sorcières tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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cour, lui s'était précipité, avait relevé Philippine et, lui passant un bras sous l'épaule, l'avait ramenée à l'intérieur de la bâtisse. À la faveur du trajet, il avait découvert sous ses doigts la naissance d'un sein, que le gilet de cuir sans manches écrasait. Avec le bon sens des montagnards, il avait aussitôt compris ce qui venait de se passer.
    Philippine le lui avait confirmé d'une voix mourante.
    — Aidez-moi, aidez-nous, avait-elle supplié pour finir.
    Il avait accepté.
    Laissant son fils, acquitté de sa tâche, puiser de l'eau au puits qui se trouvait près du potager, il avait précédé la damoiselle à l'étage. Là, dans une des chambres, il avait ouvert le coffre qui recelait les robes de son épouse morte des fièvres l'hiver précédent, l'invitant à choisir celle qui lui plairait.
    Lorsque Philippine était descendue une heure plus tard, lavée, coiffée, changée, malgré sa détresse, lancinante, elle était de nouveau elle-même, prête à affronter les hospitaliers.
    Elle était sortie de la bâtisse.
    Feu Philibert de Montoison avait disparu et le palefrenier achevait de balayer la cour qu'ils avaient abondamment paillée pour absorber le sang répandu.
    — Où est le corps ? avait-elle demandé.
    Impressionné par sa beauté dans cette robe sobre qui révélait à présent sa féminité, le jouvenceau avait tendu un doigt vers le petit cimetière, derrière le mur de la grange. Philippine s'y était dirigée sans hésiter et avait trouvé l'aubergiste qui plantait une croix sur un nouveau tumulus de terre.
    — Mon épouse aurait été heureuse de vous la voir porter. Elle vous va bien, avait-il commenté avant de se tourner vers une des tombes.
    Comme lui, Philippine avait joint ses mains devant les sépultures.
    — La troisième est celle de notre fille. Elle avait six ans. Perdre les gens qu'on aime, je sais ce que c'est, lui avait confié encore l'aubergiste avant de se mettre à prier.
    Philippine avait compris. Personne ne retrouverait Philibert de Montoison, et Djem, s'il était repris, ne serait pas accusé de l'avoir assassiné. Si elle ne le révélait elle-même, Philibert de Montoison pourrait dormir en paix.
     
    En reconnaissant sa fille adossée au mur de verdure de la bâtisse, entre deux fenêtres entrebâillées d'où s'échappaient les conversations des voyageurs et l'odeur des rôtis, Jacques de Sassenage sauta à bas de son cheval. Levée à son tour, Philippine lui tomba dans les bras à mi-chemin.
    — Philibert ? souffla-t-il à son oreille, inquiet de savoir que le chevalier les précédait.
    Elle baissa la tête contre son pourpoint.
    — Enterré, répondit-elle d'une même voix étouffée, d'autant que Guy de Blanchefort s'approchait, l'air grave et furibond sous ses traits tirés.
    Visiblement, eux non plus n'avaient guère dormi ces derniers jours. Satisfait de cette réponse, mais n'en laissant rien paraître, Jacques de Sassenage repoussa Philippine pour la gourmander. Il le devait.
    — Ma joie de vous revoir saine et sauve n'enlève rien à la colère qui m'étreint, ma fille. Votre conduite inqualifiable trouvera en son temps la punition qu'elle mérite. Pour l'heure, le temps presse.
    — Où est-il ? le coupa sèchement Guy de Blanchefort en la couvrant d'un œil sévère.
    Derrière lui, les soldats mettaient pied à terre.
    Gagner du temps, voilà tout ce qu'elle devait faire, songea Philippine en se drapant dans un voile de hautaine dignité.
    — Je n'ai rien à vous dire.
    Un soufflet lui balaya le visage. Elle le reçut en pleine conscience des remords qu'il venait de coûter à son père, dressé devant elle de toute son autorité.
    — Parle ! lui ordonna-t-il.
    Elle les foudroya l'un et l'autre d'un regard de jais mais s'emmura dans le silence.
    — Nous n'en tirerons rien, se désola le baron, et je ne peux la fouetter sur cette place.
    — Bouclez-la quelque part. Qu'elle ne soit pas dans nos jambes lorsque nous cernerons le prince, décréta froidement Guy de Blanchefort avant de déployer ses hommes d'un geste et de se diriger vers la bâtisse.
    Se laissant entraîner par le bras, Philippine se réjouissait intérieurement. Guy de Blanchefort s'imaginait que si elle était là, Djem et Nassouh s'y trouvaient également. Ils ne seraient pas longs à s'apercevoir du contraire, mais c'était autant de gagné.
    Dans la salle, aidé comme chaque soir de deux servantes arrivées d'un village voisin, l'aubergiste

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