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Le chant du départ

Le chant du départ

Titel: Le chant du départ Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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imprime déjà secrètement la confession de D’Antraigues prouvant la trahison de Pichegru. Des affiches sont apposées sur les murs, dénonçant le complot de l’étranger. »
     
    Attendre le coup de sabre que donnera Augereau, demeurer à distance mais ne pas rester inactif.
    Napoléon harcèle, en les convoquant au château de Passariano, les hommes auxquels il a confié le soin de lancer des journaux à Paris et à Milan, à destination des citoyens qui comptent ou des soldats. Il feuillette les premiers numéros du Courrier de l’armée d’Italie ou du Patriote français , de La France vue de l’Italie , ou du Journal de Bonaparte et des hommes vertueux . Il s’emporte. Trop tièdes ! Il ne faut pas laisser sans réponse les attaques des journaux royalistes et prôner des idées simples, fortes. « Qu’on parle de moi, de mes exploits », dit-il.
    On ne loue jamais assez un chef.
    Il lit à haute voix une phrase du Courrier : « Il vole comme l’éclair, et frappe comme la foudre, il est partout et il voit tout. »
    Voilà ce qu’il convient d’écrire. Il dicte : « J’ai vu les rois à mes pieds, j’aurais pu avoir cinquante millions dans mes coffres, j’aurais pu prétendre à bien autre chose ; mais je suis citoyen français, je suis l’envoyé et le premier général de la Grande Nation, je sais que la postérité me rendra justice. »
    Si l’on n’assène pas ce genre de vérités dans les journaux qu’il paie, qui le proclamera ?
    Il y a quatre-vingts journaux royalistes, s’exclame-t-il, qui répandent chaque jour des outrages, des calomnies.
    « Je vois que le club de Clichy veut marcher sur mon cadavre pour arriver à la destruction de la République. On dit : “Nous ne craignons pas ce Bonaparte, nous avons Pichegru.” Il faut demander qu’on arrête ces émigrés, qu’on détruise l’influence des étrangers. Il faut exiger qu’on brise les presses des journaux vendus à l’Angleterre, plus sanguinaires que ne le fut jamais Marat. »
    Lorsque ses hommes de plume – Jullien, un Jacobin, Regnault de Saint-Jean-d’Angély, ancien membre de la Constituante, Arnault, un écrivain – sont partis, il appelle Berthier. Il veut que chaque matin on lui fasse la lecture des principaux journaux, français et étrangers. La situation à Paris est incertaine. Il s’agit, comme à la guerre, de ne rien laisser au hasard. L’opinion compte.
    Entre chacune de ses phrases, il s’interrompt. « Il faut à la nation un chef, un chef illustre par la gloire, dit-il, et non par des théories de gouvernement, des phrases, des discours d’idéologues auxquels les Français n’entendent rien… Une République de trente millions d’hommes, quelle idée ! Avec nos moeurs, nos vices ! C’est une chimère dont les Français sont engoués, mais qui passera avec tant d’autres. Il leur faut de la gloire, des satisfactions de la vanité ; mais la liberté, ils n’y entendent rien. Voyez l’armée : les succès que nous venons de remporter, nos triomphes ont déjà rendu le soldat français à son véritable caractère. Je suis tout pour lui. »
    Puis il regarde longuement Berthier. On ne peut pas tout dire, même à celui qui vous est fidèle. Et cependant il faut suggérer, pour que cet homme comprenne, aide le dessein à prendre corps.
    « Un parti lève la tête en faveur des Bourbons, reprend Napoléon. Je ne veux pas contribuer à son triomphe. Je veux bien un jour affaiblir le parti républicain, mais je ne veux pas que ce soit au profit de l’ancienne dynastie, définitivement je ne veux pas du rôle de Monk qui rétablit la monarchie en Angleterre après Cromwell, je ne veux pas le jouer, et je ne veux pas que d’autres le jouent… »
    C’est mon « système » : je joue pour moi.
     
    Le 9 septembre. Napoléon ouvre la lettre que lui adresse, par courrier spécial, Lavalette. Les idées se bousculent.
    Le 4 septembre – 18 Fructidor –, à trois heures du matin, Paris a été militairement occupé par les troupes d’Augereau. Les royalistes ont été arrêtés. Barras triomphe. Carnot est en fuite. Barthélemy, l’autre Directeur, fidèle du club de Clichy, a été pris. Le Conseil des Cinq-Cents et le Conseil des Anciens ont été épurés. D’énormes affiches ont reproduit sur tous les murs de Paris les papiers de D’Antraigues. « Mon ouvrage », dit Napoléon en repliant la lettre.
    C’est Napoléon qui a envoyé Augereau à Paris et dévoilé la trahison de

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