Le clan de l'ours des cavernes
l'enfant.
Elle eut alors l'impression que ses poumons allaient éclater, faute d'avoir eu le temps de prendre une grande inspiration avant de plonger, et elle craignit de s'évanouir tandis qu'elle remontait à la surface, chargée de son précieux fardeau. C'était la première fois qu'elle nageait en tirant quelqu'un mais, soutenant d'un bras l'enfant en veillant à lui garder la tête hors de l'eau, et se propulsant de ses jambes et de son bras libre, elle parvint à regagner la rive.
Le clan qui avait suivi ses efforts, paralysé par l'angoisse, accourut à sa rencontre, quand il la vit enfin reprendre pied.
Elle souleva le corps inerte d'Ona pour la tendre à Droog, et s'aperçut alors de son épuisement. Creb la soutint d'un côté et avec une vive surprise elle vit Brun la soutenir de l'autre. Droog les avait devancés, et au moment o˘ Ayla s'écroula sur le sable, Iza était déjà en train d'éjecter l'eau des poumons de l'enfant.
Ce n'était pas la première fois qu'un membre du clan échappait à la noyade, et Iza savait ce qu'il fallait faire en pareil cas. Ona se mit soudain à
tousser et à cracher, et entrouvrit légèrement les yeux.
- Mon bébé ! Mon bébé ! s'écria Aga en se jetant à genoux. J'étais s˚re qu'elle était morte. Je pensais qu'elle était partie. Oh, mon enfant, ma petite fille !
Droog prit l'enfant des bras de sa mère et, la serrant à son tour contre lui, il la ramena au campement. Contrairement à la coutume, Aga marchait à
ses côtés en caressant sa fille rescapée.
Personne n'en croyait ses yeux. Personne n'avait jamais regagné le rivage une fois entraîné vers le large, et des regards incrédules et admiratifs suivaient Ayla tandis qu'elle remontait la plage. Pour le clan, le sauvetage d'Ona était un véritable miracle. La chance accompagne cette fille, pensait chacun. Elle en a toujours eu. N'a-t-elle pas découvert la caverne ?
Les poissons s'agitaient encore spasmodiquement sur le rivage, pris au piège dans le filet. Certains avaient pu s'échapper quand le clan s'était rendu compte de ce qui se passait et qu'ils avaient tous couru à la rencontre d'Ayla revenant avec Ona, mais le plus gros de la pêche était sauvé. Les hommes assommèrent les prises à coups de massue, et les femmes entreprirent de les vider.
- Une femelle ! s'exclama Ebra en ouvrant le ventre d'un énorme esturgeon, ce qui fit accourir tout le monde.
- Regardez ça ! s'écria Vorn en prenant une poignée de ces petits oeufs noirs dont le clan raffolait.
La tradition voulait que chacun puise à volonté dans les entrailles de la première femelle attrapée et se régale à satiété. Les autres prises seraient salées et conservées pour être consommées plus tard, mais le poisson n'était jamais aussi délicieux que frais pêché. Ebra arrêta le geste du garçon et se tourna vers Ayla.
- Toi d'abord, Ayla, dit-elle.
La fillette jeta à la ronde des regards surpris, gênée de se trouver au centre de l'attention générale.
- Vas-Y, Ayla, l'encouragèrent les autres.
Elle regarda Brun qui hocha la tête d'un air approbateur. Puis, timidement, elle s'avança pour prendre une poignée d'oeufs noirs et brillants. Alors Ebra donna le signal, et chacun plongea la main dans le ventre de l'esturgeon dans un joyeux désordre. Un grand malheur venait de leur être épargné et ils désiraient fêter ça.
Ayla regagna lentement leur abri. Elle mesurait tout l'honneur qui lui avait été fait. Avec chaque bouchée d'oeufs il lui semblait savourer le plaisir merveilleux d'avoir été réellement acceptée par le clan. Ce plaisir-là, elle n'était pas près de l'oublier.
Une fois le poisson assommé, les hommes avaient coutume de laisser aux femmes la t‚che de le vider et de le préparer pour la conservation. Outre les outils de silex tranchants utilisés pour ouvrir et découper leurs prises, elles se servaient d'un instrument spécial. C'était une sorte de couteau dont la partie supérieure était émoussée pour permettre un maniement plus facile, et qui comportait également, vers la pointe, un léger renflement pour y placer l'index et contrôler avec précision la pression de la main, afin d'écailler le poisson sans l'abîmer.
La pêche était bonne : outre les esturgeons, le filet était plein de morues, de carpes d'eau douce, de quelques grosses truites et même de crustacés. Les oiseaux, attirés par le poisson, se disputaient leurs entrailles, dérobant à l'occasion
Weitere Kostenlose Bücher