Le clan de l'ours des cavernes
de fin d'après-midi n'était pas loin d'atteindre l'horizon. Elle siffla Whinney, revint en arrière pour vérifier la position du troupeau et estima qu'il atteindrait la rivière à un moment quelconque de la journée du lendemain.
Elle retourna alors à l'endroit o˘ elle avait creusé la fosse et se rendit compte que, même à la nuit tombante, le piège était bien trop évident. Les rennes vont le voir, se dit-elle, complètement découragée, et ils feront un détour pour l'éviter. Il est trop tard pour faire quoi que ce soit. Peut-
être aurai-je une idée demain matin.
Mais quand elle se réveilla, elle en était toujours au même point. Le ciel s'était couvert de nuages pendant la nuit et elle fut réveillée par une grosse goutte de pluie qui tomba sur son visage. La veille, comme sa peau d'aurochs était humide et boueuse, elle l'avait mise à sécher non loin de là et ne s'en était pas servie pour monter sa tente. Pour se protéger de l'averse, elle s'enveloppa dans la fourrure o˘ elle avait dormi, rabattant un des pans sur sa tête, et recouvrit à la h‚te les restes noircis du feu.
Un éclair crépita et illumina les vastes plaines jusqu'à l'horizon. Un instant plus tard, un lointain grondement de tonnerre se fit entendre en guise d'avertissement. Comme s'ils obéissaient à ce signal, les nuages déversèrent aussitôt un veritable déluge. Ayla attrapa la peau d'aurochs et s'en enveloppa.
La lumière du jour chassa peu à peu les ombres qui se trouvaient au fond des creux et le paysage émergea de la nuit. Une p‚leur grise s'installa sur les steppes, comme si les nimbus avaient effacé toutes les couleurs printanières. Le ciel lui-même était d'une teinte indéfinissable, ni blanc, ni bleu, ni franchement gris.
Lorsque la fine couche de sol perméable, qui recouvrait le permafrost, fut saturée, l'eau commença à s'accumuler en surface. En dessous de la couche de terre arable, le sol était gelé en permanence et aussi dur que le mur de glace qui se trouvait au nord. Pour cette raison, les eaux de pluie ne pouvaient être drainées en profondeur. Dans certaines conditions, le sol gorgé d'eau pouvait se transformer en véritables fondrières, capables d'engloutir trçtreusement un mammouth adulte. Et si cela arrivait au pied du glacier, il suffisait qu'il se mette à geler juste après ces pluies torrentielles pour que le mammouth soit alors conservé dans la glace pour des millénaires.
Le ciel plombé laissait tomber de grosses gouttes d'eau à l'endroit o˘, précédemment, Ayla avait allumé son feu. En voyant la pluie creuser des cratères dans cette mare noir‚tre, puis s'étaler en cercles concentriques, la jeune femme aurait tout donné pour se retrouver bien au sec à l'intérieur de la caverne. Elle avait eu beau graisser la peau épaisse de ses chausses et remplir celles-ci de touffes de carex, le cuir laissait passer l'humidité et elle finissait par avoir froid aux pieds. Le marécage que formaient maintenant les rives du cours d'eau avait considérablement refroidi son désir de tuer un renne.
quand les mares se mirent à déborder et que le trop-plein d'eau commença à
ruisseler en direction de la rivière, emportant au passage des branches, des herbes et les feuilles de l'automne précédent, Ayla alla se réfugier sur un tertre. Pourquoi ne pas rentrer ? se demandat-elle en grimpant làhaut avec ses deux paniers. Elle jeta un coup d'oeil sous les couvercles et s'aperçut que les paniers en tiges de massette n'avaient pas laissé passer l'eau : le contenu était sec. Cela ne l'avançait pas à grand-chose. Je ferais mieux de rentrer, se dit-elle. Jamais je n'arriverai à prendre un renne au piège. Aucun d'eux ne va se précipiter dans cette fosse simplement parce que j'en ai envie. Ce sera pour une autre fois. Jessaierai de tuer un des vieux retardataires quand ils passeront par là. Sa viande sera beaucoup moins tendre et sa peau toute couturée, mais tant pis.
En soupirant, Ayla s'installa en haut du tertre et ramena sa fourrure et la peau d'aurochs autour d'elle. Il m'a fallu tellement de temps et d'effort pour mettre mon plan au point, se dit-elle, que ce n'est pas une petite pluie qui va m'arrêter. Peut-être n'arriverai-je pas à tuer de renne, mais ce ne sera pas la première fois qu'un chasseur rentre bredouille. De toute façon, je ne risque rien à essayer.
quand l'inondation commença à saper la base du monticule en terre sur lequel elle
Weitere Kostenlose Bücher