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Le Coeur de la Croix

Le Coeur de la Croix

Titel: Le Coeur de la Croix Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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guerrière.
    Morgennes et Yahyah pénétrèrent dans une salle au plafond
bas, à l’entrée barrée par un rideau. Ils se trouvaient dans une petite grotte,
aux murs blanchis à la chaux, avec par endroits des taches d’humidité et des
peintures naïves figurant des chasseuses. Au bout d’un tapis de laine aux
motifs représentant des scènes saphiques était assise une jeune guerrière, aux
traits adolescents.
    Morgennes s’agenouilla, pensant qu’il devait s’agir de
Zénobie, la reine des Amazones.
    — Relevez-vous, dit-elle. Je ne suis pas celle que vous
croyez : vous la verrez demain. Je m’appelle Eugénie. Je suis la sœur de
Fémie.
    Morgennes tressaillit et porta la main à son cœur, comme
pour dissimuler le médaillon qui pendait à son cou. C’est alors qu’un mouvement
se fit derrière eux, et qu’une voix masculine, la voix d’un vieillard,
déclara :
    — Ah, le voici…
    Morgennes se tourna vers celui qui venait d’entrer. Et
manqua s’évanouir : Guillaume de Tyr était là, vivant, devant lui.

 
21.
    « Notre fin était proche,
nos jours accomplis ; oui notre fin était arrivée. »
    (Lamentations, IV, 18.)
     
    — Je vous croyais mort ! s’exclama Morgennes en
mettant un genou en terre pour baiser la main du vieil archevêque.
    — Ma foi, dit Guillaume en souriant, j’ai quelques
douleurs aux articulations, mais je suis bien en vie…
    Quelques instants plus tard, Guillaume les invitait à
partager son souper.
    — Nous dînons tard, ici, dit Guillaume pendant qu’on
allait chercher Cassiopée et Taqi. Il y a tant à faire et les journées sont si
courtes…
    Le vieil homme n’avait pas pris une ride, ni perdu un seul
de ses nombreux et longs cheveux blancs. Sa jovialité ne s’était en rien ternie
depuis que Morgennes l’avait quitté, six ou sept ans auparavant, quand il était
parti à la recherche des larmes d’Allah pour soigner Baudouin IV.
    — Quelle joie ! dit Morgennes. À Jérusalem, tous
vous disaient mort.
    — Je suppose, répondit Guillaume, que la plupart s’en
réjouissaient.
    — Ceux du parti du roi Guy de Lusignan, de Gérard de
Ridefort et d’Héraclius, oui. Certainement. Les autres vous pleurent encore. Ce
sont les plus nombreux.
    — Malheureusement pas les plus forts, dit Guillaume en
souriant tristement.
    Il prit la main de Morgennes et la serra affectueusement, la
palpant, la regardant avec un très grand intérêt.
    — Vous avez donc réussi, constata-t-il. Je l’avais dit
à Baudouin : « Morgennes ne peut pas échouer. Il est le meilleur, le
plus fort d’entre tous. » Je repense souvent au regard du petit roi quand
il me demandait de vos nouvelles, alors que ses forces diminuaient : un
regard dont la vie se vidait, à la fois doux et résigné. Chaque jour, puis
chaque heure, vers la fin, Baudouin m’interrogeait : « Morgennes
est-il rentré ? » Je dois vous avouer qu’à un moment j’ai cru que
vous aviez abandonné, vaincu, et que vous aviez fui, ou que vous étiez mort.
Baudouin me rassurait alors : « Ne vous inquiétez pas, il va revenir…
Vous l’avez dit vous-même : “Il ne peut pas échouer.” » À ce
moment-là, je me suis demandé si je n’allais pas…
    La voix du vieil homme se perdit dans un murmure
incompréhensible, une phrase qu’il regretta presque aussitôt d’avoir prononcée.
    — Si vous n’alliez pas quoi ? insista Morgennes.
    Guillaume releva la tête, et riva son regard sur celui de
Morgennes, lui disant – gravement :
    — Faire comme ce Massada, qui – je le sais
maintenant – s’en venait chercher ici un remède stabilisant sa maladie.
Mais à quel prix !
    — Comment ça, à quel prix ? N’aviez-vous pas accès
à la cassette du royaume ? Ce remède était-il si cher ?
    — L’or n’était pas tout, précisa Guillaume en regardant
Yahyah. Il fallait aussi apporter un enfant, dont les chairs broyées, mélangées
à une thériaque, assuraient au malade quelques semaines, quelques mois tout au
plus, de répit. Ni Baudouin ni moi n’étions prêts à payer ce prix-là.
    — Ah ! fit Morgennes. C’est donc ainsi que Massada
a survécu…
    — Oui. Les Moniales les plus âgées savent des secrets
qui sont parmi les mieux gardés du monde. Elles savent… Mais nous parlerons
d’elles un peu plus tard. Allons rejoindre vos amis.
    Ils s’en allèrent chez Guillaume, qui habitait une petite
grotte non loin du sommet de l’oasis. Sur sa

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