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Le Coeur de la Croix

Le Coeur de la Croix

Titel: Le Coeur de la Croix Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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du
cadi Ibn Abi Asroun. Ensemble, ils étudieraient toutes les données. Quantité,
type, qualité et moral des forces civiles et militaires de la ville, quantité
et type de nourriture disponible, factions que l’on pouvait inciter à se rendre
ou pousser à la sédition, otages, chantages et manipulations possibles,
emplacement des entrepôts de vivres et de munitions, points faibles des
fortifications, travaux de sapes envisageables, prévisions météorologiques et
astrologiques…, tout était passé en revue dans le moindre détail. Saladin
répétait à qui voulait l’entendre ce vieux proverbe : « Souvent, un
stratagème est plus efficace que le courage. » C’est ainsi que, quelques jours
avant de quitter Tyr, il avait libéré Guy de Lusignan, à Naplouse – le
sortant de prison mais lui interdisant de regagner son trône. En revanche, il
avait autorisé la reine Sibylle, sa femme, à le rejoindre avec armes et
bagages. Jérusalem se retrouvait donc sans reine ni roi, n’ayant pour la
défendre que Balian d’Ibelin, et son patriarche, Héraclius. Avec un peu de
chance, ces deux-là ne tarderaient pas à se détester. Il se pourrait même que,
lassés l’un de l’autre, ils commettent des impairs, Balian préférant au joug
d’un chrétien odieux la tutelle d’un sultan réputé pour sa tolérance et sa
bonté. Ce système avait parfaitement fonctionné quand Saladin avait mis à
profit ses liens d’amitié avec Raymond de Tripoli pour miner la communauté
chrétienne de Terre sainte.
    Mais Saladin devait agir rapidement. Ses hommes commençaient
à trouver le temps long. Beaucoup voulaient rentrer chez eux, d’autant qu’il
leur avait interdit de piller. Déjà, ces chacals de Maraykhât avaient trahi.
Saladin avait donné l’ordre de mieux surveiller les bédouins – il avait
besoin d’eux, Bagdad n’ayant pas envoyé les renforts espérés.
    Il avait établi son camp au nord de la ville, non loin de la
porte de Damas – que les Franjis appellaient porte Saint-Étienne. De
l’autre côté, les toits orange de l’église Sainte-Marie-Madeleine le
narguaient. Saladin se promit d’en faire une mosquée, une fois Jérusalem en son
pouvoir.
     
    Quelques jours plus tôt, pressentant que Saladin allait
attaquer, des bourgeois avaient demandé à le rencontrer. Il se trouvait alors à
Ascalon. Habiles négociateurs, ils avaient obtenu du sultan des conditions qui
leur paraissaient favorables, mais une éclipse de soleil avait eu lieu à
l’instant où ils allaient lui remettre les clés de la ville. Poussant les hauts
cris, prenant peur de ce qu’ils interprétaient comme un signe de colère divine,
les bourgeois avaient imploré Saladin d’oublier leur démarche et de ne pas en
tenir compte. Une fois encore, le sultan avait eu un geste, disant qu’il
comprenait, et leur avait donné une escorte pour qu’ils puissent rejoindre
Jérusalem en toute sécurité et chargés de cadeaux. La manœuvre était aussi
habile que sincère sa générosité : les voyant revenir, couverts d’or et de
robes d’apparat, bien des Hiérosolymitains avaient trouvé Saladin plus charitable
que le destin, et demandé qu’on l’accueillît à bras ouverts.
    Châtillon avait fait capturer et périr sous la torture
quelques-uns de ceux qui murmuraient de telles paroles, afin que dans la ville
on n’entendît plus que la phrase : « Résister ou mourir. »
    Pour les curieux accoudés aux créneaux des murailles, où des
monceaux de pierres et des tonneaux d’huile étaient montés jour et nuit par la
population, ce fut comme si le crépuscule se prolongeait indéfiniment. En
effet, alors que le soleil venait de se coucher, ses feux restaient accrochés
au fer des lances mahométanes, si nombreuses qu’elles gardaient la nuit au
loin – ce qui se confirma quand tous les braseros du camp sarrasinois
s’allumèrent, faisant pâlir la plaine d’étoiles qui inondait le ciel. Les
bannières claquaient par centaines au vent nocturne, invisibles dans leurs
habits noirs, remarquables à la façon dont elles masquaient les feux –
dans des palpitations de lumière.
    Les habitants de Jérusalem observaient ce spectacle en
tremblant, à la fois excités et inquiets, se demandant quand Saladin donnerait
l’assaut.
    — C’est beau, quand même ! lâcha malgré lui un
bourgeois.
    Mais des voix s’élevèrent aussitôt :
    — Ne chômez pas ! Au travail ! Au
travail !
    Il s’agissait des

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