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Le Conseil des Troubles

Le Conseil des Troubles

Titel: Le Conseil des Troubles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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ombre sur le visage du général, elle suspendit son geste, ayant demi enfilé un chemisier de dentelle et, souriante :
    — Tancrède, ce qui doit être sera!
    Il se détendit aussitôt.
    On avait mis à la disposition de Marion une généreuse garde-robe. Mais il faisait chaud aussi, outre le chemisier, se contenta-t-elle de passer un joli jupon de Bruges.
    Ce que voyant, Bamberg ne revêtit aucun des deux uniformes neufs à sa disposition mais une chemise de soie et une culotte 1 rouge d'officier des dragons.
    On gagna la petite salle à manger où Scrub les attendait avec impatience bien que le Turc, par une mimique, signifiât que le chien avait déjà mangé. D'une coupable indulgence, Bamberg chassa l'objection d'un geste désinvolte.
    La table était ronde et petite, un mètre à peine séparait le couple et tous deux se regardaient, souriant, sans même éprouver le besoin de parler.
    Après le bain et cette impression de retrouver leurs corps, ils avaient terriblement faim, surtout Bamberg qui n'avait pas fait un véritable repas depuis des semaines.
    Puis arriva le souper d'une diversité, d'une richesse et d'une quantité qu'ils ne purent honorer, se contentant de goûter dès le troisième plat : un turbot garni d'écrevisses, une grosse truite, un pluvier doré, une mauviette, des huîtres, des pommes de Calvi, des poires Saint-Germain, une gelée de pommes de Rouen, une salade d'oranges et de citrons accompagnée de fleur d'oranger pralinée, du vin blanc de Meursault et du rouge de la Côte de Nuits...
    Bamberg regardait les plats repartir presque intacts avec une certaine tristesse, songeant à la dureté du siège où certains de ses hommes, affamés, allèrent jusqu'à manger du rat.
    Après, pour le général, tout devint nébuleux. Il devait se souvenir de Marion se levant la première en lui souriant, comme pour l'encourager. Du Turc qui par signes tentait de lui dire quelque chose, qu'il abandonna brusquement. De Scrub qui le suivait avec la confiance que donne l'habitude et qui parut outré lorsqu'il lui referma la porte devant la truffe.
    Il se souvint surtout du lit ouvert, de Marion, nue, ses seins magnifiques, son corps offert et ses bras qui s'ouvraient...
    Il songea curieusement que même l'Atlantide, à son apogée, ne put sans doute pas engendrer femme aussi ravissante...
    1 Jusqu'au XVIII e siècle, « culotte » désignait un vêtement du dessus, serré sous les genoux en raison des bottes. Le pantalon était réservé aux hommes du peuple d'où l'expression « sans-culotte » qui distinguait des aristocrates.

58.
    Le général, très attendu, n'arriva au camp le lendemain que vers deux heures de l'après-midi. Il se trouvait en compagnie de Mme de Neuville qui fut ovationnée par les officiers et les dragons des Opérations Spéciales, le souvenir de son courageux comportement prenant toute sa valeur à présent qu'on se trouvait loin du danger.
    Les hommes étaient reposés, lavés, rasés, vêtus d'uniformes neufs.
    Un dragon présenta Hautain, dont la robe avait été soigneusement brossée. Déjà, on amenait des chevaux en remplacement de ceux qui furent décimés pendant le siège et Clément de La Mothe-Sislées les choisissait un par un, avec le plus grand soin.
    L'effectif des Opérations Spéciales, en raison des tués ou blessés, se montait à 81 et Bamberg, qui présidait une commission de sélection, commença par intégrer les six survivants des gardes-françaises. Tous n'étaient pas excellents cavaliers mais, pendant le siège, ils avaient vite appris d'autres techniques de combat et donné cent preuves de leur courage.
    Puis vinrent les volontaires au nombre de 35 et Bamberg, assisté de son cousin Hugo et du lieutenant de Sereni, interrogea longuement chacun d'eux sur ses états de service.
    On n'en retint que 8.
    95! Avec les blessés qui se rétabliraient, on parviendrait bientôt au chiffre habituel de 100.
    Mais rien ne pressait, le roi ayant ordonné le repos pour ses dragons préférés qu'il renvoyait à Paris, hors les barrières, en deux cantonnements situés au Petit-Gentilly et à Arcueil, villages réputés pour leur grand nombre de guinguettes et d'auberges à prix modestes. L'été, on y dansait dans de nombreux bals, souvent pieds nus dans la poussière, et l'on y buvait du vin mais aussi de la bière. Il n'y manquait décidément que les matelotes des bords de Seine.
    Enfin, on parlait d'une caserne qu'on ferait construire exclusivement pour

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