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Le Conseil des Troubles

Le Conseil des Troubles

Titel: Le Conseil des Troubles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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Bamberg l'écourta car l'homme et sa femme paraissaient paralysés à l'idée d'abriter un duc, qui plus est général, et une baronne. Ils proposèrent avec insistance de laisser la maison mais Bamberg refusa, menaçant d'aller coucher dehors, si bien qu'on se résolut à leur laisser l'étable qui fut garnie de paille fraîche.
    Avant de s'aller coucher, le général bourra une pipe et décida d'inspecter la garde, ne parvenant pas à dissuader la baronne de Neuville de l'accompagner.
    Il faisait un froid de gueux et la jeune femme regardait à la dérobée le visage de son amant éclairé par la lueur rouge du fourneau. Bamberg, comme tous ses officiers, fumait en une pipe de terre à long tuyau et petit fourneau manufacturée en Hollande.
    — Puis-je essayer?
    Surpris, il lui tendit la pipe et la jeune femme apprécia la chaleur du fourneau en sa main glacée. Elle toussa mais, dès la troisième fois, maîtrisait son affaire :
    — C'est étrange, et plutôt agréable.
    — Le soir, après le souper, c'est une de nos habitudes avec Hugo et Clément.
    — Et le tabac?
    — Nous ne l'avons jamais payé, les pipes non plus : l'ennemi pourvoit amplement à nos besoins.
    — Le roi aime le tabac?
    — Oui, il prise même pendant les offices, puis éternue en un mouchoir de dentelle. Les plus grands noms de l'histoire de France ne jurent que par le tabac et Molière a écrit : « Qui vit sans tabac n'est pas digne de vivre. » Je crois qu'il visait les petits bourgeois et les boutiquiers qui sont gens frileux de tout et détestent la fumée.
    Arrivé près de l'enclos aux chevaux, Bamberg lança le mot de passe :
    — Jolie fée !
    Auquel répondit le mot de ralliement :
    — Petit lutin!
    — Rien à signaler? demanda Bamberg.
    Le jeune dragon regarda la forêt avec méfiance :
    — Les loups ne sont pas loin, monsieur le général. Je les devine, ayant jadis été berger. En cet instant, ils se regroupent et chez eux la nouvelle doit courir d'une centaine de chevaux, soit davantage qu'ils n'en ont jamais rêvé.
    Bamberg hocha la tête :
    — J'ai vu Hautain attaqué par des loups. Ses ruades furent si habiles qu'il en tua deux.
    — Mais Hautain est un cheval exceptionnel, monsieur le général! Pour le commun, un loup peut sauter sur un cheval et lui dévorer l'encolure.
    Vaguement inquiet, car les loups tuaient chaque année des milliers de personnes dans le royaume, et qu'il les avait déjà combattus, Bamberg demanda:
    — Sais-tu quel fut le nombre de la plus forte meute qu'on vit jamais ?
    — Sur les marches de l'est, on parle encore d'une meute de 300 loups qui submergèrent tout dans le royaume à l'époque du roi Louis le Onzième. Ils auraient même décimé les milices et les soldats lancés contre eux.
    — Alors sois vigilant, dragon !
    Comme le général semblait soucieux, Marion ne lui parla plus des loups puis, étant assez loin des sentinelles, elle lui prit la main :
    — Magicien... Mélusine... Jolie fée... Petit lutin... Où trouves-tu tes jolis mots de passe ?
    Il haussa demi les épaules:
    — Jolie fée, c'est pour toi. Le reste me vient de l'enfance, des belles histoires de Marie-Thérèse. Sans elle, j'eusse été très malheureux car jeune orphelin, on songea m'envoyer à Laval, chez un oncle demi-fou après avoir reçu à la guerre une balle dans la tête.
    Il s'immobilisa et elle vit dans ses yeux cette petite lueur amusée qu'elle connaissait bien:
    — Sais-tu comment il est mort?
    — Oh, dis-le-moi!
    — Un jour, étant monté au grenier, il se cogna le front contre une poutre et prit très mal la chose. Ses serviteurs, effarés, l'entendirent déclarer à la poutre : « Tu manques à tous tes devoirs, félonne, en attaquant ton maître. Cela demande réparation et l'un de nous ne survivra pas au duel ! » Ayant dit, il commença à cogner son front contre la poutre. Le combat dura trois jours et deux nuits et l'oncle rendit l'âme, ne laissant que ses dettes en héritage. Je n'ai pas repris sa maxime favorite qui était : « J'ai peu d'idées, aussi je ne les laisse point repartir. »
    Ils rirent tous deux puis, sous le froid mordant, gagnèrent l'étable en courant mais sans se lâcher la main.
    ***
    Comme la maison, l'étable était minuscule et l'espace partagé en deux : d'un côté, la vache; de l'autre, le couple étendu sur la paille fraîche.
    Scrub, qui cherchait la chaleur, s'était enfoncé presque complètement dans la paille quant à Bamberg et Marion, ils se

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