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Le Conseil des Troubles

Le Conseil des Troubles

Titel: Le Conseil des Troubles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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physique quelconque, d'une mise austère où dominait l'habit noir, Mortefontaine servait en qualité de major dans les services de police dirigés par le lieutenant général Nicolas de La Reynie. Celui-ci, homme intelligent, avait depuis longtemps compris qu'il ne pouvait seul suffire à la tâche, ses attributions lui faisant obligation de veiller à l'ordre public, à la sûreté, à la répression des crimes mais aussi au ravitaillement, au bon fonctionnement des métiers, à la surveillance du livre...
    La charge de La Reynie, qui en faisait un des hommes les plus puissants du royaume, avait été créée le 15 mars 1667 peu après, comble d'audace, l'assassinat du lieutenant criminel de police Tardieu, ainsi que son épouse, en leur hôtel particulier parisien.
    Plus tard, La Reynie avait manoeuvré avec doigté et finesse dans « l'Affaire des Poisons », révélée après l'arrestation de la femme la Voisin, le 19 mars 1679, et qui mettait en cause de grands noms, proches du roi, dont certains durent comparaître devant la Chambre Ardente.
    Mais là où le chef de la police fut très inspiré, c'est en comprenant la nécessité de déléguer, car nul ne peut tenir en bon ordre un front d'activités aussi vaste.
    Il en était ainsi du major Robert de Mortefontaine chargé des affaires délicates mais aussi de la surveillance des étrangers et de la sûreté d'État face aux menées mettant celle-ci en péril, tels ces réseaux de huguenots livrant à l'ennemi des plans de fortifications, et qu'il venait de démanteler.
    Pourtant, ce qui devait arriver se produisit : Louis XIV, remarquant les qualités de ce policier, se l'attacha, coupant peu à peu la dépendance de Mortefontaine vis-à-vis de La Reynie.
    Pontecorvo et Mortefontaine étaient convenus de se retrouver à l'auberge du Farfadet ivre et pour y parvenir, l'Italien avait chevauché toute la nuit.
    Les deux hommes, au semblable métier, se saluèrent longuement car ils s'estimaient fort, à quoi s'ajoutait, les années passant, quelque chose qui ressemblait à de l'amitié.
    Dégustant un généreux plat de mouton au jus d'ail accompagné de salade et arrosé d'un vin clair de Provence, ils évoquèrent la guerre.
    Mortefontaine, qui servait un roi ne goûtant guère la critique, se montra prudent :
    — Ces guerres incessantes favorisent l'agitation et le crime. Ah, le sombre XVII e siècle que voilà !
    — « Le siècle de fer », comme certains l'appellent...
    Le Français avala une gorgée de vin puis, doucement :
    — Si nous en venions à notre affaire ?... J'ai lu avec intérêt mais surprise votre long document concernant le duc de Bamberg.
    — Tout de même, il ne vous est pas inconnu ?
    Ne quittant pas cette prudence qui amusait fort Pontecorvo, Mortefontaine répondit :
    — C'est un militaire, je suis un policier. Nos routes n'auraient jamais dû se croiser mais c'est un chef très avisé pour un homme de trente et un ans dirigeant une entreprise si redoutable que les Opérations Spéciales. Saviez-vous que lorsqu'il fait une de ses irruptions brutales dans une ville, où il ne se maintient jamais plus d'une heure, il envoie systématiquement quatre hommes piller les archives des hôtels de ville ?
    — Tiens, tiens, tiens... Intelligent, cela!
    — Et plus encore ! Il étudie les documents sous sa tente, fait parfois dresser copies pour lui-même puis m'envoie le tout. Parmi ces archives figurent souvent les listes d'espions agissant sur notre sol et qu'il m'est dès lors plus facile d'arrêter.
    Pontecorvo hocha la tête et se tut tandis que la jolie servante apportait les fromages. Il suivit longtemps d'un regard très intéressé et un brin mélancolique le généreux balancement des hanches de la jeune femme, ce qui n'échappa guère à la vigilance du Français, puis expliqua :
    — Et cependant, ce n'est pas pour cela qu'on lui cherche mauvais parti même si les Anglais, toujours malfaisants dès qu'il s'agit de la France, soufflent sur les braises.
    — M'en direz-vous davantage car je sais qui le menace mais vous avoue sans détours en ignorer la raison.
    — Mon ami, c'est assez... stupéfiant!
    Mortefontaine sourit, ce qui lui arrivait peu souventes fois :
    — Allons, ne différez point, je suis à votre merci et reconnais pleinement que l'Église possède le meilleur service de renseignements du monde.
    Pontecorvo fut flatté, le compliment venant de haut. Il reprit :
    — Nous avons placé un des nôtres chez ses ennemis.

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