Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Conseil des Troubles

Le Conseil des Troubles

Titel: Le Conseil des Troubles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
Vom Netzwerk:
ralentir son galop, le teutonique, d'un geste puissant et avec un « han ! » que lui arracha l'effort, ficha la lance en terre en direction du groupe.
    Tout allait très vite. On crut un instant que, profitant de la chute du jour, l'homme parviendrait à s'échapper mais Bamberg, d'un geste lent, leva son pistolet et tira : tué sur le coup, le cavalier vida les étriers.
    Tous furent stupéfaits, par ce tir infaillible en des conditions assez hasardeuses.
    — Il n'est peut-être que blessé ?... risqua un villageois.
    Bamberg passa l'arme à sa ceinture et répondit :
    — Il est mort.
    — Vous en êtes certain, monseigneur?
    — La balle est entrée par la nuque et est ressortie en emportant l'oeil droit.
    Il allait faire demi-tour lorsque, se ravisant, il s'adressa au plus âgé des villageois en regardant le cheval qui demeurait à proximité du cadavre du teutonique :
    — Vous disposez d'un cheval de plus. Je vous serais reconnaissant de bien vouloir enterrer cet homme... et ce qui reste de l'autre : ne cherchez pas le corps, je crois que nous ne le retrouverons jamais.
    Il s'approcha de la lance ouvragée de telle sorte que chaque extrémité s'achevait par une pique. Et si l'une se trouvait fichée en terre, l'autre était surmontée de la tête grimaçante d'Hugues de Pomarès.
    ***
    Une vague de froid intense approchait, dont on ressentait déjà les rudes effets.
    Bientôt, la neige tomba de nouveau, très drue, très compacte, et c'était certes un fort joli spectacle que les remparts crénelés baignés d'éclats de lune sous les millions de flocons duveteux qui faisaient songer à la fleur de mimosa. Cependant, Tancrède et ses compagnons ne s'en réjouissaient pas, sachant la longue route qui devait les mener de la province du Maine, puis à Paris, jusqu'à celle des Flandres où la guerre, et peut-être la mort, les attendait.
    Le duc de Bamberg avait salué Iseult, sur son arbre, où la vieille chouette gonflait ses plumes pour résister au froid. Ponctuel en ses devoirs, il avait aussi apporté une assiette de lait à Eugène et Louise, le couple de hérissons qui se couchait tôt et n'aimait point attendre : il savait qu'après son départ, Marie-Thérèse, la vieille servante, accomplirait cette tâche à sa place.
    Tancrède et ses amis, justement, avaient aidé la vieille femme dans la préparation du repas et c'était un vieux rituel de l'entendre protester :
    — Ah, tous ces officiers de dragons en ma cuisine, allons, c'est bien de l'embarras !
    Mais ses vieilles mains tremblant d'émotion, son sourire et le regard amusé disaient tout le contraire, par exemple qu'elle adorait « ses » trois beaux officiers, hommes à la voix grave et posée, au rire franc, qui occupaient sa cuisine comme ils le faisaient des places fortes des rois étrangers, avec une audace qui n'avait d'égale qu'une tranquille assurance.
    Les Bamberg des temps anciens n'avaient point fait d'économies sur les cheminées, il s'en trouvait partout et les toits en étaient hérissés.
    La vaste cuisine ne faisait point exception. Tancrède adorait y prendre ses repas avec pour ciel, suspendus aux poutres noircies, de rassurants jambons et saucissons.
    On fit asseoir Marie-Thérèse au motif - quel toupet ! - « qu'elle gênait les déplacements de la cavalerie ».
    Ravie, elle observa Hugo et Tancrède aux fourneaux tandis que Clément, ayant tisonné les bûches en la cheminée, s'activait à mettre la table sans manquer, comme bien souvent, de casser une assiette.
    Pour simple qu'il fût, le souper s'annonçait copieux : soupe au lard avec un soupçon d'huile de noix, tourte de froment, harengs saurs, viande froide, tarte aux pommes - un peu brûlée - et vin de Bordeaux. Avec du pain de seigle et de son. Un repas qui eût fait pousser des cris d'horreur à Versailles et de joie en le peuple de France...
    Marie-Thérèse adorait qu'on la gâte ainsi, que son petit Tancrède, qui n'en était pas moins duc, la servît en lui glissant par-derrière et par surprise un furtif baiser sur la joue. Elle aimait ces jeunes gens, leurs gestes, leur façon adroite de manier le couteau, leurs dents éclatantes, du moins pour Tancrède et Hugo.
    On parla du temps, non sans inquiétude. Tancrède, surtout :
    — Marie-Thérèse, dis à ceux du village qu'ils peuvent chasser un dimanche sur deux mais qu'ils prévoient des salaisons pour tenir au-delà du printemps.
    — À ce point, croyez-vous, Monseigneur?
    Bien qu'il le lui eût

Weitere Kostenlose Bücher