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Le Conseil des Troubles

Le Conseil des Troubles

Titel: Le Conseil des Troubles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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glace. L'année précédente, il fut dit que même à Versailles l'alcool gelait dans les bouteilles de verre alors qu'on avait pris soin de les poser sur les manteaux des cheminées mais rien n'y faisait : les bouteilles se brisaient. Beaucoup hésitaient à se rendre à l'église et les théâtres étaient loin de faire le plein. Fleuves et rivières gelaient ainsi que la mer en les ports et les petites criques où son mouvement est plus lent.
    Arbres fruitiers, vignes et graines ensemencées seraient détruits, comme l'année précédente, par ce froid polaire. Et tandis que le pays se trouverait paralysé, que le peuple mangerait du pain d'avoine si grossier et amer qu'il faut chaque fois une gorgée d'eau pour le faire passer, famines et disettes amèneraient fièvres thyphodes 1 et dysenteries.
    Tancrède songea qu'en la nature, les choses peuvent toujours surprendre en un sens inattendu mais depuis des jours soufflait obstinément un grand vent du nord extrêmement froid.
    Une heure avant d'arriver à Paris, la neige avait cessé mais le froid n'en demeurait pas moins extrêmement vif.
    À proximité des portes, les trois officiers arrêtèrent un vendeur de tisanes portant une fontaine de fer blanc sur le dos. Le liquide chaud leur parut un bienfait malgré l'arrière-goût un peu aigre car l'eau de la tisane, provenant de la Seine, avait comme souvent été purifiée au vinaigre blanc, ce qui ne fait point bonne réputation à l'eau de Paris.
    Ils se présentèrent à la porte Saint-Jacques et en retirèrent tous trois, au même instant, une fort mauvaise impression. Tout d'abord, un lieutenant des mousquetaires les observait avec insistance, ayant sur le visage cette expression qu'on voit à qui n'est pas tout à fait certain d'avoir trouvé les hommes qu'il cherche, et hésite à demander. Plus désagréables encore paraissaient les regards scrutateurs de deux hommes. Leur allure et cette manière d'observer de biais ou par en dessous portaient à croire qu'il s'agissait de vrais truands.
    Se sentant recherchés, et par deux groupes très différents, profitant du fait que les factionnaires, qu'on n'avait point fait entrer, semble-t-il, dans la confidence, leur laissaient libre passage, Hugo et Clément, sur un signe de Tancrède, enfoncèrent leurs talons dans les flancs de leurs montures qui prirent aussitôt le galop.
    *

    Quoique légèrement inquiets, les trois officiers de dragons pensaient avoir identifié ceux qui les attendaient ce qui, dissipant le mystère, lui ôtait son caractère angoissant.
    Le lieutenant de mousquetaires représentait l'armée et les trois amis de penser qu'en leur absence, la situation militaire avait dû se dégrader.
    Bamberg en fut étonné. Certes, ceux de la coalition de la Ligue d'Augsbourg étaient puissants, et contenaient les Français, mais ils souffraient de mal communiquer entre eux puisque les troupes de la Ligue venaient de l'Autriche, la Hollande, l'Espagne, l'Angleterre, la Suède auxquelles il fallait ajouter les troupes de l'Électeur de Bavière et celles des princes des maisons de Saxe, de Brandebourg et du prince de Savoie. Tout cela contre la France, la France seule.
    — La guerre, ne peuvent-ils pas la faire un instant sans nous ?... demanda Clément d'un ton un peu suffisant.
    Tancrède le ramena à davantage de modestie :
    — Je crois, et c'est plus simple, qu'ils ont besoin de chaque homme. Rappelle-toi en août l'attaque surprise de Guillaume d'Orange, comment nous l'avons contenue, contre-attaquée et battue à Steinkerque 2 . Orange est mesquin et rancunier, peut-être a-t-il tenté de se venger.
    Hugo haussa les épaules :
    — Les Hollandais sont les meilleurs commerçants du monde, Orange n'en fera jamais des soldats.
    Les trois dragons demeurèrent pensifs. Ils ne rechignaient point à retourner au combat, mais pas sans avoir acheté ce qu'ils avaient promis.
    Enfin, concernant les deux hommes aux regards fourbes et fuyants, qui tant évoquaient la truanderie, Bamberg, qui en avait vu quelques-uns sous la tunique des Teutoniques, ne doutait pas qu'ils fussent là à la demande de Von Ploetzen. La puissance du Grand Maître, qui avait dû placer de pareils hommes à toutes les portes de Paris, ne lassait pas de l'étonner très défavorablement.
    Après leur galop en la rue Saint-Jacques, et par le Petit Pont, ils étaient passés sur l'autre rive de la Seine, gagnant la rue Saint-Nicolas-des-Champs où ils s'arrêtèrent à La Belle

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