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Le Conseil des Troubles

Le Conseil des Troubles

Titel: Le Conseil des Troubles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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:
    — Quoi, monsieur, seriez-vous son père ?
    L'autre ferma un instant les paupières, jugeant ces paroles insultantes :
    — Je serai bientôt son mari : baron Baptiste de Tuboeuf.
    — Duc de Bamberg.
    La différence entre les titres paraissait écrasante, du moins pour Tuboeuf qui reprit d'une voix sifflante :
    — La marquise est mienne.
    Bamberg, ne connaissant rien de la vie de Lydie et subodorant de possibles promesses, se trouva embarrassé, ce qui le rendit maladroit :
    — Eh bien tant pis pour elle... Heu, non, je voulais plutôt dire que j'ignorais tout de votre existence.
    L'autre leva ses petits poings fermés vers le ciel :
    — Comment un duc de Bamberg connaîtrait-il un baron de Tuboeuf d'autant que baron, je ne le suis que depuis quatre ans.

    Bamberg, qui s'ennuyait et mourait de faim, se fit conciliant :
    — Il est un début à toute chose.
    — Il se moque ! répondit Tuboeuf en tentant de sortir son épée.
    Bamberg arrêta le geste en bloquant le bras avec fermeté :
    — Diable, monsieur, cette rapière n'a pas dû servir depuis Henri le Troisième, vous pourriez vous blesser.
    — Moquez-vous bien !... Il n'empêche, je ne suis pas duc, j'ai acheté mon titre par complaisance, je ne vis point en un vieux château du Maine mais moi, je possède neuf millions de livres, étant à la finance ce que vous êtes aux armées. Bien entendu, vous êtes jaloux.
    — Je n'entends rien aux affaires d'argent.
    — Vous êtes jaloux! Ils le sont tous, vous comme les autres.

    Jusqu'ici, Bamberg ne savait trop quel parti prendre, Lydie ne lui ayant rien dit quand pour sa part, son éducation et ses principes lui interdisaient de poser une question à ce sujet. Et peut-être en effet ce M. de Tuboeuf allait-il épouser la jeune femme; aussi s'il était prêt, dans l'ignorance où il se trouvait de la situation exacte, à se faire discret sur la marquise, il n'entendait pas se faire donner la leçon sur autre chose.
    Choisissant de parler lentement, il répondit :
    — Monsieur, l'honneur ne se mesure pas, chez nous, au nombre de sacs d'or qu'on dissimule derrière ses fagots ou en un trou de la cheminée. Quant à la marquise d'Ey, serait-elle demain votre épouse, elle n'a pas jugé utile de me révéler votre existence. Ainsi, tout est dit et brisons là.
    Le baron de Tuboeuf lui barra le passage, faisant obstacle avec son corps fluet :
    — Elle s'est fait foutre par vous! Et toute la nuit! Et mille autres choses... abominables!
    — Vous les eût-elle faites à vous, ces choses, que votre jugement, j'en jugerais, se trouverait tout soudainement fort atténué. Allons, il suffit, laissez-moi passer.
    Loin de céder, le baron de Tuboeuf sortit pour la seconde fois - assez laborieusement - son épée.
    Bamberg pencha la tête d'un air critique :
    — Plus souple, le jarret. Et le bras, demi-replié. Ah, vous n'y entendez rien!
    Ne modifiant en rien sa position, Tuboeuf répondit :
    — Un officier des gardes-françaises m'enseigne l'épée, je n'ai que faire de vos conseils.
    — Vous perdez la tête.
    — Bats-toi, lâche!
    Bamberg soupira, sortit son sabre de son fourreau et, d'un coup si rapide que Tuboeuf ne le vit pas, le duc brisa l'épée de son adversaire qui, après un instant de stupeur, en jeta les débris sur le sol d'un geste rageur, mais sans livrer le passage.
    La voix de Bamberg se durcit :
    — Cessez vos agacements, baron, laissez-moi le passage. Et épousez Mme d'Ey. Ainsi, elle sera tenue par son devoir quand les gentilshommes passeront au large.
    — Mariée, pourtant, tu ne l'eus pas davantage respectée.
    La grande patience de Bamberg arrivait à son terme :
    — Monsieur le Tueur de Boeufs, vos coutumes ne sont point les miennes et la trouvant votre épouse, je n'eusse point approché Lydie.
    Tuboeuf sentit que Bamberg disait vrai mais cela ne fit qu'attiser sa colère car toujours la ravissante marquise différait ce mariage.
    Dans une bouffée de haine, il jeta :
    — Toi, je te ferai tuer!
    Cette fois, Bamberg l'écarta d'une violente poussée et, haussant les épaules sans même se retourner :
    — Les Anglais, les Autrichiens, les Hollandais, les Suédois et d'autres encore me veulent faire mourir : attendez votre tour.
    Il s'éloigna, insouciant.
    Il eut tort. Tuboeuf avait largement les moyens de s'offrir le plus redoutable, le plus méthodique, le plus insaisissable des tueurs. Un homme qui, en dix années d'exercice, n'avait jamais manqué sa cible.
    Et n'entendait point

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