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Le Conseil des Troubles

Le Conseil des Troubles

Titel: Le Conseil des Troubles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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qui paraissait l'attendre. En quelques secondes cependant, la surprise fit place à un profond désagrément qu'elle ne tenta pas de dissimuler et tout au contraire, en accentua l'expression :
    — Vous?
    — Moi!... Moi que tant vous désolez par la légèreté de votre vertu. Ah, madame, concernant vos vices, on m'en avait beaucoup dit et j'en trouve bien davantage encore.
    Elle sourit :
    — Et peut-être n'avez-vous pas tout vu, ni tout su...
    — Il ne m'est point difficile de me l'imaginer. Ah vous, vous, et avec cet homme, toute la nuit...
    Il entra et jeta un regard vers le lit défait. Elle referma la porte :
    — Eh bien oui, je me suis faite foutre par le duc de Bamberg et le souvenir, à jamais, m'en restera des plus doux.
    Atterré, Tuboeuf ne put s'empêcher de constater que la marquise d'Ey était plus belle encore que d'habitude avec ses joues rouges, ses cheveux défaits, ses paupières un peu gonflées et cet air où la fatigue se mêlait à une satisfaction qui le blessa.
    — Voulez-vous me tuer, Lydie?... Ah, c'est trop de souffrances, à la fin !
    Elle le toisa sans bonté :
    — Cessez ces mômeries et quittez ce ton de lendore : je vous supporte déjà avec difficulté, n'ajoutez rien à mon dégoût.
    — Lydie, si vous ne m'aimez, songez à ces neuf millions de livres qui seront vôtres dès que vous porterez mon nom.
    Elle avait beau connaître ce chiffre par coeur, la marquise d'Ey succombait toujours à l'évocation de pareille fortune.
    Elle se fit boudeuse telle une petite fille :
    — Je ne sais si je dois vous pardonner !...
    C'était bien du toupet d'inverser ainsi les rôles avec pareille mauvaise foi mais le baron de Tuboeuf se trouvait en un tel aveuglement amoureux qu'il ne releva pas.
    Il saisit la main de la jeune femme et la couvrit de baisers, puis :
    — Ah, pourrais-je vous foutre, moi aussi ?... Ce ne serait qu'une fois de plus.
    Elle retira sa main où se voyait un peu de bave et, masquant mal son dégoût :
    — C'est que j'ai grand faim...
    — Lydie, je ferai vite.
    Sans pitié, elle répondit :
    — Il est vrai que vous ne faites qu'entrer pour aussitôt sortir. Conservez cette habitude, je n'aime pas vous sentir en moi.
    Les yeux globuleux du baron s'allumèrent d'un éclat nouveau :

    — C'est donc que vous acceptez ?
    Elle prit sur elle, sans parvenir vraiment à se monter aimable :
    — Puisque vous m'aimez, il faut bien vous satisfaire, mon coeur n'est pas de pierre.
    — Oh, Lydie, quel bonheur !
    — Alors faites vite, mon ami, ayez le bonheur furtif! Et, en disant ces paroles, ses yeux avaient la dureté de ceux des putains qu'on voit près du pont-Neuf.
    ***
    Bamberg s'était rendu aux écuries à pas de loup et, comme à son habitude, arrivant par-derrière, il surprit la sentinelle pourtant sur ses gardes en lui posant une lame de poignard sur la gorge :
    — Je serais anglais, tu serais mort!... dit-il en libérant l'homme.
    C'était un jeune dragon aux yeux rieurs, dont les fossettes accentuaient le côté enfantin. Il répondit :
    — Mais vous n'êtes pas anglais, étant notre général. Bamberg, amusé, hocha la tête :
    — Et tu as confiance en moi ?
    — Plus qu'en Dieu !
    — Il ne faut pas. Nous sommes en guerre, garde ta confiance pour des jours meilleurs. Si tu fais confiance à ta main droite, elle t'étranglera pendant ton sommeil.
    Laissant le jeune soldat perplexe, il progressa plus avant dans l'écurie où l'on avait dressé de grandes tables encore couvertes de victuailles.
    Worden s'approcha :
    — Ah, elle t'a tout de même libéré.
    — Je vois que les nouvelles vont vite...
    — Il faut dire qu'ayant choisi la plus belle femme de la Cour, la nouvelle de ton exploit doit déjà être connue à Paris.
    Une ombre fugitive passa sur le visage du duc :
    — L'exploit est terni par cela que le roi l'a choisie pour moi, j'en jurerais.
    Pris de court, Worden répondit :
    — C'est un bien beau cadeau...
    — À l'arrière-goût de poison, je t'expliquerai.
    Ils se regardèrent un instant puis Bamberg ajouta :
    — J'ai faim.
    — La chose semble naturelle. Ah, le roi ne s'est pas moqué de nous, la plupart de nos dragons n'avaient jamais aussi bien mangé de toute leur vie. De Mangeot, qui ne s'est jamais fait surprendre par l'ennemi, l'a été par le vin de Champagne : il est là-bas, vautré dans la paille et complètement ivre. Je t'ai gardé trois cuisses de poulet, une anguille en gelée et un gâteau aux amandes.
    — C'est bien plus

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