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Le cri de l'oie blanche

Le cri de l'oie blanche

Titel: Le cri de l'oie blanche Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
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son nom pour le faire sien. Elle ne reçut pas de réponse.
Blessée, elle acheva de rédiger son rapport annuel et espéra qu’il lui ferait
la surprise de venir.
    Le 21 décembre, elle s’apprêtait à se coucher
lorsqu’elle entendit des pas ébranler la galerie. Elle descendit l’escalier à
la hâte, espérant voir apparaître Clovis mais prête à quitter le dispensaire
pour une urgence. Elle ouvrit la porte et poussa un cri.
    – Au secours, au secours, garde
Pronovost ! Mon cœur ! Mon cœur ! Haaaa ! Mon cœur.
    – Moman !
    Blanche éclata de rire et se précipita dans
les bras de sa mère.
    – C’est trop ennuyant de passer sa fête
toute seule. Ça fait qu’hier, en voyant le beau ciel, j’ai décidé de me
dépêcher pis de prendre le train. Sans dire que dans le ciel j’ai vu les oies
blanches qui descendaient du Nord. J’ai pensé que c’était le temps que moi j’y
monte. Jeanne est pas ici ?
    – Non. À La Sarre.
    – Hum !
    Blanche regardait sa mère rouler la pâte à
beignes, brasser le ragoût, laisser monter la pâte à pain, tout près du poêle,
abaisser sa croûte pour faire des tourtières, et elle aurait voulu lui crier de
cesser de s’activer et de s’asseoir deux minutes pour qu’elle puisse lui
parler. Mais, au lieu de cela, elle tamisait la farine pour les beignes,
grillait celle du ragoût, cherchait le soda à pâte en se demandant où Jeanne
l’avait placé, vérifiait si la levure avait assez chauffé et ne cessait de
remercier sa mère d’être venue lui tenir compagnie. Sa mère lui souriait pour
montrer le plaisir qu’elle avait à être avec elle et retroussait cette mèche
qui lui tombait sur le front, se blanchissant la figure de farine et riant en
disant qu’un peu plus velue elle aurait fait un charmant Santa Claus.
    Blanche quittait la cuisine, se hâtant
d’enlever son tablier, dès que des patients entraient, et sa mère la regardait
faire, visiblement fière d’elle, résistant mal à l’envie de se trouver un
prétexte pour aller écouter les commentaires des gens qui étaient dans la salle
d’attente.
    Jeanne était revenue et, malgré sa joie et son
étonnement de voir sa mère, elle avait annoncé qu’elle serait absente le jour
de Noël. Blanche avait regardé sa mère en haussant les épaules. Cette
« fugue » était prévisible.
    Émilie et Blanche réveillonnèrent en
tête-à-tête au retour de la messe de minuit. Elles avaient marché, le sol
n’étant toujours pas blanchi.
    – Voulez-vous d’autres betteraves,
moman ?
    – Non, merci. J’aimerais mieux me sucrer
le bec.
    – Du sucre à la crème, d’abord ?
    – Non. J’ai fait la promesse de plus
jamais manger de sucre à la crème.
    Blanche sourcilla mais préféra ne pas en
demander la raison. Connaissant bien sa mère, elle savait qu’elle n’aurait pas
de réponse.
    – Pis, Blanche ? Est-ce que tu vas
être ici encore longtemps ?
    – À Villebois ?
    – D’où c’est que tu veux que je
parle ?
    – Je pense que oui.
    – Même si Jeanne se marie au
printemps ?
    – Jeanne se marie au printemps ?
    Émilie éclata de rire.
    – Blanche, je te comprendrai jamais.
C’est toi qui restes avec elle, pas moi. Il me semble que tu devrais savoir ça.
À moins que Jeanne ait pas voulu te compliquer la vie pis qu’elle t’en ait pas
parlé.
    Blanche grimaça. Jeanne avait fait quelques
allusions mais elle avait pensé que c’étaient des rêves ou des souhaits et non
des réalités. Blanche savait aussi qu’elle n’avait pas vraiment voulu entendre,
le son d’une cloche, même anticipé, lui résonnant douloureusement dans le cœur.
    – Est-ce que tu vas te laisser pousser
les cheveux pis recommencer à les friser ?
    Elle n’avait pas entendu la question de sa
mère et la lui fit répéter. Elle était presque sûre que sa mère désapprouvait
sa tenue de travail, pas assez féminine.
    – Non. C’est plus pratique comme ça.
    Sa mère se leva et monta à sa chambre. Elle en
redescendit avec trois boîtes bien emballées.
    – Tiens. Joyeux Noël, ma fille !
    Blanche défit le ruban de la plus grosse et le
plia. Émilie sourit, reconnaissant là une de ses vieilles manies. Blanche
enleva ensuite le papier et le posa sur la table, sans le froisser. Elle ouvrit
enfin la boîte et sourit.
    – Hein ? Moman ! Vous auriez
pas dû. Une belle jupe comme ça dans un tweed anglais !
    – Regarde comme il faut, Blanche.
    Blanche prit le

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