Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Crime De Paragon Walk

Le Crime De Paragon Walk

Titel: Le Crime De Paragon Walk Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Perry
Vom Netzwerk:
avoir fait ça.
    Je l’ai caché, oui. J’étais terrorisé. Je ne l’ai pas tué,
mais je savais qu’on allait m’accuser. Je l’ai fourré dans la cheminée. Le
conduit est large, et je suis beaucoup plus grand que Fulbert. Bien que poids
mort, il s’est révélé étonnamment léger quand je l’ai soulevé. Il n’a pas été
commode de l’enfourner là-dedans, mais comme il y a des niches pour les
ramoneurs, j’y suis enfin arrivé. Je l’ai enfoncé. Je croyais que si je fermais
cette pièce, il pourrait y rester indéfiniment. Je n’avais pas songé au
nettoyage de printemps, ni au fait que Mrs. Heath avait un passe-partout.
    Peut-être que je suis fou. Peut-être que je les ai tués
tous les deux, mais les ténèbres ou le mal qui me brouillent le cerveau m’empêchent
de le savoir. Il y a deux êtres en moi : l’un tourmenté, solitaire, plein
de regrets, ne connaissant pas l’autre moitié et hanté par cet autre
cauchemardesque Dieu… ou plutôt le diable sait quoi. Un sauvage, un dément, tuant
sans discernement.
    La mort est la meilleure solution pour moi. La vie n’est
rien que l’oubli dans la boisson des horreurs de cet autre moi-même.
    Je suis navré pour Fanny, sincèrement navré. Ça, je sais
que c’est moi.
    Mais si je l’ai tuée, ou si j’ai tué Fulbert, c’était mon
autre moitié, quelqu’un que je ne connais pas. Au moins, il mourra avec moi.
     
    Pitt reposa la lettre. Il avait l’habitude de ces accès de
pitié, de cette douleur sourde et profonde contre laquelle il n’existait pas de
remède.
    Il ressortit sur le palier. La police était déjà à la porte
d’entrée. Il y aurait maintenant le long rituel de l’examen médical, de la
fouille parmi ses effets personnels, de la consignation des aveux. Mais il n’avait
pas l’impression d’avoir accompli quelque chose.
     
    Ce soir-là, en rentrant, il en parla à Charlotte, non pour
soulager sa conscience, mais parce que cela concernait Emily.
    Pendant quelques instants, elle garda le silence, puis elle
s’assit très lentement.
    — Pauvre homme, souffla-t-elle. Pauvre âme égarée !
    Il s’assit en face d’elle et, en la regardant, s’efforça de
chasser Hallam et tout ce qui touchait à Paragon Walk de son esprit. Longtemps,
ils restèrent ainsi sans mot dire, et il se sentit mieux. Il se prit à penser à
ce qu’ils pourraient faire, maintenant que l’enquête était terminée et qu’il
allait s’offrir un moment de répit. Jemima était assez grande pour ne pas s’enrhumer :
ils pourraient faire une excursion en bateau, voire même pique-niquer sur la
berge, si le temps le permettait. Voilà qui devrait plaire à Charlotte. Il l’imaginait
déjà, les jupes étalées dans l’herbe, la chevelure brillant comme une châtaigne
polie au soleil.
    L’année prochaine, s’ils faisaient attention au moindre
penny, ils pourraient même partir quelques jours à la campagne. Jemima serait
alors en âge de marcher. Elle découvrirait toutes les merveilles – petites
mares d’eau dans les pierres, fleurs sous les haies, nids d’oiseaux – que
lui-même avait connues dans son enfance.
    — Croyez-vous que c’est la mort de sa femme qui l’a
conduit à la folie ?
    La voix de Charlotte le tira de sa rêverie, le ramenant brutalement
à la réalité.
    — Comment ?
    — La mort de sa femme, répéta-t-elle. Croyez-vous que, rongé
par le chagrin et la solitude, il s’est mis à boire jusqu’à en devenir fou ?
    — Je ne sais pas.
    Il n’avait pas envie d’y penser.
    — Peut-être. Il y avait de vieilles lettres d’amour
parmi ses affaires. Apparemment, elles ont été lues et relues : pages écornées,
une ou deux déchirures. Elles sont d’un caractère très intime, très possessif.
    — Je me demande comment elle était. Elle est morte
avant qu’Emily ne s’installe là-bas ; elle ne la connaissait donc pas. Comment
s’appelait-elle ?
    — Aucune idée. Elle n’a pas pris la peine de signer ses
lettres. Elle devait les laisser à son intention un peu partout dans la maison.
    Charlotte eut un petit sourire triste et crispé.
    — C’est horrible, d’aimer quelqu’un aussi intensément, puis
de le perdre. Sa vie a dû être brisée ce jour-là. J’espère, si je meurs, que
vous garderez un souvenir de moi, mais pas de cette façon-là…
    Cette idée, terrifiante, plongea la pièce dans une nuit noire,
vide et immense, infinie, glacée comme la distance jusqu’aux

Weitere Kostenlose Bücher