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Le Dernier Caton

Le Dernier Caton

Titel: Le Dernier Caton Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Matilde Asensi
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descendant l’escalier, je posai le pied dans une flaque.
    — Celui qui prévient n’est pas un traître, se moqua Farag.
    L’avant-salle de cet étage était plus grande que les précédentes aux étages supérieurs ; l’eau nous arrivait à la taille. Je commençais à penser que nous aurions dû écouter Farag.
    — Vous savez ce que cela me rappelle ? dis-je sur le ton de la plaisanterie.
    — La même chose que moi, j’en suis sûr, me répondit Farag. C’est comme si nous étions retournés dans la citerne de Constantinople.
    — Non, ce n’est pas ça. Je me disais que cette fois nous n’avons pas lu le texte du sixième cercle de Dante.
    — Vous, peut-être pas, répliqua sèchement Glauser-Röist. Mais moi, si.
    Farag et moi nous regardâmes d’un air coupable.
    — Alors, racontez-nous, Kaspar, pour que nous sachions où nous allons.
    — L’épreuve est plus simple que les autres, commença-t-il à nous expliquer tandis que nous avancions.
    On sentait une odeur forte de décomposition et l’eau était trouble, mais heureusement sa couleur était due au calcaire seulement, et non à la sueur de centaines de pieds de fidèles.
    — Dante profite de la forme conique de la montagne du Purgatoire pour réduire les dimensions des corniches et la magnitude des châtiments.
    — Que Dieu vous entende ! m’exclamai-je, pleine d’espoir.
    Les reliefs de ce troisième niveau étaient aussi originaux que les précédents. Les Alexandrins de l’Âge d’or ne connaissaient pas de problèmes d’intolérance religieuse ou d’intégrisme : cela leur était égal de laisser leurs restes dans des catacombes placées sous le signe d’Osiris mais décorées avec des reliefs représentant Dionysos. Cet éclectisme bien compris fut la base de leur société prospère. Tout cela prit malheureusement fin avec le christianisme primitif, un culte qui repoussa violemment les autres et se transforma en religion officielle de l’Empire byzantin.
    — Le sixième cercle se déroule sur trois chants, poursuivit le capitaine. Les âmes des gourmands tournent indéfiniment le long de la corniche qui comporte, placés chacun à une extrémité opposée, deux arbres dont les sommets ont une forme de cône inversé.
    — Cela ressemble beaucoup au papyrus égyptien, fit remarquer Farag.
    — En effet, professeur. Ce pourrait être une allusion voilée à Alexandrie. Des cimes pendent des fruits abondants et appétissants qui ne peuvent être atteints par les pénitents. Une liqueur exquise qu’ils ne peuvent boire se déverse sur eux, de sorte qu’ils tournent autour de la corniche les yeux cernés et le visage hâve, torturés par la faim et la soif.
    — Dante retrouve, comme d’habitude, une foule de vieux amis et connaissances, n’est-ce pas ? demandai-je alors que je distinguais le dessin du caducée au fond d’une salle. Venez par là, je crois avoir vu quelque chose.
    — Mais comment terminent-ils l’épreuve ? insista Farag.
    — Un ange rouge brillant leur indique comment monter à la septième et dernière corniche, et efface du front de Dante le péché de gourmandise.
    — C’est tout ? demandai-je en me débattant contre l’eau pour avancer plus vite vers le mur où l’on distinguait clairement maintenant le symbole du dieu Hermès.
    — C’est tout. Plus on progresse, plus les choses deviennent simples.
    — Vous ne savez pas ce que je donnerais, capitaine, pour que vous ayez raison.
    — La même chose que moi, je suppose.
    — Le kerykeion  ! s’exclama Farag en posant ses mains dessus comme un dévot sur le Mur des Lamentations. Je jurerais pourtant qu’il n’était pas là il y a deux ans…
    — Allons, allons, professeur, le gronda le capitaine. Ne soyez pas si orgueilleux, reconnaissez que vous avez pu l’oublier.
    — Mais non, Kaspar, il y a trop de salles pour se souvenir de toutes, je suis d’accord, mais un symbole pareil aurait attiré mon attention, je vous assure.
    — Ils l’ont mis pour nous, ironisai-je.
    — Cela ne vous paraît pas curieux que la Méduse, le serpent et le thyrse se trouvent au deuxième étage et le caducée au troisième, à distance ?
    Le capitaine et moi demeurâmes songeurs.
    — Un instant… Tiens ! J’en étais sûr ! s’exclama Farag en montrant ses paumes recouvertes de boue.
    — Le mur se défait, constata Glauser-Röist, perplexe, en introduisant sa main et en sortant une poignée de boue

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