Le Dernier mot d'un roi
fils, Charles VIII. » Louis ferme les yeux pour ne plus le voir et se confie à Notre-Dame-d’Embrun : « Ma bonne maîtresse, au nom du Christ, aidez-moi ! » Autour du lit, on entend sa prière et chacun s’en félicite : « Le roi meurt en chrétien, grâce à Dieu. » Dans la tête du moribond l’eau se retire en même temps que le délire. Il retrouve en santé d’esprit le spectacle bien réel des êtres qui l’environnent dans la chambre, qui le regardent et qui attendent patiemment sa mort. Il les reconnaît tous : Anne et son front blanc, Pierre revenu d’Amboise, Commynes et son intelligence, ses calculs, Coitier et sa franchise épaisse, Parent et son nez de secrétaire, affûté comme une plume. Il est si content d’avoir recouvré le bon sens que son cœur s’arrête… puis repart en douceur comme en boitant et seulement pour lui faire plaisir, Louis l’encourage à battre encore un peu, car il a « des choses » à dire à sa fille, à son gendre, à Commynes : leur recommander de veiller sur Charles lors de la cérémonie du sacre en la cathédrale de Reims. Il veut surtout leur révéler ce qu’il vient de découvrir au fond de l’eau et que tout le monde sait : dans la vie d’un roi, il n’y a pas de fin. Il parvient à ajouter dans un souffle et de tout son cœur : « Je continue. »
Personne n’a entendu ce dernier mot. On remarque à l’instant que le roi ne respire plus et Sauveterre tombe à genoux pour lui fermer les yeux.
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