Le dernier vol du faucon
sûr en siamois afin que je vous comprenne - que tout va bien, que vous avez des choses importantes à discuter avec moi et que nous allons voir le roi ensemble. Qu'ils ne vous attendent pas et regagnent la maison. S'ils ne disparaissent pas ou si vous faites une fausse manœuvre, vous serez tué immédiatement. Deux de mes hommes vont se tenir derrière vous. Ils savent manier le poignard. »
Phaulkon ne répondit pas. Petraja ordonna à son porteur d'épée et à l'un des gardes de l'attendre en bas. Puis il donna aux deux autres des instructions strictes : dissimuler leurs poignards et marcher juste derrière eux comme des esclaves.
Petraja prit alors Phaulkon par le bras et gravit avec lui les dernières marches. Le rempart était assez large pour que deux hommes puissent y cheminer de front. Le général se mit à avancer au côté de Phaulkon, l'entretenant à haute et paisible voix de la santé du roi tandis que, dans un murmure, il ne manquait pas de lui rappeler fréquemment qu'il n'hésiterait pas à l'abattre sur-le-champ.
Accablé, Phaulkon envisagea de sauter mais le mur était bien trop haut et il risquait de se briser les os. Il aperçut ses gardes aller et venir le long de la muraille. Ils ne l'avaient pas encore repéré et discutaient entre eux nerveusement. Lorsqu'ils le virent enfin, leur maître avait les yeux fixés plus loin, vers le fleuve. Un groupe important de farangs avait fait son apparition, marchant à grands pas et armés jusqu'aux dents. Phaulkon eut un mouvement de joie. Joao Pareira et ses mercenaires !
Petraja se tourna vers lui d'un air interrogateur et, devant son sourire énigmatique, fit signe à ses gardes de se rapprocher. Phaulkon sentit la pointe de leurs lames contre son dos. Sur un seul mot du général, il serait transpercé de part en part.
«Qui sont ces farangs? demanda Petraja à voix basse.
- Mes hommes, répondit Phaulkon avec assurance. Tous des combattants d'élite. Je vais devoir les rassurer car s'il m arrivait quelque chose... »
Il laissa exprès la phrase en suspens pour donner le temps à Petraja de mesurer la menace implicite. Ce dernier parut un court instant déconcerté et ses yeux lancèrent des éclairs furieux.
« Vous allez leur dire la même chose qu'à vos gardes, Vichaiyen. Sinon, vous mourrez. »
Phaulkon le regarda avec un sourire affecté. « Ils ne comprennent pas le siamois, Général. Quel ennui pour vous, n'est-ce pas ? »
Les Portugais avaient maintenant rejoint les gardes du corps du Barcalon et discutaient avec eux. Le groupe n'était pas au complet - un peu plus de la moitié des trente-cinq hommes que Phaulkon avait recrutés, les seuls que Joao ait eu le temps de rassembler. Phaulkon fut soulagé de constater que Mark n'était pas parmi eux. Manifestement, il avait obéi à ses ordres et regagné la maison.
Ils aperçurent Phaulkon et poussèrent un cri. Tous regardaient maintenant dans sa direction en abritant leurs yeux du soleil. Petraja continuait à parler comme si de rien n'était, mais les robustes mercenaires observaient la scène d'un air soupçonneux. Ils étaient impressionnants avec leurs visages rudes et menaçants, les uns portant la barbe, d'autres non, certains vêtus à l'occidentale, d'autres à la siamoise. Tous n'attendaient qu'un mot de Phaulkon pour passer à l'attaque. Poignards, mousquets et sabres étin-celaient au soleil.
«Parlez-leur!» ordonna Petraja d'un ton pressant.
Mais ce fut Joao Pareira qui les devança.
«Est-ce que tout va bien, mon Seigneur?» cria-t-il en portugais - une langue que Petraja ne comprenait pas.
«J'ai un poignard dans le dos, répondit Phaulkon d'un ton aussi uni que possible. Et la porte est fermée.» Joao Pareira tressaillit mais comprit rapidement le jeu de Phaulkon. Du même ton calme, il répondit: «Nous allons escalader les murs dès que Vasco le singe arrivera avec les autres. Je les ai avertis. Ne vous inquiétez pas, mon Seigneur.
- Je ne m'inquiète pas, mais dépêchez-vous. Il semble que cette vermine ait besoin que je reste en vie. Ce qui signifie que le roi n'est pas mort.»
Petraja serra le bras de Phaulkon.
« Renvoyez-les sinon vous mourrez !
- Mon compagnon devient nerveux, lança Phaulkon à Joao. Eloignez-vous et emmenez mes gardes avec vous. Faites savoir au général Desfarges que trois de ses officiers sont retenus prisonniers ici.»
Phaulkon sentit une brusque douleur dans son dos. L'un des poignards venait de lui trouer la
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