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Le Druidisme

Le Druidisme

Titel: Le Druidisme Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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manque
pas d’anecdotes, dans les récits irlandais, à propos de druides (ou de fili ) obligeant leurs disciples à des aberrations,
où les soumettant à des pièges, ou en les lançant sur une fausse piste. On ne
peut que penser au Merlin des romans arthuriens, qui, chaque fois qu’on lui
pose une question, se met à rire, ou répond à côté. La même remarque peut être
faite à propos de Perceval (ou Peredur, ou Parzival) : il commence par
suivre aveuglément, et la lettre, les conseils de sa mère, sans les avoir
véritablement compris, et cela ne lui réussit guère. Il en est de même, dans le
texte de Wolfram von Eschenbach, quand l’ermite Trévrizent raconte faussement l’histoire du saint Graal à Parzival. La
plupart des récits celtiques sont par nature ambigus, ce qui ne facilite guère
leur traduction et leur interprétation. Mais on pourrait en dire autant de
certains textes de l'Edda scandinave et des
textes sacrés de l’Inde védique. Après cela, on ne pourra guère s’étonner en
lisant les traités d’Alchimie du Moyen Âge.
    L’exemple irlandais ou gallois, que nous connaissons grâce à
la transcription tardive des moines chrétiens, ne doit cependant pas être
considéré comme représentant uniquement la tradition celtique insulaire. Il
peut être projeté sans risque d’erreur sur la Gaule continentale. César est
formel quand il parle d’une tradition transmise oralement par les druides, au
moyen de vers. Et quand Tite-Live, qui était d’ailleurs un Gaulois de la
Cisalpine, se mêle d’écrire l’histoire de la fondation de Rome, non seulement
il utilise copieusement les légendes romaines, mais se sert sans vergogne de
récits épiques gaulois qui devaient encore être connus à son époque, et qui
sont parfaitement repérables à l’analyse [37] . Il
n’est d’ailleurs pas le seul auteur de l’antiquité classique à avoir puisé dans
des sources celtiques. On en trouve des échos chez Aristote [38] .
Mais, en règle générale, les Grecs et les Latins se sont contentés de rapports
fragmentaires, car ils ont, semble-t-il, éprouvé de grandes difficultés à
comprendre exactement la signification de ces légendes, encore une fois à cause
d’une mentalité logique totalement différente, et de l’absence de dichotomie,
chez les Celtes, entre le mythe et l’histoire [39] .
    Pourtant, les Grecs et les Latins qui avaient fréquenté les
Gaulois, qui avaient écouté leurs druides et les jugeaient comme des hommes
d’un esprit remarquable et d’une grande élévation de pensée, n’étaient pas sans
savoir que ces gens-là ne parlaient pas exactement comme eux. C’est Diodore de
Sicile qui l’affirme : « Ils parlent peu dans leurs conversations, s’expriment par énigmes et affectent dans leur
langage de laisser deviner la plupart des choses. Ils
emploient beaucoup l’hyperbole, soit pour se vanter eux-mêmes, soit pour
ravaler les autres. Dans leurs discours, ils sont menaçants, hautains et portés
au tragique. Ils sont cependant intelligents et capables de s’instruire »
(Diodore, V, 31). Ce témoignage est capital, car il affirme que, chez les
Gaulois, on connaissait des récits oraux héroïques dont le sens, par suite de
l’accumulation des énigmes et des hyperboles , était parfois difficile à saisir. Et
cela confirme les caractéristiques de l’épopée irlandaise ou galloise,
elle-même, semble-t-il, coulée dans le même moule que l’épopée gauloise dont
nous ne connaissons rien, sinon quelques fragments récupérés par les auteurs de
l’antiquité classique.
    Les druides sont donc les dépositaires d’une Tradition complexe,
englobant tous les domaines de l’esprit, et dont ils sont en définitive les
seuls à pouvoir interpréter valablement le sens profond. Conseiller du roi, le
druide sera donc aussi le conseiller du peuple dans son ensemble : d’où la
fonction juridique inhérente à la classe sacerdotale, même si l’exécution des
jugements engage la responsabilité du roi, le bras séculier, comme on disait au
Moyen Âge. « Ce sont en effet les druides qui jugent les différends,
publics ou privés, et si un crime a été commis, s’il y a eu meurtre, s’il
s’élève une contestation à propos d’un héritage ou de limites, ce sont eux qui
décident et évaluent les dommages et les sanctions » (César, VI, 13). La
fonction juridique des druides est universelle : dans cette société
celtique où la distinction

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