Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Druidisme

Le Druidisme

Titel: Le Druidisme Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
Vom Netzwerk:
gens
désireux d’acquérir une culture ou voulant devenir bardes ou druides. En tout
cas, l’existence d’écoles druidiques est prouvée.
    Encore une fois, le texte de base est dû à César :
« Beaucoup viennent, de leur propre chef, se confier à leur enseignement,
mais beaucoup y sont envoyés par leurs parents et leurs proches ; on dit
qu’ils apprennent là par cœur un très grand nombre de vers ; certains restent
donc vingt ans à leur école » (César, VI, 13). Un autre texte fondamental
est celui de Pomponius Méla (premier siècle de notre ère) : « Ils
ont… des maîtres de sagesse qu’on appelle druides… Ils enseignent beaucoup de
choses aux nobles de la Gaule, en cachette, pendant vingt ans, soit dans des
cavernes, soit dans des bois retirés » ( De Choregraphia ,
III, 2, 18). La durée des études, pendant vingt ans, paraît confirmée. Les
« cavernes » et les « bois retirés » dont parle Méla, qui
écrit un siècle après la conquête de la Gaule, sont peut-être une allusion à la
clandestinité dans laquelle se sont réfugiés les druides, mais il faut
remarquer que les sanctuaires druidiques, et donc leurs écoles, se trouvaient
nettement à l’écart de la vie active, et au milieu des forêts. Quant à
l’enseignement dispensé qui consiste en un grand nombre de vers, il apparaît
parfaitement prouvé par la structure interne des récits irlandais et, dans une
moindre mesure, de certains récits gallois : ceux-ci, surtout les plus
anciens, sont truffés de strophes en vers, alors que la narration est en prose,
et ces strophes, souvent d’un langage archaïque et d’une compréhension
difficile, semblent bien avoir été la charpente mnémotechnique autour de
laquelle le conteur a bâti son récit. Cela suppose donc que les druides
enseignaient leur doctrine sous une forme versifiée et vraisemblablement
épique, mais que le langage qu’ils employaient n’était pas accessible à tout le
monde. L’une des versions de la Tain Bô Cualngé est révélatrice : « Cathbad le druide dispensait l’enseignement à ses
élèves, au nord-est d’Émain, et huit de ceux-ci étaient capables de science druidique » [34] . C’est
dire qu’il y avait peut-être beaucoup d’appelés, mais peu d’élus. Une autre
version de la même épopée nous présente le même Cathbad dans son école :
« Cent hommes étourdis se trouvaient chez lui, apprenant le
druidisme » [35] . On
serait tenté de considérer l’enseignement druidique comme particulièrement
difficile, pour ne pas dire « ésotérique », donc réservé à ceux qui,
ayant une certaine forme d’esprit, ou ayant été « initiés »,
pouvaient le comprendre, et ensuite le répandre à leur tour. Cela donnerait
raison à César qui prétend que les druides interdisent l’usage de l’écriture
« parce qu’ils ne veulent pas répandre leur doctrine dans le peuple » [36] .
    C’est la plupart du temps sous forme de récits où tout est
sciemment mêlé, histoire, théologie, philosophie, mythologie, droit, coutume,
vaticination, que se présentait la tradition druidique. La grammaire, la
géographie, l’étymologie surtout, n’étaient pas absentes, mais ce qui frappe le
plus dans cette tradition – que nous connaissons essentiellement par les manuscrits
irlandais, et dans une moindre mesure par les manuscrits gallois –, c’est le
refus de dissocier le mythe et l’histoire. Contrairement aux Romains, les
Celtes ont pensé mythiquement leur histoire, et bien entendu, ils ont parfois
historicisé leurs mythes : d’où l’ambivalence des récits celtiques,
notamment des irlandais, les fameux scela , qui
sont à la fois des épopées héroïques, des chroniques vaguement historiques et
des récits mythologiques. D’où également la difficulté, pour tout observateur
de bonne foi, mais étranger – et pour cause – aux structures mentales de la
société celtique, de s’y reconnaître et de faire la part des choses. Ce n’est
pas tellement par leur « ésotérisme » que les récits celtiques
demeurent obscurs, mais plutôt à cause du décalage historique et la différence
fondamentale de conception qui en découle. Cela dit, il est possible que les
druides aient voulu volontairement obscurcir leurs récits, d’abord pour n’être
compris que par ceux qui pouvaient les comprendre, ensuite pour mieux effectuer
une sélection parmi ceux qui postulaient à la classe druidique. On ne

Weitere Kostenlose Bücher