Le Druidisme
peut-être l’assimilation de Belisama à Minerve-Athéna,
qui sortit tout armée du cerveau de Zeus-Jupiter, et aussi pourquoi Mac Greine,
« Fils du Soleil », représente, dans la triade du Livre des Conquêtes , la fonction guerrière. Mais
cela nous montre surtout que le soi-disant héros solaire, qui a fait la joie des
mythologues, est en réalité un homme-lune dépendant de la femme-soleil dont il est soit
le fils, soit l’amant, différence qui n’existe pas sur le plan du mythe
puisqu’il s’agit seulement d’établir un rapport intime entre deux personnages
symboliques.
Donc, si l’on veut bien admettre l’existence, dans la
tradition celtique, d’un personnage féminin qui a hérité des prérogatives et
des fonctions d’une ancienne déesse solaire de l’Âge du Bronze (du type de la
Diane scythique, à la fois lumineuse et redoutable), il faut supposer que Mac
Cecht est « fils de la déesse-soleil ». Et à partir de là, que
Mabon-Maponos est le fils de l’antique déesse-soleil Modron-Matrona. On a
dépouillé l’Artémis grecque – et la Diane romaine – de ses attributs solaires
en les transférant à Apollon dont on a fait, sans doute abusivement, son frère.
Dans la tradition celtique, on observe cette même tendance : c’est le
fils, ou l’amant, qui porte la coloration solaire au détriment de sa mère – ou
maîtresse. Donc Modron-Matrona peut représenter un des visages de l’antique
déesse-soleil, celle qui était appelée Sul à Bath, et dont le caractère
médicinal est évident puisqu’elle protège les eaux guérisseuses. Que dire
d’ailleurs des « dames blanches » du folklore pyrénéen et du rapport
éventuel qu’elles peuvent avoir avec les « apparitions » de Lourdes,
ou encore des nombreuses fontaines, ou des puits, à proximité immédiate
d’églises dédiées à la Vierge Marie, en Bretagne et ailleurs ? De plus,
dans la tradition galloise, Modron est l’équivalent de la fée Morgane des
romans arthuriens. Or Morgane est la maîtresse du Val sans Retour, lieu entouré
de flammes, où elle enferme les chevaliers infidèles. Elle est aussi la reine
de l’île d’Avallon : l’île est l’image du soleil sur l’océan qui est l’univers,
et la pomme, fruit par excellence d’Avallon et de toutes les îles du même
genre, est le symbole de la connaissance, de la lumière et de l’immortalité. Et
Morgane est également guérisseuse, ce qui nous ramène à l’aspect Diancecht de
l’Apollon celtique, plus particulièrement à la fille de Diancecht, Airmed, dont
le nom signifie « mesure ». D’ailleurs Modron-Morgane, dans la
tradition galloise comme dans les romans arthuriens, a un fils, Owein-Yvain, le
vainqueur de l’épreuve de la fontaine dédiée à Bélénos, à Barenton, où il met
en fuite, puis tue, le Chevalier Noir, symbole de l’obscurité nocturne.
Owein-Yvain est lui aussi un homme-lune chassant les ténèbres au milieu de la
nuit, mais recevant sa force et sa lumière de la femme-soleil. Et quand Modron
veut aider son fils en péril, elle lui envoie une « troupe de
corbeaux » qui sont en réalité elle-même et ses neuf sœurs, capables, nous
dit Geoffroy de Monmouth, de se transformer en oiseaux [112] .
Dans l’épopée irlandaise, la femme féerique Béfinn (« Belle Femme »),
présentée comme la sœur de Boinn ( Bo-vinda ,
« vache blanche »), autre nom de Brigit, agit de même quand son fils
Fraêch (« Bruyère ») est en danger [113] . Or
Fraêch paraît bien être le doublet d’Oengus, le Mac Oc, fils de Boinn et du
Dagda.
En résumé, l’Apollon celtique est surtout caractérisé par la
fonction médicale, la seule qu’ait retenue César, et la seule qui ait une
réelle importance dans la tradition irlandaise où Diancecht est un personnage
considérable [114] . Mais
il a également un aspect jeune : santé et jeunesse vont de pair, et à ce
titre, il est protecteur de la jeunesse. L’Autre-Monde est souvent qualifié de
« Terre de Jeunesse », de « Pays de l’Éternelle
Jeunesse » ? À ce titre, le dieu apparaît sous l’aspect du Mac Oc et
de ses équivalents, Mabon-Maponos, Fraêch, Mac Cecht ou encore Owein-Yvain.
C’est le « Jeune Fils », ou le « Jeune Amant ». Mais,
par-derrière, se profile l’ombre d’une antique déesse-soleil, héritée de l’ Âge
du Bronze, dont les traits dominants se retrouvent, d’une part dans des
héroïnes épiques comme Grainné ou
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