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Le Druidisme

Le Druidisme

Titel: Le Druidisme Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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corporel, il
n’est pas interdit de le retrouver, singulièrement mis en valeur, dans un autre
personnage bien connu de la littérature et des traditions populaires, le
célèbre Gargantua.
    Gargantua, en effet, n’est pas une création de Rabelais qui
s’est contenté d’extraire son héros de la tradition médiévale pour en faire le
symbole de l’homme nouveau, selon les conceptions de la Renaissance. Incontestablement,
Gargantua, par son gigantisme, son appétit, sa sexualité, est de même nature
que le Dagda, et le récit anonyme paru en 1532, à Lyon, intitulé « Les
grandes et inestimables chroniques du grand et énorme géant Gargantua » [143] , qui
met en relation Gargantua et la légende arthurienne (le père et la mère de
Gargantua étant créés par Merlin à l’aide de sa magie), ne peut démentir cette
opinion. De toute façon, Gargantua est un personnage mythologique celtique
devenu folklorique. Geoffroy de Monmouth, dans son Historia
Regum Britannia , le récupère comme roi de Bretagne sous le nom de
Gwrgant à la Barbe de Porc [144] , et
la toponymie française est riche en lieux-dits « Pas de Gargantua »,
« Tertre de Gargantua » et autres appellations équivalentes. On
retrouve même le personnage mythique dans des noms anciens, comme le Monte
Gargano, en Italie, le Mont Gargan en Limousin ou Livry-Gargan dans la région
parisienne. Dans tous ses ouvrages, Henri Dontenville a montré l’importance
exceptionnelle de Gargantua dans cette « mythologie française » qu’il
a essayé de cerner à travers une foule de documents hétérogènes [145] . Pour
Henri Dontenville, Gargantua ne peut être qu’une ancienne divinité gauloise
dont le souvenir perdure dans la mémoire populaire en dépit de toutes les tentatives
de refoulement ou de christianisation qui ont été opérées.
    Cela semble hors de doute. Et c’est aussi à mettre en
rapport avec les quelques textes grecs qui nous parlent d’Héraklès, fondateur
d’Alésia, et qui, marié à une princesse du pays, aurait engendré Galatès,
ancêtre mythique des Galates et des Gaulois. De toute façon, il s’agit d’un
dieu aux formes gigantesques et en relation avec la force, l’abondance et la
sexualité, références qui sont celles du Dagda sous son aspect guerrier et
producteur, comme l’indiquent les nombreuses légendes locales qui le concernent.
Peut-être faut-il voir dans Gargan – ou Gargano – le nom que portait le Jupiter gaulois
signalé par César ? Cela n’a rien d’impossible, et la fréquence des
toponymes – qui ne sont pas tous récents, ni postérieurs à Rabelais – où
Gargan-Gargantua intervient est un argument en faveur de cette hypothèse. Cela
dit, que peut signifier ce nom ? L’interprétation courante, jointe à celle
des noms de Grandgousier et de Gargamelle, ses parents, ou du nom de Badebec,
son épouse, tend à y voir un dérivé de « bouche »,
« gueule », d’après un ancien mot qui aurait donné d’une part
« gargouille », d’autre part le latin gurgem ,
d’où proviennent « ingurgiter » et d’autres mots de même famille. Le
malheur veut que cette interprétation tient davantage compte du caractère rabelaisien du personnage que de l’origine même de
cette divinité, laquelle est, répétons-le, gauloise et celtique. Certes,
Rabelais a tout fait pour mettre en valeur le côté « grande gueule »
de Gargantua, ce qui n’est pas contradictoire avec l’un des aspects du Dagda,
mais c’était surtout à cause de sa propre problématique qui était de faire du
personnage un « puits de connaissance », symbole de la « voracité »
de l’humaniste de la Renaissance aussi bien sur le plan matériel que sur le
plan intellectuel. Si Gargan – ou Gargano – est celtique à l’origine, pourquoi
ne pas chercher la signification de son nom du côté des langues
celtiques ? Cela semble logique, mais curieusement, personne n’a jamais eu
cette idée [146] .
    C’est un conte populaire breton-armoricain, recueilli au début
du siècle dans la forêt de Camors (Morbihan), qui nous donne, sinon la
solution, du moins une indication précieuse [147] .
L’ensemble est relié à la légende de Konomor, le Barbe-Bleue breton. Le
personnage est un « vendeur de sel » curieusement nommé le Gergan  : pour venir en aide à la femme du
mauvais seigneur de Kamorh qui, pour la rattraper et la faire mourir, excitait
son chien sur elle, le Gergan prend

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