Le Druidisme
Graal, à propos de la
vengeance exercée par Perceval contre les meurtriers de son père. Néanmoins, ce
dieu se présente comme un honnête travailleur. Sur l’autel des Nautes, il
élague un arbre avec une longue serpe. Sur un bas-relief de Trêves, il attaque le
tronc avec une cognée, mais ce qui est surprenant, c’est que le feuillage de
l’arbre laisse voir une tête de taureau, tandis que trois oiseaux sont perchés
sur les branches. Or, sur l’autel des Nautes, un bas-relief voisin de celui
d’Ésus représente un taureau dans une forêt, avec, sur la tête et sur la
croupe, trois gros oiseaux que l’inscription en pur gaulois permet
d’identifier : tarvos trigaranus ,
c’est-à-dire le « taureau aux trois grues ». Ce Tarvos Trigaranos a
suscité bien des commentaires. On le retrouve d’ailleurs curieusement dans les
Chansons de Geste, en particulier dans la Chanson de
Roland , sous le nom de Tervagant que
les Sarrasins adorent en même temps qu’Apollon et Mahomet. Il faut savoir qu’il
existe dans la statuaire gallo-romaine plusieurs exemples de taureau à trois
cornes, et que la notion de triade, ou de trinité, est familière à l’ensemble
des Celtes. Cela dit, il est évident que le dieu Ésus, bûcheron et homme des
bois qui fait penser à celui qu’on rencontre dans le Chevalier
au Lion de Chrétien de Troyes, est lié d’une façon ou d’une autre à ce
taureau aux trois grues : des monnaies armoricaines du peuple des Osismi , qui représentent un cheval surmonté d’un
oiseau – probablement le conducteur, ou le guide céleste – et sautant par-dessus
un taureau, le confirment. Il ne peut s’agir que d’une légende mythologique
dont Ésus est le héros. D’Arbois de Jubainville avait proposé d’y voir une
illustration d’un épisode de la Tain Bô Cualngé ,
cette grande épopée de l’Ulster, où le héros Cûchulainn, luttant contre trois
royaumes d’Irlande pour défendre le Brun de Cualngé, ce taureau divin objet de
tant de convoitises, est harcelé par la déesse Morrigane, sous forme d’oiseau.
Et Morrigane est aussi une triple déesse. Cette interprétation n’est pas plus
mauvaise qu’une autre, et on n’en a pas trouvé de plus satisfaisante. Dans ce
cas, il faudrait voir dans Cûchulainn une sorte de doublet héroïsé et quelque
peu historicisé du Dagda, dans un aspect de protecteur de son peuple et des
biens de ce peuple, en l’occurrence le taureau sacré.
Cet aspect protecteur des biens et des personnes, nous le retrouvons
dans le dernier terme de la triade de Lucain, Teutatès, auquel, selon le
scholiaste, on sacrifie des victimes, par suffocation, en leur plongeant la tête
dans un chaudron. Teutatès, ou Toutatis, épithète donnée parfois à Mars,
parfois à Mercure, est cependant digne de Jupiter. Le nom signifie « Père
du Peuple », ou « Père de la Tribu ». L’appellation est assez
proche de celle du Dagda, Ollathir . Certains
commentateurs prétendent qu’il s’agit d’un nom commun, et qu’il peut
s’appliquer à n’importe quelle divinité protectrice d’un groupe social. C’est
non seulement un nom commun, mais une épithète périphrastique. Et tous les noms
des dieux sont de cette sorte. Pourquoi ne pas considérer Teutatès-Toutatis
comme une entité personnalisée, du moins chez certains peuples ?
Cela n’empêche nullement le Jupiter gaulois de porter
d’autres surnoms, et d’avoir d’autres attributs. C’est ainsi qu’on peut classer
comme un Jupiter-Dagda le dieu accompagné d’un serpent à tête de bélier, tel
celui qui est représenté sur une des plaques du Chaudron de Gundestrup :
il tient d’une main un torques et de l’autre le cou du serpent criophore. Mais
il a des bois de cerf, ce qui l’apparente à Cernunnos, le dieu cornu, qui ne
semble pas indo-européen. Sur le Pilier de Mavilly, en territoire des Santones , c’est une sorte de dieu guerrier
qu’accompagne le serpent à tête de bélier. Ce motif n’apparaît nulle part
ailleurs que chez les Gaulois. Il faut dire que le thème du serpent avait peu
de chances de se répandre en Irlande, le serpent y étant pour ainsi dire
inconnu. Mais un attribut divin semble avoir eu beaucoup de succès en Gaule, le
maillet.
Le Dieu au maillet, lui aussi, n’existe que sur le
territoire gaulois. Et les inscriptions le nomment Sucellos, ce qui signifie littéralement
« Tape-Dur », « celui qui frappe bien », appellation qui
convient
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