Le Druidisme
chef suprême
des Tuatha : « On leur amena le noble roi suprême Mananann à la
grande puissance, afin qu’il prît conseil et avis. L’avis de Mananann aux
guerriers fut de se disperser dans les sidhe et de s’établir dans les collines et les belles plaines d’Irlande. Mananann
partagera entre les nobles leurs résidences dans les sidhe …
Et il fit le feth fiada , le festin de Goibniu,
et les porcs de Mananann pour les guerriers, c’est-à-dire que par le feth fiada on ne pouvait plus voir les princes, que
par le festin de Goibniu, les rois suprêmes étaient sans âge et sans déclin et
que les porcs de Mananann pouvaient être tués, mais qu’ils étaient vivants pour
les guerriers. Mananann enseigna aux nobles à installer leurs résidences
féeriques et à disposer leurs forteresses de façon qu’elles ressemblassent à la
demeure de la belle Terre de Promesse et à la belle Émain Ablach » [186] .
Ainsi Mananann est-il le chef suprême des Tuatha Dé Danann
qui résident à la fois dans les sidhe ,
c’est-à-dire les tertres mégalithiques d’Irlande, et dans les îles plus ou
moins mythiques qui entourent l’Irlande. Il régit la « Terre de Promesse »,
nom général de l’Autre Monde celtique, qui n’a rien d’un « au-delà »,
qui est réellement un autre monde avec lequel
on peut communiquer dans certaines conditions. Il est aussi le maître du Festin
de Goibniu, qui est un festin d’immortalité auquel il attribue des porcs merveilleux
qui renaissent perpétuellement. Il est enfin l’incantateur du feth fiada , ce charme magique qui donne aux Tuatha
le don d’invisibilité lorsqu’ils circulent parmi les humains et qu’ils ne
veulent pas se faire voir. De nombreux contes populaires ont gardé le souvenir
de ce feth fiada , notamment en Bretagne, à
propos des fées [187] .
Mananann réside le plus souvent dans la Terre de Promesse, où il est marié avec
la déesse Fand, dont le nom veut dire « hirondelle », mais il connaît
des mésaventures conjugales, notamment à cause de Cûchulainn [188] .
Il intervient fréquemment dans les affaires humaines, comme une sorte
d’Odin-Wotan, ou de Merlin. Il est, en particulier, le père du héros Mongan,
dont certains récits nous racontent la très curieuse histoire [189] .
Le héros Bran, fils de Fébal, le rencontre sur la mer, et Mananann lui fait une
admirable description d’Émain Ablach [190] .
Le Manawyddan gallois n’a pas, semble-t-il, la même importance.
Il est le héros de la troisième branche du Mabinogi ,
où il se révèle magicien et maître-artisan. Il épouse la déesse Rhiannon [191] . Il
est souvent cité dans les poèmes attribués au barde Taliesin. Dans un conte
plus récent [192] , il
devient l’oncle du héros Caradawc, qui est peut-être le Caractacos historique
de Tacite ou le Caradoc des romans arthuriens : il construit une étrange
prison de forme ronde avec tous les ossements des Romains tués en
Grande-Bretagne, prison destinée aux traîtres, aux Pictes et aux Saxons. Dans
cette tradition galloise, il est le frère de Brân le Béni, maître du Chaudron
de Résurrection.
Mananann-Manawyddan apparaît toujours comme venant d’ailleurs , c’est-à-dire de la « Terre de
Promesse », située traditionnellement au-delà de la mer. C’est pourquoi on
en a fait un « fils des flots » (Llyr ou Lir, qu’il ne faut pas confondre
avec le roi dont Geoffroy de Monmouth raconte les malheurs, dans son Historia , et qui est devenu le roi Lear de
Shakespeare), voulant marquer par là son appartenance à l’Autre Monde. De la
même façon, on lui a donné le surnom de « Mannois » parce que l’île
de Man est symboliquement au-delà de la mer, aussi bien pour les Bretons que
pour les Irlandais, et de toute évidence, un milieu entre les deux pays. D’ailleurs Mananann-Manawydan n’est qu’un surnom, sans
doute assez récent : il faudrait peut-être chercher le nom qu’il portait
avant. C’est possible. Il s’agit de Mider, maître du sidh de Bri-Leith, un des Tuatha Dé Danann qui n’apparaît pas souvent mais qui est
cependant signalé comme roi de Mag Mor , la
« grande plaine », variante d’appellation de l’Autre Monde.
En effet, les différentes versions de La Courtise d’Étaine [193] nous montrent les deux personnages interchangeables, et c’est la version la
plus christianisée qui met en scène Mananann. Il est plus que probable que
Mider était le nom primitif,
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