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Le Fardeau de Lucifer

Le Fardeau de Lucifer

Titel: Le Fardeau de Lucifer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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cru pour me forcer à me reposer. Chaque matin, l’un d’eux changeait mes pansements et tâtait mes côtes meurtries pour mesurer leurs progrès. Malgré mes protestations sonores, qui n’étaient pas sans me rappeler celles de Montbard, il en profitait pour enduire mes plaies recousues de cet onguent qui empestait la pourriture. J’ignore si on désirait s’assurer que je ne quitte pas ma couche, mais je ne trouvai de vêtements nulle part dans la chambre.
    Puis, un matin, cette routine fut brisée. Je dormais comme une souche lorsque j’entendis la porte s’ouvrir. Je supposai qu’on m’apportait la bouillie de blé et de miel et le lait de chèvre chaud qui constituait mon ordinaire, mais en ouvrant les yeux je découvris avec étonnement qu’il ne faisait pas tout à fait jour. J’entendis le léger claquement du plateau qu’on posait sur la table. Le Parfait était-il simplement en avance ? Je m’attendais à ce qu’il me secoue pour me réveiller comme chaque matin, mais une main caressa plutôt mes cheveux. J’ouvris les yeux et je souris, anticipant déjà le plaisir de sentir Cécile contre moi. Mais elle ne vint pas me rejoindre. Intrigué par son comportement, je me retournai en ménageant mes côtes tendres.
    Pernelle était là, toute vêtue de noir. Elle avait beaucoup maigri et ses yeux étaient profondément cernés. Aux coins de sa bouche, je pus apercevoir de petites rides qui n’étaient pas là auparavant. Elle me rendit mon sourire sans qu’il n’atteigne ses yeux. Ses blessures étaient bien plus morales que physiques et je compris qu’elle cherchait une certaine paix dans l’oubli d’elle-même. Je sentis une boule se former dans ma gorge. Tout ce qu’elle avait subi dans sa vie était à cause de moi.
    Elle s’assit sur mon lit, me tendit le bol et me regarda manger la bouillie sans rien dire. Sur l’entrefaite, la porte de ma chambre s’entrouvrit et Cécile entra. En voyant Pernelle, elle s’arrêta, nous dévisagea avec tendresse et sourit. Pernelle et elle échangèrent un regard complice qui ne m’échappa pas.
    —    Je repasserai, dit-elle avant de sortir et de refermer.
    Lorsque nous fûmes seuls, Pernelle parla enfin.
    —    Tu l’aimes, n’est-ce pas ? demanda-t-elle avec douceur.
    —    Les choses ne sont pas aussi simples, rétorquai-je sans pouvoir m’expliquer davantage.
    —    Tu as droit au bonheur, mon bon ami, fit-elle en me caressant la joue. Et quand on aime vraiment, on trouve toujours le moyen.
    Elle baissa les yeux et resta là, piteuse. Il me fallut un moment pour comprendre ce qui se passait en elle. Je tendis la main et, lorsqu’elle finit par y déposer la sienne, je la serrai affectueusement, rassemblant toute la tendresse dont j’étais capable, ce qui était bien peu.
    —    Pernelle, murmurai-je, jusqu’à mon dernier jour, nul n’occupera ta place dans mon cœur. Elle est à toi depuis l’instant où je t’ai connue, quand tu m’as sorti du trou où Césaire et les autres m’avaient abandonné. Tu te rappelles ?
    —    Oui, dit-elle en hochant la tête avec nostalgie.
    —    Personne ne te remplacera. Pas même Cécile.
    Elle sourit tristement et serra ma main à son tour. Puis elle la porta à sa bouche. Dans ses yeux, je vis briller quelques larmes qu’elle retenait difficilement.
    —    Et toi de même, Gondemar, dit-elle. As-tu souvenance de ce baiser échangé quand nous étions encore enfants ?
    —    Oui. Mon premier.
    Elle sourit, un peu triste.
    —    Je crois qu’une petite partie de moi a toujours rêvé qu’un jour je serais tienne. Même si c’était impossible, bien avant que je devienne Parfaite. Nous conservons tous un peu de nos désirs d’enfant, je suppose.
    —    Je ne sais pas. Parfois, aussi, on les perd.
    Elle lâcha ma main et se leva d’un coup sec, visiblement mal à l’aise dans l’intimité qui s’était installée.
    —    Mais tout cela est sans importance, dit-elle. Cécile est une fort bonne personne et tu mérites un peu de bonheur.
    Pernelle se dirigea vers la porte.
    —    J’ai des patients à voir, déclara-t-elle.
    Je la regardai sortir sans rien dire. Si quelqu’un sur cette terre ne méritait pas le bonheur, c’était moi.
    Plus tard dans la journée, Roger Bernard fit irruption dans ma chambre. Il entra d’un pas décidé en refermant sèchement la porte et s’avança vers mon lit.
    —    J’aimerais discuter de ma

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