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Le Fardeau de Lucifer

Le Fardeau de Lucifer

Titel: Le Fardeau de Lucifer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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peine, votre état tient du miracle. Quel saint avez-vous donc prié ? demandai-je avec ironie.
    —    Saint Jude, le patron des causes perdues, rétorqua-t-il. Tu devrais entretenir davantage tes relations avec lui.
    L’urgence de la situation m’aidant à ignorer l’allusion, j’appuyai mes avant-bras sur mes cuisses et me penchai vers lui.
    —    Vous êtes pâle comme le croupion d’une nonne et vous suez comme un forgeron. Je ne suis pas dupe, vous savez. Quiconque vous connaît un brin peut voir que vous avez un mal de chien.
    —    Soit. J’ai l’impression que le cœur va me sortir par le moignon. Mais, à part le petit saignement de cette nuit, la plaie est belle et bien fermée. Je ne peux tout de même pas rester couché pour le reste de ma vie. Et ne t’avise pas de te mettre à caqueter comme une mégère.
    —    Nous savons tous deux que mes remontrances ne mèneraient à rien. Et j’ai d’autres chats à fouetter, figurez-vous, dis-je en songeant à ce que la disparition de la Vérité signifiait pour moi.
    —    Ce qui compte, ce sont ces maudits papiers, reprit-il. Ils me causent bien des tourments et je ne suis pas sûr d’apprécier leur existence, mais, mordieu, j’ai juré sur mon honneur et ma vie de les protéger. Bertrand de Montbard n’a qu’une parole. Ce n’est pas allongé sur cette paillasse que je servirai à quoi que ce soit.
    Il frotta distraitement son moignon. Il l’avait enveloppé dans l’extrémité repliée de sa culotte, qu’il avait attachée autour de sa cuisse avec un bout de ficelle. Je fis semblant de ne pas remarquer le rictus de douleur qui passa sur ses lèvres.
    —    Heureusement, il me reste ma cervelle, et elle a passablement réfléchi depuis que tu m’as raconté cette histoire.
    —    Et est-elle parvenue à quelque conclusion ?
    —    Peut-être. Ce qui est clair, c’est qu’on ne vole pas des documents de cette importance juste pour le plaisir. Le filou a agi soit par conviction personnelle, soit pour sauver sa propre peau, soit par appât du gain, dit-il en levant les doigts au rythme de son énumération.
    —    Dans un cas comme dans l’autre, pour les transmettre à Amaury, complétai-je.
    —    Le saint homme n’espère qu’une occasion de les détruire pour qu’Innocent et ses successeurs sur le trône de saint Pierre puissent dormir du sommeil du juste.
    Montbard me désigna de la tête la cruche de vin qui traînait sur la table. J’en versai dans deux gobelets et lui en servis un. Il but un peu et je fis de même.
    —    Nous avons la certitude qu’aucune assemblée des Neuf n’a eu lieu entre ton initiation et celle d’hier ? s’enquit-il.
    —    Aucune. C’est votre blessure qui a contraint Ravier à la convoquer.
    —    Et elles ne sont jamais décidées à l’avance ?
    —    Pas que je sache.
    —    Bon, cela signifie que les documents ont été volés entre le début de septembre et hier. Cela fait près de cinq mois. Et si cette maudite jambe ne s’était pas corrompue, en ce moment même, personne ne saurait que la Vérité est disparue. Le larcin n’aurait été découvert que lors du prochain conseil, Dieu seul sait quand. Le voleur aurait eu le temps de faire sortir les parchemins de Montségur en toute quiétude.
    —    Sauf que personne n’est sorti de la forteresse. À moins qu’il ne l’ait fait en secret, évidemment. Comme le suggérait Raynal, avec un peu d’ingéniosité, il aurait certes été possible de les faire passer par-dessus le rempart.
    —    Pas avec les sentinelles qui vont et viennent régulièrement, répliqua Montbard.
    —    Le voleur aurait pu procéder entre deux rondes, contrai-je. Et puis, nous avons nous-mêmes passé de longues heures sur la muraille sans que les gardes nous inquiètent. S’ils connaissaient bien le voleur, ils l’auraient laissé tranquille, lui aussi. Il auraient même pu être de mèche avec lui.
    —    Tu as bien regardé Montségur, jouvenceau ? Peux-tu vraiment imaginer que quelqu’un puisse gravir le sentier étroit et escarpé qui y mène, puis venir se planter au pied de la muraille et attendre tranquillement qu’on lui lance un paquet, tout ça sans être vu ou entendu par les sentinelles, même en pleine nuit ?
    —    Ce serait difficile, en effet, dus-je admettre.
    —    Bon, il y a quelque espoir que ton crâne ne soit pas complètement vide !
    Il vida son

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