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Le Fardeau de Lucifer

Le Fardeau de Lucifer

Titel: Le Fardeau de Lucifer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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   Je vais voir à ce qu’on l’enlève de là et qu’on l’inhume correctement, dit Ravier d’une voix éteinte. Si ce pauvre garçon a été forcé de trahir, il mérite au moins cela.
    —    Je soupçonne que sa famille n’en a plus pour longtemps, murmurai-je.
    Je songeais à la tristesse avec laquelle Eiquem avait mentionné sa femme et ses enfants et je compris que c’étaient eux qui avaient servi de levier pour l’amener à trahir. Il ne verrait jamais son fils nouveau-né.
    Ravier sortit sans rien dire en secouant la tête, dépité. Il semblait porter le poids du monde sur ses épaules et marchait d’un pas traînant. Clairement, sa vie tirait à sa fin. Une fois encore, je songeai que l’Ordre était en danger. Mon âme, encore plus.

Chapitre 9 Confrontation
    Un mois durant, après le meurtre d’Eiquem, je guettai mes frères et sœurs au sein de l’Ordre sans rien découvrir de nouveau. Le voleur se trouvait parmi nous, je le savais, mais les soupçons que j’entretenais envers Véran et Daufina ne s’étaient toujours pas confirmés. Depuis ma conversation avec Montbard, je les avais gardés pour moi, maintenant même Ravier à l’écart. Si l’un d’eux était le coupable, la dernière chose que je désirais était qu’ils aient vent du fait que je les avais à l’œil.
    Je croisais le Magister de temps en temps et lui non plus n’allait nulle part. L’inquiétude le rongeait visiblement et il se flétrissait à vue d’œil. La détérioration de sa santé précipita finalement les choses. Encore une fois, Ugolin fut celui qui m’annonça la mauvaise nouvelle. Alors que je me rendais à l’atelier pour affûter Memento, il en surgit, une arme toute neuve à la main. Je savais que, depuis quelques jours, il travaillait à forger son arme, comme tout membre de l’Ordre. De toute évidence, il avait terminé et je notai, non sans fierté, qu’en gros, il avait reproduit mon modèle.
    —    Gondemar, j’allais justement te trouver. C’est Ravier. dit-il, les traits tendus.
    —    Quoi ? Qu’a-t-il donc ?
    —    Il est très mal. Véran vient tout juste de me l’apprendre. C’est dame Daufina qui le lui a dit.
    —    Véran ? Daufina ? dis-je, alarmé. Viens, vite.
    Il glissa son épée dans son fourreau et nous nous précipitâmes vers le logis du Magister des Neuf. Malgré moi, je calculais les conséquences de la mort de Ravier sur l’Ordre des Neuf. Pour le serpent qui se terrait en son sein, il s’agissait d’une occasion rêvée d’en prendre le contrôle. Lorsque nous entrâmes, je réalisai que sa petite chambrette était plus austère encore que les nôtres et que, malgré son pouvoir, cet homme vivait dans le dénuement le plus complet. Il ne semblait rien posséder d’autre que ses armes et les vêtements qu’il portait.
    Ravier gisait sur sa paillasse. Il était décharné, comme si un démon gourmand avait profité des dernières semaines pour le ronger de l’intérieur. Son visage plissé avait pris une vilaine teinte jaunâtre. Ses yeux sombres, si intimidants, étaient enfoncés dans son crâne. Ses cheveux blancs et rares étaient plaqués sur sa tête par une sueur dégageant l’odeur âcre de l’agonie. Sous sa barbe, ses lèvres n’étaient plus qu’une mince ligne décolorée. Je n’avais pas besoin de Pernelle pour me dire que le Magister des Neuf se mourait.
    Accroupie près du malade se trouvait Daufina, qui lui épongeait doucement le visage avec un linge humide. Sur une table basse, près du lit, étaient posées quelques fioles contenant des liquides de couleurs diverses et des fruits séchés. Je m’alarmai aussitôt : l’Ordre s’était fait voler sa raison d’être et voilà qu’une de mes principales suspectes se trouvait seule avec son vieux maître agonisant ; une Parfaite qui connaissait les vertus des plantes, les curatives comme les mortelles, et qui avait, de surcroît, la réputation d’être sorcière.
    —    Sors d’ici, ordonnai-je.
    —    Mais. que signifie. ? répliqua Daufina, outrée.
    —    Sors ! aboyai-je. Maintenant !
    Elle eut un mouvement de recul involontaire et fit mine de ramasser ses fioles.
    —    Les mains vides, ajoutai-je d’un ton qui ne tolérait aucune réplique.
    Mon intention était claire. Elle le comprit et n’insista pas. Livide - de colère ou de terreur, je ne saurais dire -, la Parfaite se releva et quitta la pièce sans demander son reste,

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