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Le Fardeau de Lucifer

Le Fardeau de Lucifer

Titel: Le Fardeau de Lucifer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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emporter par la brutalité qui faisait la différence entre la vie et la mort. À intervalles réguliers, je regardais derrière moi pour m’assurer que
    Pernelle était toujours là. Chaque fois, je la trouvais fermement encadrée par Montbard, Ugolin et Raynal qui, tous, combattaient avec la même ferveur. Livide de frayeur, mon amie avait les yeux écarquillés et s’agrippait, pétrifiée, à ses rênes avec l’énergie du désespoir.
    Voyant que nous venions à bout de ses hommes, l’officier lança un cri de rage et se précipita sur moi. J’eus à peine le temps de tirer Memento des entrailles d’un de ses soldats pour parer le coup qu’il me destinait. Nos armes se bloquèrent et je fus à même de voir luire dans ses yeux tout le fanatisme et toute la fureur qui animaient les croisés. Je le repoussai avec tant de force qu’il faillit tomber de sa monture. J’allais l’achever lorsque je sentis une cuisante brûlure à l’épaule. Privé d’écu, mon côté gauche était exposé et un homme à cheval en avait profité pour me frapper. Memento sembla penser par elle-même et fendit l’air. L’instant d’après, la tête de l’homme roulait sur le sol.
    —    Gondemar ! cria Pernelle de toutes ses forces.
    Je me retournai et aperçus l’officier que j’avais repoussé. Incapable de venir à bout d’un homme, le mécréant avait décidé de passer sa rage sur une femme. Il avait profité de ma distraction pour me contourner et tenait maintenant les rênes de la monture de mon amie, qui lui tirait la barbe à pleines mains pour tenter de le faire tomber de selle. Autour d’elle, Ugolin, Raynal et Montbard étaient tous trop occupés à survivre pour la défendre. Je fis faire demi-tour à Sauvage et fonçai sur l’homme. Memento trancha net le poignet qui retenait Pernelle. L’air stupéfait, l’officier regarda bêtement le moignon d’où pissait un sang bourgogne. Un coup de pied dans les côtes l’envoya choir sur le sol. Je rendis ses rênes à Pernelle.
    —    Reste derrière moi ! criai-je.
    Soudain, le temps s’arrêta autour de moi. Le vacarme de la bataille se tut et un silence surnaturel m’enveloppa. Là, au cœur de la bataille, monté sur un destrier aussi noir que sa chevelure et son âme, Simon de Montfort en personne participait au massacre, rugissant comme un lion en chasse, riant comme un diable chaque fois qu’il mettait fin à une vie. Malgré moi, j’immobilisai Sauvage. Il était si proche que j’aurais pu franchir en quelques secondes la distance qui nous séparait et mettre fin à ses jours. Mais pour cela, il m’aurait fallu abandonner Pernelle à son sort.
    Comme s’il avait senti que je l’observais, le chef des croisés se retourna et nos regards se fondirent l’un dans l’autre. Ses yeux s’agrandirent de surprise et sur ses lèvres je pus lire : « Toi ? » Son visage se déforma en un rictus de rage qui découvrit ses dents, lui donnant des airs de bête sauvage. Il allait se lancer vers moi lorsque ses soldats se refermèrent autour de lui tel un rempart protecteur, repoussant les rares cathares qui livraient encore combat.
    Je me retournai vers Montbard et compris qu’il l’avait vu, lui aussi.
    — Foutre de Dieu ! hurla-t-il en agitant son épée pour éloigner les croisés de plus en plus nombreux. Il nous a reconnus ! Notre plan tombe à l’eau ! Ne restons pas ici !
    Je notai au passage qu’un poignard était planté dans sa jambe de bois et, du coin de l’œil, aperçus Montfort qui beuglait des ordres en nous désignant, Montbard et moi. Aussitôt, une vingtaine d’hommes lui emboîtèrent le pas et fendirent la foule des combattants dans notre direction.
    Secouant ma torpeur, je saisis les rênes de la monture de Pernelle, éperonnai Sauvage et filai à bride abattue droit devant. À une vingtaine de toises de nous, une des portes de la ville avait été ouverte et le pont-levis rabattu par-dessus le fossé. Les troupes vaincues s’y engouffraient pêle-mêle pour échapper au massacre. Nous nous fondîmes dans le lot et nos montures furent emportées dans une marée humaine si épaisse que j’eus fort à faire pour garder mon amie près de moi. Nous nous retrouvâmes dans Toulouse. Après quelques minutes, la porte fut refermée, laissant dehors tous les soldats qui n’avaient pas eu le temps de se retirer.
    Pressé de toutes parts, je sentais Sauvage proche de la panique. Il piaffait nerveusement et devenait de plus

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