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Le faucon du siam

Le faucon du siam

Titel: Le faucon du siam Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Axel Aylwen
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la nation vous a valu ce
grand honneur. J'en suis ravi pour vous... et fier... mais un peu inquiet
aussi. Voyez-vous, j'ai réfléchi à tout ce que vous avez fait. Chacune de vos
actions a, d'une certaine façon, dénoncé les Maures et leur a fait perdre la
face. Le banquet a été un extraordinaire succès. Tous ceux qui y ont assisté
m'en ont fait la remarque. Mais », dit-il en se penchant en avant d'un air
soucieux, « vous vous êtes sans doute attiré l'hostilité des Maures. Mohammed
Rachid m'évite. Il venait régulièrement me rendre visite, et il n'a pas mis les
    pieds ici une seule fois depuis que vous lui avez repris
la direction du service des Banquets. C'est un homme dangereux. À vrai dire, je
le fréquentais parce que je préférais l'avoir de mon côté. Vous savez, son père
a jadis été Barcalon, brièvement, sous le règne du dernier roi, Prasat Tong.
J'ai toujours pensé que lui-même briguait ce poste. Être chargé de recevoir les
dignitaires étrangers représente souvent une étape traditionnelle vers des
fonctions supérieures : Barcalon, par exemple. » Voyant Phaulkon hausser les
sourcils, il éclata de rire. « Allons, Constant, n'allez pas vous faire des
idées !
    — Inutile de vous inquiéter sur ce point, doutor, répondit Phaulkon en riant à son tour. Mais, dites-moi, que pourrait faire
ce Rachid?
    — Il est en excellents termes avec le prince Daï. Il
l'a amené un jour chez moi. Le prince Daï est le chef héréditaire de tous les
Macassars, qui lui vouent une fidélité aveugle. Les Macassars sont tous les
musulmans des Célèbes, guerriers par tradition et... assassins bien entraînés.
Ils se conduisent pour l'instant de manière fort pacifique car le roi les a mis
en garde lorsqu'il leur a donné asile en les installant, dans leur propre camp,
hors de la ville. Mais il n'en faudrait pas beaucoup... Si Rachid venait à
persuader le prince Daï qu'il faut vous éliminer... » Mestre Phanik se
passa d'un geste éloquent la main en travers de la gorge. « Et même si vous
ripostiez, les Macassars trouveraient tout naturel de perdre quelques douzaines
d'hommes pour réaliser les souhaits de leur chef. J'ai lu des récits à vous
glacer le sang sur leur dernier combat contre les Hollandais pour la défense de
leur patrie. Ils ont mangé de l'opium, dégainé leurs kriss et chargé droit sur
la gueule des canons hollandais. Rendus fous par la drogue, ils étaient prêts à
se battre jusqu'au dernier. Je crois que le prince Daï s'est enfui au Siam avec
ses mille derniers sujets, pour épargner à sa race l'extinction totale. »
    Phaulkon écoutait avec intérêt et se demandait comment
aborder le sujet de Maria. « Alors, que dois-je faire pour me protéger contre
un millier de fanatiques bourrés d'opium? Avez-vous des suggestions, doutor?
    — Ce n'est pas facile, après tout ce que vous avez
déjà fait... Mais pourquoi ne pas tenter un effort pour vous gagner l'amitié
des mandarins musulmans de la Cour? Ils représentent une faction très
importante. Persuadez-les que ce n'est pas à eux que vous en voulez et que vous
ne recherchez que l'intérêt de la nation.
    — Plutôt difficile, vous ne trouvez pas? Surtout
quand on songe que ce sont eux qui saignent à blanc le pays.
    — Peut-être, Constant. Mais inspirez-vous de
l'histoire de l'Orient. Ne faites pas un geste avant d'être sûr de disposer de
toutes les forces qu'il vous faut, d'avoir tout le soutien nécessaire pour
assurer le succès de votre entreprise. Si vous souhaitez continuer à déloger
les Maures, vous aurez besoin d'alliés puissants qui vous soient dévoués et
prêts à les remplacer — mais aussi à vous défendre contre d'éventuelles représailles.
    — À vrai dire, doutor, j'y travaille.
    — J'aurais dû m'en douter », s'exclama mestre Phanik en se donnant une claque sur la cuisse. « Me voilà qui fais la leçon à
un animal politique sans doute plus rusé que Machiavel et Brutus réunis. » Il
se pencha pour tapoter affectueusement le genou de Phaulkon. « Je voulais
simplement vous avertir d'être sur vos gardes. Vous êtes un homme très en vue
maintenant, meu amigo.
    — J'apprécie toujours vos conseils, doutor, vous le savez. Seul un imbécile les prendrait à la légère.
    — Je vous en remercie. Dans la bouche d'un mandarin
de la cour royale, c'est un véritable compliment.
    — Maria s'intéresse-t-elle toujours autant à la
politique? interrogea Phaulkon, ramenant la

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