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Le Gerfaut

Le Gerfaut

Titel: Le Gerfaut Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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vie !
    Louis XVI eut un bon sourire. Puis, paraphrasant Washington sans le vouloir, il tendit sa main au jeune homme.
    — Gardez-la précieusement, monsieur de Tournemine. Un serviteur mort a droit à tout mon respect… mais il n’est plus d’une grande utilité.
    Gilles s’agenouilla pour baiser cette main qui fleurait bon le savon à la verveine puis recula vers la porte en saluant profondément. La voix royale l’y suivit.
    — Il paraît que vous êtes un redoutable homme des forêts, un tireur de première force et que vous avez appris la chasse des Indiens d’Amérique ? Il faudra que nous chassions un jour ensemble. Vous m’instruirez ! Monsieur de Lauzun, quand le temps en sera venu, vous présenterez ce jeune homme à la Reine !
    — Peste ! s’écria Lauzun une fois hors de l’atelier royal. Quel succès ! Non seulement vous voilà reconnu mais encore vous voilà en faveur. Vous avez dû plaire singulièrement. Je vous en fais mon compliment, ce n’est pas si facile.
    Deux jours plus tard, en effet, Gilles recevait de la Grande Chancellerie les actes de reconnaissance qui lui conféraient le titre de chevalier transmissible héréditairement. En outre, un brevet de lieutenant « à la suite » dans le régiment des Dragons de la Reine commandé par le chevalier de Coigny et enfin un bon de paiement à présenter au trésorier du régiment pour toucher immédiatement son premier quart de solde. C’était, pour lui, la gloire et la fortune.
    Transporté de joie, le nouveau chevalier se jeta incontinent sur sa plume pour annoncer enfin à l’abbé de Talhouët son retour et l’étonnante fortune que lui avait valu sa rencontre providentielle avec Pierre de Tournemine. Il y avait plusieurs mois qu’il n’avait pas écrit, aussi la lettre fut-elle particulièrement longue. Il la terminait en disant qu’il espérait pouvoir aller prochainement embrasser tous ceux qu’il aimait et revoir son pays, au moins en reprenant la route de l’Amérique s’il pouvait obtenir la permission d’y retourner.
    La réponse était arrivée : sous une triple forme : un garçon, un cheval et une lettre, le second portant les deux autres. Le garçon se nommait Pierrot : c’était l’un des fils de Guillaume Briant. Le cheval n’était autre que l’ex-Magnus de Fersen rebaptisé Merlin par Gilles lui-même et la lettre émanait du recteur d’Hennebont. Une lettre dont Gilles ne put lire la suscription sans un frisson de joie car elle était adressée à « Monsieur le Chevalier de Tournemine de la Hunaudaye, en l’hôtel de Monsieur le duc de Lauzun rue des Réservoirs… ».
    Le bon abbé y disait tout au long sa joie pleine de tendresse en apprenant de si bonnes nouvelles. Il expliquait que le comte de Fersen avait, personnellement, écrit à Guillaume Briant pour lui faire connaître sa décision d’offrir le cheval à son jeune ami. Enfin, il transmettait la lettre que Judith de Saint-Mélaine lui avait fait remettre par la sœur tourière du couvent au jour de son départ pour le Frêne.
     
    Elle est déjà vieille de trois mois , écrivait le recteur, et j’ai le cœur navré en te l’envoyant car il aurait fallu bien peu de choses pour que vous puissiez être l’un à l’autre. Si je compte bien, Judith a été reprise par ses frères le jour même, ou peu s’en faut, où tu touchais les côtes de France. Mais il faut en cela comme en toutes choses s’incliner devant la volonté de Dieu qui vient de tant faire pour toi. On ne peut, en ce bas monde, atteindre tous les bonheurs et la sagesse veut que l’on se contente de ce que l’on a. Adieu, mon cher chevalier, je me charge de faire savoir à ta mère ce qu’il est advenu de toi. N’oublie pas que tu es toujours dans mes prières comme dans mon cœur…
     
    Le feu baissait. Gilles replia la lettre de Judith pour la remettre contre son cœur et se leva en s’étirant avec un soupir. Elle l’avait bouleversé, cette pauvre épître pleine de douleur et de larmes. Quant à se résigner à accepter les décisions tyranniques des frères de Saint-Mélaine, il ne pouvait en être question. Peut-être, en se hâtant, pouvait-il encore arriver à temps pour arracher Judith à son destin.
    Le Ciel, d’ailleurs, était apparemment pour lui car le régiment des Dragons de la Reine se trouvait alors cantonné à Pontivy. Gilles s’en alla donc trouver Lauzun pour lui demander de remettre à plus tard sa présentation à la Reine

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