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Le Gerfaut

Le Gerfaut

Titel: Le Gerfaut Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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vérifier à quel point sont dangereuses les filles qui y tiennent commerce de leurs corps. Alors, vraiment ? Aucune femme ? jamais ?
    — Jamais ! Quant à ce que tu viens de dire, je refuse de le croire. Et si cela est vrai, la raison ne peut être que sainte. Les Pères sont accoutumés à se mesurer au Démon et à regarder le danger en face. Il faut bien aller là où Satan se cache !
    — Eh bien, voyons si tu seras aussi courageux ! Tu es taillé pour regarder, toi aussi, le danger en face il me semble ?…
    Tout en parlant, Manon ôtait sa coiffe, enlevait prestement les épingles qui retenaient sa chevelure, dénouait son fichu et faisait glisser sa robe. En un tournemain elle ne fut plus vêtue que de ses bas bleu tendre retenus au-dessus du genou par des jarretières roses à bouffettes de dentelle…
    Dans la lumière chaude des chandelles et du feu, son corps brillait comme de la soie pâle. Moins gracile que celui de Judith, il dégageait une féminité plus affirmée et plus troublante. Sur des jambes un peu trop musclées, les hanches s’élargissaient, moelleuses. Les seins épanouis fléchissaient juste assez pour laisser supposer une longue habitude des caresses. Manon les prit dans ses mains et les massa doucement pour mieux ériger les pointes puis elle se mit à rire.
    — Alors ? Comment trouves-tu le serpent ? À toi maintenant…
    Enjambant le cercle de ses robes, elle vint à lui qui la regardait, muet et déjà fasciné, se haussa sur la pointe des pieds pour effleurer ses lèvres d’un baiser léger puis d’un autre, puis d’un troisième et chuchota contre sa bouche.
    — Tu as de bien vilains habits ! Voyons ce qu’il y a dessous…
    Avec une habileté dénonçant une longue habitude, elle fit glisser la veste noire, le long gilet, ouvrit la chemise qui montrait plus de reprises que de broderies et glissa ses mains le long du torse du jeune homme. Leur peau était chaude, un peu rêche et leur contact électrisa Gilles. En même temps, le ventre de Manon, collé au sien, se mettait à onduler lentement, éveillant la virilité du garçon avec une soudaineté qui fit sourire la fille.
    — Eh bien ! fit-elle, moqueuse. Il était temps que je m’occupe de toi…
    Mais il ne l’entendit même pas. Le diable inconnu qui l’habitait et faisait de ses nuits d’étranges aventures se déchaîna soudainement. Empoignant la fille aux hanches, il la jeta sur le lit, se laissa tomber sur elle et se mit à l’embrasser avec une ardeur maladroite tandis que ses mains pétrissaient au hasard ce qui leur tombait sous les paumes.
    Malmenée, à demi étouffée, Manon le repoussa vigoureusement et protesta, riant toujours.
    — Miséricorde ! Comme tu y vas pour un coquebin ! Laisse-moi au moins respirer.
    Vexé il s’écarta d’elle.
    — Je ne voulais pas te faire de mal. Excuse-moi ! fit-il d’un ton contrit.
    — Tu ne m’as pas fait mal. Seulement tu es trop pressé. Tu ignores tout de l’amour… et d’abord que pour être bien fait, il y faut du temps. Dis-moi, joues-tu d’un instrument de musique ?
    — Non. Mais j’aime la musique, répondit Gilles qui ne voyait pas le rapport.
    — Eh bien ! n’oublie jamais ça : un corps de chair c’est comme un instrument : il faut apprendre à en jouer… et moi, je vais t’apprendre.
    Malgré sa jeunesse, la petite servante de l’ Hermine Rouge était un excellent professeur, plein de délicatesse et de vitalité, et Gilles prit à cette première « leçon de choses » un plaisir si vif qu’à peine ranimé d’une bienheureuse inconscience consécutive à une sensation parfaitement neuve, il réclama sur-le-champ une nouvelle édition qui lui fut généreusement accordée… puis une troisième. Mais cette fois l’élève prit la direction des opérations et se montra si brillant que Manon, encore haletante, chuchota contre son oreille :
    — Il vaut mieux que tu ne reviennes pas trop souvent ici car, si je me mettais à t’aimer je ne serais plus en sécurité…
    — Mais je veux revenir. Il y a des leçons que l’on ne doit pas se lasser d’apprendre, fit-il joyeusement.
    — Tu n’as déjà plus grand-chose à apprendre. Comment feras-tu lorsque tu iras à confesse ? On dit ceux de Saint-Yves très sévères sur ce chapitre !
    D’un geste insouciant, Gilles balaya tout un horizon de coups de fouet et de douloureuses stations sur les dalles de la chapelle.
    — Je ne dirai rien et

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