Le grand voyage
nénuphars, dont les larges feuilles
accueillaient une multitude de grenouilles et offraient une aire de repos à
quelques hérons.
— Voilà un endroit agréable, constata Jondalar, en se
laissant glisser du dos de Rapide.
Il débarrassa son cheval de ses paniers de charge, de sa
couverture, et de son harnais, et Rapide se précipita vers la lagune, bientôt
rejoint par Whinney.
La jument fut la première dans l’eau, et commença par s’abreuver.
Puis elle se mit à frapper du devant avec vigueur, s’éclaboussant elle-même
ainsi que le jeune étalon qui buvait à côté. Tête baissée, oreilles pointées,
Whinney renifla l’eau, s’agenouilla sur ses antérieurs, plia les jarrets, roula
sur le côté et finalement sur le dos. Maintenant la tête hors de l’eau, les
jambes battant l’air, elle se frotta le dos sur le fond de la lagune en se
tortillant de plaisir, puis roula sur le côté. Rapide, qui avait observé sa
mère, n’attendit pas davantage. Il se rua dans l’eau peu profonde et l’imita.
— Moi qui pensais qu’ils avaient eu leur content d’eau pour
la journée ! s’exclama Ayla en s’approchant de Jondalar.
— Oui, mais ils adorent se rouler dans l’eau... s’ils
avaient de la boue ou de la poussière, ils seraient encore plus contents. Avant
de connaître Whinney et Rapide, j’ignorais que les chevaux aimaient se rouler
par terre à ce point.
— Pourtant, tu sais combien ils apprécient qu’on les
gratte. Eh bien, je crois que c’est leur manière à eux de se gratter. Parfois
les chevaux se grattent mutuellement, et ils expliquent à l’autre où ils
désirent qu’on les gratte.
— Enfin, Ayla ! Comment voudrais-tu qu’ils l’expliquent ?
Par moments il me semble que tu les prends pour des humains.
— Non, les chevaux ne sont pas des humains, je ne les
confonds pas. Mais observe-les bien, quand ils se tiennent tête-bêche, par
exemple. L’un d’eux va gratter l’autre avec ses dents, et attendra d’être
gratté au même endroit en retour. Tiens, je crois que je vais peigner Whinney
avec la cardère sèche. Les sangles doivent lui tenir chaud et la démanger. Je
me demande parfois si nous ne devrions pas abandonner le canot...
— Je suis en sueur, et ça me démange, avoua Jondalar. Je
crois que je vais me plonger dans l’eau, moi aussi. Mais pas tout habillé,
cette fois-ci.
— J’irai tout à l’heure, après avoir déballé mes affaires.
Et je vais faire sécher mes vêtements humides sur ces buissons, fit-elle en
sortant des vêtements entassés dans un de ses paniers pour les étendre sur les
branches d’un aulne. Je ne regrette pas de les avoir mouillés, reprit-elle en
étalant un pagne. J’ai trouvé des saponaires et je les ai lavés en t’attendant.
Jondalar l’aida à étendre les vêtements et découvrit parmi eux
sa propre tunique.
— Je croyais que tu avais lavé tes vêtements en m’attendant.
Et ça, qu’est-ce que c’est ?
— Je l’ai aussi lavée après que tu t’es changé. La
transpiration brûle le cuir, ta tunique était toute tachée.
Whinney sortit de l’eau. Elle s’arrêta sur la berge, jambes
écartées, et s’ébroua. La violente secousse se répercuta sur tout son corps
jusqu’à sa queue, et éclaboussa Jondalar qui tenta de se protéger. Ayla éclata
de rire. Elle courut dans la lagune et fouettant la surface de l’eau en
moulinant les bras, elle arrosa son compagnon qui la rejoignait. Dès qu’il eut
de l’eau jusqu’aux genoux, il l’aspergea à son tour. A côté de lui, Rapide
reçut aussi sa part de la douche, et s’esquiva prestement. Il aimait l’eau, à
condition d’être maître de la situation.
Après avoir longtemps joué et s’être bien baignée, Ayla commença
à penser au dîner. Des fleurs à trois pétales blancs et au cœur violet
émergeaient de l’eau sur un coussin de feuilles lancéolées, et Ayla savait les
tiges riches en amidon, succulentes et nourrissantes. Elle plongea ses orteils
dans la vase pour en arracher, mais les tiges fragiles se cassèrent. En
regagnant la rive, elle ramassa aussi du plantain d’eau qu’elle se proposait de
cuire, et du cresson au goût caractéristique, à manger cru. Elle repéra des
petites feuilles ouvertes qui flottaient en dessinant une figure harmonieuse
autour d’un point central.
— Jondalar ! Fais attention de ne pas marcher sur les
châtaignes d’eau, cria-t-elle en lui montrant les graines épineuses
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