Le grand voyage
même
où était tombée Roshario, qui le connaissait pourtant bien. Elle vit la grosse
corde à nœuds, maintenue par des pieux en bois enfoncés dans des fissures de la
roche, et qui partait du sommet où ils se trouvaient. Une grande partie de la
descente était balayée par la chute d’eau qui cascadait de rochers en saillies.
Elle regarda Carlono franchir le rebord de la falaise avec
aisance, empoigner la corde d’une main pendant que son pied trouvait la
première prise. Elle vit Jondalar pâlir légèrement, prendre sa respiration, et
suivre le Ramudoï, avec tout de même davantage de lenteur et de précaution.
Pendant ce temps-là, Markeno, que Shamio voulait aider, attrapa un rouleau de
grosse corde. Il passa une boucle tressée à une extrémité dans un gros pieu
fiché à mi-chemin entre les deux lourds poteaux entre les deux murailles
rocheuses, au bord de la falaise, et fit pendre le reste de la corde dans le
vide. C’étaient les cordages les plus solides qu’Ayla eût jamais vus, et elle
était curieuse de connaître la nature des fibres qui les composaient.
Peu après, Carlono reparut. Il remontait l’autre extrémité de la
corde. Il alla jusqu’à un deuxième pieu, proche du premier, et commença à tirer
sur la corde qu’il enroulait habilement au fur et à mesure. Un grand panier
apparut au bord de la falaise, entre les deux pieux. Poussée par la curiosité,
Ayla s’avança pour l’examiner de plus près. Le panier était aussi extrêmement
solide. De forme ovale, il avait un fond tressé et renforcé de planches en
bois, des bords rigides qui constituaient une sorte de clôture basse, et il
était assez grand pour contenir une personne allongée, ou un esturgeon de
taille moyenne dont la tête et la queue dépasseraient. Les plus grands
esturgeons, une des deux espèces vivant en eau douce, atteignaient jusqu’à neuf
mètres, pesaient près de deux tonnes et on devait les découper avant de les
hisser dans le panier.
Le panier se balançait à deux cordes enfilées sur quatre anneaux
en fibres, deux sur chaque largeur. Chaque corde passait par deux anneaux
disposés en diagonale, de sorte que les deux cordes se croisaient sous la base
du panier. Les extrémités des cordes étaient tressées ensemble, formant
au-dessus du panier une large boucle dans laquelle on avait glissé la corde qu’on
avait lancée par-dessus le bord de la falaise.
— Vas-y, Ayla ! Nous allons te descendre doucement,
dit Markeno qui enfila une paire de moufles en cuir avant d’enrouler la section
longue de la corde autour du deuxième poteau pour préparer la descente.
— Si tu préfères descendre toute seule, je vais te montrer
comment on fait, proposa Tholie en la voyant hésiter. Je te comprends, je n’aime
pas non plus voyager dans ce panier.
Ayla jeta encore un coup d’œil à la paroi abrupte. Aucun des
deux moyens ne la tentait vraiment.
— Je vais plutôt essayer le panier, décida-t-elle à regret.
Le sentier, taillé dans la muraille, descendait en pente
abrupte, mais assez inclinée pour qu’on pût tout juste l’emprunter. Là où on
avait planté les pieux, le haut de la falaise formait un encorbellement qui
saillait au-dessus de l’à-pic.
Elle monta dans le panier, et s’assit en se cramponnant au
rebord de toutes ses forces.
— Tu es prête ? demanda Carlono.
Ayla acquiesça d’un signe de tête sans relâcher sa prise, les
jointures blanchies à force de crispation.
— Vas-y, Markeno, descends-la, ordonna Carlono.
Le jeune Ramudoï laissa glisser la corde, et Carlono guida le
panier au-dessus du rebord de la falaise. Markeno laissa filer la corde entre
ses mains protégées par les moufles, contrôlant la vitesse de la descente grâce
à la corde enroulée au pieu. Suspendue dans le vide, à la verticale du ponton,
Ayla descendait lentement.
Cette invention, simple mais efficace, permettait de hisser les
marchandises, ou les gens, de l’embarcadère au camp des Shamudoï. Grâce à la
relative légèreté du panier, pourtant solide, une personne pouvait à elle seule
monter des charges assez lourdes. A plusieurs, on en transportait de beaucoup
plus lourdes encore.
Quand elle bascula par-dessus la falaise, Ayla ferma les yeux et
s’accrocha au panier, le cœur battant. Puis, constatant qu’elle descendait en
douceur, elle ouvrit un œil et s’émerveilla d’un panorama unique.
Suspendue au-dessus de la Grande Rivière Mère, glissant le long
de la
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