Le grand voyage
d’œil surpris. Jusqu’à présent, ils
avaient surtout vécu sur la nourriture qu’ils glanaient en route, et quand ils
piochaient dans leurs réserves, c’était davantage par commodité que par
nécessité. En outre, la plus grosse partie des vivres était restée avec la
tente, près de la rivière. Elle l’observa attentivement, et s’aperçut seulement
à quel point il avait maigri. Elle commença à cerner l’explication de son
comportement inhabituel.
— C’est une excellente idée, approuva-t-elle. Emmène donc
Loup avec toi. Il t’aidera à débusquer le gibier, et il te préviendra s’il
renifle une présence humaine. Je suis certaine qu’Epadoa et les Louves d’Attaroa
nous recherchent.
— Si Loup m’accompagne, qui t’avertira ?
— Whinney. Elle sent quand un étranger approche. Ne t’absente
pas trop longtemps, j’aimerais partir dès que le mets sera prêt.
— Ce sera long ? demanda-t-il d’un air tourmenté.
— Non, je ne crois pas. Mais je n’ai pas l’habitude de
cuisiner pour autant de personnes, alors je ne sais pas exactement.
— Bon, il vaut mieux que j’attende. Je chasserai plus tard.
— Comme tu voudras. Si tu restes ici, pourrais-tu me
rapporter encore du bois ?
— J’y vais. Et ensuite j’emballerai le matériel pour que
nous puissions partir dès que tu auras terminé.
Le mets fut plus long à préparer qu’Ayla ne l’avait pensé et,
vers le milieu de la matinée, Jondalar partit finalement avec Loup en
reconnaissance, davantage soucieux de s’assurer qu’Epadoa n’était pas dans les
parages que de tuer du gibier. Loup le suivit avec un tel empressement... après
avoir reçu l’autorisation d’Ayla, que Jondalar s’en étonna. Il avait toujours
considéré l’animal comme appartenant à Ayla, et ne pensait jamais à l’emmener
avec lui. Loup s’avéra un bon compagnon et leva effectivement un lapin que
Jondalar décida de lui abandonner.
A son retour, Ayla lui offrit une copieuse portion du délicieux
brouet qu’elle avait cuisiné pour le Camp. D’habitude, ils ne prenaient jamais
plus de deux repas par jour, mais dès qu’il sentit le fumet appétissant, il se
rendit compte qu’il avait encore faim. Ayla se servit une petite part et en
donna aussi à Loup.
A la mi-journée, ils purent enfin se mettre en route. Pendant la
cuisson de son plat, Ayla avait tressé deux paniers en forme de bol, profonds
et de bonne taille, l’un plus grand que l’autre. Elle avait rempli les deux
récipients du brouet riche et épais, et y avait même ajouté des pignons du pin
de pierre. Elle savait qu’après leur régime à base de viande maigre, ceux du
Camp apprécieraient un repas riche en huile et en graisse. Elle pressentait
aussi, sans en connaître les explications diététiques, que cette nourriture
était la plus appropriée en hiver, pour la chaleur et l’énergie qu’elle
permettait d’emmagasiner. Elle avait enrichi son brouet de céréales pour que
tous fussent rassasiés et satisfaits.
Pour recouvrir les bols débordants, Ayla utilisa en guise de
couvercles des paniers à fond plat renversés. Ensuite, elle hissa le tout sur
le dos de Whinney, dans des sacoches qu’elle avait confectionnées à la hâte
avec des rameaux de saules et des tiges d’herbe. Ils rejoignirent le Camp des S’Armunaï
par un chemin différent de celui qu’ils avaient emprunté à l’aller. Tout en
chevauchant de conserve, ils se demandaient où laisser les chevaux une fois
arrivés.
— Nous pouvons les cacher dans les bois, près de la
rivière, suggéra Jondalar. Nous les attacherons à un arbre, et nous finirons la
route à pied.
— Non, je ne veux pas les attacher, protesta Ayla. Si les
chasseresses d’Attaroa les trouvaient, ils feraient des cibles trop faciles.
Libres, ils auraient une chance de s’enfuir, et pourraient accourir à notre
appel. Je préfère les avoir près de nous, bien en vue.
— Dans ce cas, il y a le pré qui jouxte le Camp. Les
chevaux sont habitués à rester là où ils ont de quoi brouter. Sans compter que
si nous arrivons tous les deux à cheval, nous produirons sûrement une forte
impression sur Attaroa et les S’Armunaï. Tout le monde croit qu’il faut des
pouvoirs surnaturels pour maîtriser un cheval, et tant qu’ils ont peur, cela
nous donne un avantage. Et nous en aurons besoin, nous ne sommes que deux.
— C’est vrai, admit Ayla à contrecœur.
Elle s’inquiétait pour les
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