Le grand voyage
suis revenue le chercher le
lendemain. Le trou du feu était inondé et une espèce d’écume épaisse flottait
sur l’eau. Je ne m’en serais pas souciée, mais j’avais laissé tomber une louche
dans le trou et j’ai voulu la récupérer. Quand je suis allée la rincer au
ruisseau, elle était toute glissante, comme si elle avait été enduite de
saponaire. Après, mes mains étaient d’un propre ! Et la louche était
complètement dégraissée. Quand j’ai vu ça, j’ai rempli le récipient d’écume et
j’en ai rapporté.
— Est-ce si facile à fabriquer ?
— Oh, non ! Ce n’est pas vraiment compliqué, mais il
faut avoir l’habitude. La première fois, j’ai eu de la chance. Tous les
éléments devaient être réunis. Depuis, j’essaie d’améliorer la fabrication,
mais il m’arrive encore de la rater.
— Comment fabriques-tu la mousse ? Tu as bien dû trouver
le bon moyen ?
— C’est facile à expliquer. Je fais fondre de la graisse.
Elles conviennent toutes, mais chacune possède ses particularités. Je préfère
la graisse de mammouth. Ensuite, je prends de la cendre, je la mélange avec de
l’eau et je laisse tremper. Je la filtre dans un filet, ou un panier au fond
troué. Le liquide que tu obtiens est très fort. Il faut faire attention, ça
pique la peau, et ça peut même brûler. Si cela t’arrive, rince-toi tout de
suite. Bon, tu mélanges bien la mixture dans la graisse, et si tu as de la
chance, tu obtiens une écume onctueuse qui nettoie tout, même le cuir.
— Mais on n’a pas toujours de la chance, intervint
Verdegia.
— Non, beaucoup de choses peuvent se produire. Par exemple,
tu as beau remuer, le mélange ne prend pas. Si c’est le cas, tu peux l’améliorer
en le chauffant. Parfois, les ingrédients se séparent et tu obtiens un liquide
trop fort, et un autre trop gras. Il se forme parfois des grumeaux. Ou alors, c’est
trop épais, mais ce n’est pas le plus grave. Cela épaissit toujours en
vieillissant, de toute façon.
— Et quelque fois tout se passe bien, comme la première
fois ! conclut Ayla.
— J’ai appris une chose : la graisse et les cendres
liquides doivent être aussi chaudes que la peau de ton poignet, précisa Solandia.
Verses-en dessus quelques gouttes, et il ne faut pas que tu les sentes. Le
liquide des cendres est plus difficile à vérifier parce qu’il est fort et qu’il
brûle un peu, quelle que soit la température. Il faut tout de suite te rincer à
l’eau claire. Si cela brûle trop, cela signifie qu’il faut rajouter de l’eau,
et il faut faire très attention de ne pas s’en mettre dans les yeux.
— Et ça pue ! intervint Madenia.
— C’est juste, avoua Solandia. Ça pue aussi. C’est pourquoi
je sors fabriquer le mélange au milieu de la caverne, alors que j’ai tout
préparé ici même.
— Mère ! Mère ! Viens vite ! s’écria
Neladia, la deuxième fille de Solandia, en se précipitant dans la caverne,
avant de repartir en courant.
— Que se passe-t-il ? Quelque chose est arrivé au
bébé ? s’inquiéta Solandia, qui courut derrière sa fille.
Tout le monde se rua dehors.
— Regarde ! fit Dosalia. Le bébé marche !
Micheri s’agrippait à la fourrure de Loup, le visage éclairé d’un
sourire satisfait, et il faisait quelques pas hésitants sous la conduite du
fauve qui avançait avec de multiples précautions. Tous poussèrent des soupirs
de soulagement, et rirent de joie.
— On dirait que le loup sourit, remarqua Solandia. Je vous
assure, il a l’air si content de lui qu’il sourit !
— C’est aussi ce que je pense, acquiesça Ayla. Cela fait
longtemps que je me dis qu’il sait sourire.
— Je t’assure, Ayla, ce n’est pas réservé aux
cérémonies, disait Losaduna. Nous y allons parfois simplement pour nous
tremper. Si tu veux y emmener Jondalar, je n’y vois aucune objection. Les Eaux
Sacrées de la Mère sont comme Ses autres Dons à Ses Enfants, elles sont faites
pour qu’on en profite et qu’on les apprécie. Tout comme l’infusion que tu viens
de préparer et qui est excellente, ajouta-t-il en levant sa coupe.
Tous les Losadunaï qui n’étaient pas partis à la chasse s’étaient
rassemblés autour d’un feu au centre de la caverne pour profiter de la présence
de l’étrangère. Ils avaient consommé une soupe de viande de cerf séchée,
enrichie d’une grosse portion de graisse de mammouth. Rassasiés, ils
dégustaient maintenant
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