Le grand voyage
compris les chevaux,
put se désaltérer et se restaurer.
Pendant leur halte, le soleil disparut entièrement derrière de
gros nuages, et avant qu’ils ne reprissent la route, une neige épaisse tomba
avec une détermination farouche. Le vent du nord se mit à hurler et rien sur l’étendue
glacée ne s’opposait à son souffle glacial. Le blizzard se levait.
42
La neige se mit à tomber en flocons serrés et le noroît souffla
avec une force accrue. Il fouettait les voyageurs et les brimbalait dans tous
les sens comme de vulgaires fétus de paille.
— Il vaut mieux attendre que la tempête se calme !
cria Jondalar par-dessus les hurlements du vent.
Pour dresser leur tente, ils bataillèrent contre les rafales
glacées qui soulevaient le petit abri, arrachaient les piquets, laissant le
cuir se gonfler et claquer au vent. Le souffle rageur du blizzard menaçait d’emporter
la tente à laquelle les deux minuscules humains se cramponnaient, osant braver
le vent furieux qui balayait la surface uniforme du glacier de flocons
étouffants.
— Comment maintenir la tente ? demanda Ayla. Le vent
souffle-t-il toujours aussi fort ?
— Je ne me souviens pas de rafales si violentes, mais cela
ne me surprend pas.
Stoïques et silencieux, les chevaux enduraient la tempête, tête
baissée. A côté, Loup se creusait un abri.
— On pourrait demander aux chevaux de monter sur les bords
de la tente afin de la tenir le temps que nous l’arrimions, suggéra Ayla.
De fil en aiguille, ils trouvèrent une installation de fortune,
utilisant les chevaux comme piquets et supports. Ils passèrent la tente
au-dessus de Rapide et de Whinney. Ayla incita la jument à marcher sur un des
pans de la tente, en espérant qu’elle ne bougerait pas trop et que la tente ne
s’envolerait pas. Ayla et Jondalar se blottirent l’un contre l’autre, Loup
entre leurs jambes, assis pratiquement sous le ventre des chevaux, sur l’autre
extrémité du cuir.
La tempête ne se calma qu’après la tombée de la nuit, et ils
campèrent sur place après avoir installé la tente convenablement. Au matin,
Ayla découvrit des traînées sombres sur le cuir, à l’endroit où Whinney avait
posé ses sabots, et elle s’en inquiéta.
Ils avancèrent mieux le deuxième jour, malgré les monticules de
blocs de glace à escalader, et les crevasses béantes à éviter. La tempête se
leva de nouveau dans l’après-midi, mais le vent soufflait moins fort et cessa
rapidement. Ils poursuivirent leur route jusque tard dans la journée.
Vers le soir, Ayla remarqua que Whinney boitait. En y regardant
de plus près, elle aperçut, le cœur brisé et la peur au ventre, des taches
rouges sur la glace. Elle souleva le pied de la jument et examina son sabot. Il
était entaillé à vif et les plaies saignaient.
— Jondalar, viens voir, elle a des coupures au pied.
Comment s’est-elle blessée ?
Jondalar examina les blessures de la jument et inspecta ensuite
les sabots de Rapide. Il découvrit les mêmes coupures.
— Ce doit être la glace, dit-il d’un air soucieux. Vérifie
donc les pattes de Loup.
Les coussinets de ses pattes étaient écorchés, mais son état
était moins inquiétant.
— Qu’allons-nous faire ? gémit Ayla. Ils seront
bientôt estropiés si ça continue.
— Je n’aurais jamais cru que la glace puisse couper à ce
point, avoua Jondalar, rongé par le remords. J’ai essayé de penser à tout... et
voilà !
— Les sabots sont durs, mais ils ne sont pas en pierre. C’est
un peu comme de l’ongle, cela s’abîme. Jondalar, ils ne peuvent pas continuer.
Encore un ou deux jours et ils ne pourront plus marcher du tout. Il faut les
aider.
— Oui, mais que faire ?
— J’ai encore ma poche à médecines, je peux soigner leurs
plaies.
— Mais, Ayla, nous ne pouvons pas attendre qu’ils
guérissent. Et puis, une fois guéris, ils vont de nouveau se blesser.
Jondalar s’arrêta, le front soucieux, un pli amer aux lèvres. Il
refusait d’envisager ce qu’il considérait pourtant comme inévitable, et il
osait encore moins en parler.
— Ayla, il va falloir les laisser, finit-il par dire avec
une grande douceur.
— Les laisser ? Comment ça, « les
laisser » ? On ne peut pas abandonner Whinney et Rapide. Où
trouveraient-ils à boire ? Et à manger ? Il n’y a rien à brouter sur
cette maudite glace, pas même la moindre brindille. Ils mourront de faim, ou de
froid. Non, nous ne pouvons pas
Weitere Kostenlose Bücher