Le grand voyage
position d’arrêt, il était
prêt à se lancer à la poursuite des étranges chevaux, mais Ayla, voulant les
observer davantage, lui fit signe de ne pas bouger. Un des onagres se mit à
braire, et Ayla fut très surprise de ne pas reconnaître le hennissement
familier.
Rapide secoua la tête, hennit en réponse, et tendit le cou pour
renifler un tas de crottin frais. Ayla lui trouvait l’aspect et une odeur
semblables à ceux du cheval. Whinney hennit doucement et s’approcha pour humer
à son tour. Comme elle s’attardait, l’effluve du crottin parvint aux narines d’Ayla
qui crut y déceler le signe d’une nourriture différente de celle des chevaux.
— Est-ce que ce sont des chevaux ? demanda-t-elle.
— Non, pas tout à fait. Ils leur ressemblent, comme les
élans ressemblent aux rennes, ou les orignaux aux grands cerfs. Ce sont des
onagres.
— Je n’en ai jamais vu, c’est étonnant.
— Oui, c’est sans doute parce qu’ils préfèrent ce genre de
pâturage, dit-il en désignant de la tête les collines rocailleuses et la
végétation clairsemée des hautes plaines arides qu’ils traversaient.
Malgré les apparences, les onagres ne provenaient pas d’un
croisement entre le cheval et l’âne. C’était une espèce à part, possédant des
caractéristiques des deux, et extrêmement robuste. Ils se satisfaisaient d’une
nourriture encore plus rudimentaire que celle du cheval, incluant les écorces,
les feuilles et les racines.
Lorsqu’ils turent tout près au troupeau, Ayla repéra un couple d’ânons
qui la firent sourire. Ils lui rappelaient Whinney lorsqu’elle n’était qu’un
poulain. C’est alors que Loup aboya pour attirer son attention.
— Oui, je sais, mon Loup. Allez, si tu veux courir après
ces... euh... ces onagres, articula-t-elle lentement pour s’habituer au son,
vas-y !
A la grande satisfaction d’Ayla, le dressage de Loup progressait
mais il n’aimait pas rester sans bouger trop longtemps. Son enthousiasme et sa
curiosité juvéniles prenaient vite le dessus. Loup gambada en jappant vers le
troupeau qui s’égailla avec une rapidité étonnante. Les onagres s’enfuirent
avec un train soutenu qui laissa le chasseur en herbe loin derrière. Il
rejoignit Ayla et Jondalar comme ils approchaient d’une large vallée.
Les rivières charriant le limon des montagnes qui s’érodaient
lentement coupaient sans cesse leur route. Le relief s’abaissait graduellement
vers le bassin formé par le delta de la Grande Rivière Mère et la mer de Beran.
Ils voyageaient en direction du sud, la chaleur de l’été devenait plus
sensible. Des vents chauds dus aux passages de dépressions atmosphériques
venant de la mer faisaient grimper les températures et rendaient le temps
instable.
Même au réveil, les deux cavaliers ne portaient plus qu’une
seule épaisseur de vêtements. C’était l’air vif du petit jour qu’Ayla
préférait, décidément.
L’après-midi est plus chaud que d’habitude, se dit-elle,
impatiente de se tremper dans l’eau fraîche d’un torrent. Elle observa l’homme
qui chevauchait quelques pas devant. Il était jambes et torse nus. Seul un
pagne lui ceignait les reins. Dans ses longs cheveux blonds tirés en arrière,
retenus par une lanière de cuir, des mèches dorées par le soleil se mêlaient à
d’autres plus foncées, trempées de sueur.
De temps à autre, elle entrevoyait son profil aux joues rasées.
Elle appréciait le dessin ferme de sa mâchoire, même si elle pensait qu’un
adulte devrait garder sa barbe. Il lui avait expliqué un jour qu’il la laissait
pousser en hiver pour avoir chaud, mais qu’il la coupait toujours en été, quand
la chaleur devenait insupportable. A cet effet, il s’était taillé dans un silex
une lame au tranchant très aiguisé, qu’il remplaçait quand elle était émoussée.
Ayla non plus n’était pas très vêtue. Tous deux portaient une
peau souple passée entre les jambes et retenue à la taille par une simple
cordelette. Le pagne de Jondalar, dont le pan arrière était rentré, flottait
librement devant. Les deux pans du pagne d’Ayla pendaient comme des tabliers,
devant et derrière. On aurait dit une jupe courte, ouverte sur les côtés. Les
fesses protégées par la douce peau perméable et par la peau de daim couvrant le
dos de la monture, les longues courses sur un cheval en sueur étaient plus
confortables.
Jondalar avait vérifié leur position lorsqu’ils
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