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Le granit et le feu

Le granit et le feu

Titel: Le granit et le feu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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que tu sortes maintenant… Mais habille-toi, et ne compte pas sur moi pour forniquer encore !
    Aliénor passa promptement sa camisole, et, d’un pan de celle-ci, frotta l’intérieur de ses cuisses. Elle murmurait des mots sans suite et semblait s’admonester. D’avoir cédé sans hésitation ? D’avoir fait en sorte qu’il ne voulût point renouveler leur étreinte ?
    Il n’osait lui parler. Il essayait en vain de se persuader que la familiarité dont elle usait à son égard disparaîtrait sitôt qu’elle aurait franchi le seuil de la chambre. Cependant, elle n’était ni Anne ni Margot. Elle avait pris, en s’offrant – mais n’était-ce pas plutôt lui qui s’était délibérément livré à elle ? – une assurance, voire un orgueil insoupçonné d’elle-même.
    Elle s’allongea et remua tout en frottant son ventre à deux mains sans que ses contorsions parussent une invite à un recommencement. Il voulut se détourner de cette chair ensomnolée, craignant de la détester si l’intérêt qu’il lui portait encore ne pouvait s’amenuiser. En fait, tout avait été trop aisé.
    — Tu sembles m’en vouloir.
    Aliénor avait surpris le regard lourdement posé sur sa poitrine.
    — Cesse de me dire tu.
    —  Anne te disait vous ?
    Comme il ne répondait pas – ce à quoi elle semblait s’être attendue –, elle eut bâillement qu’il trouva malséant et s’appropria l’oreiller :
    — Je sens que je vais faire un bon somme. Tu peux t’allonger… Tu ne crains rien : j’ai eu mon content… On va dormir chacun de son côté.
    Ogier n’avait aucune envie de sortir, de manger ; aucune envie surtout de croiser sa cousine. Guillaume ne se soucierait pas de son absence à table, mais Blanquefort saurait l’interpréter.
    Il ferma les yeux, le corps maigrement soulagé, le cœur plein d’amertume : Tancrède était venue, elle était décidée. Il n’avait pu la recevoir !
     
    *
     
    La nuit tombait quand un chatouillement, sur son nez, fit éternuer Ogier. Il cilla des paupières. Aliénor l’observait, appuyée sur un coude, pinçant entre le pouce et l’index un duvet soustrait à l’oreiller.
    — J’ai cru bien faire en t’éveillant.
    — Je ne t’en fais pas reproche. Au contraire… Le soleil se couche !
    — Dommage qu’on doive, nous, se lever.
    Une image insidieuse se glissa dans l’esprit d’Ogier : Tancrède. Puis une autre : la défaite des Goddons qui devait centupler leur haine. À quels excès se livreraient-ils sur les femmes si Rechignac tombait !
    Aliénor agita ses jambes, glissa, se dénudant plus haut que son nombril, volontairement indécente, jusqu’à ce qu’elle s’assagît en constatant l’inanité de sa provocation.
    — Ces hommes dont tu parles avec amertume… ne les as-tu pas… excités ?
    Elle prit un air déconfit, mais ses paupières clignaient sur des feux inquiétants cependant qu’elle grattait son ventre, impudique à nouveau. Pris d’une sorte de pitié ou de remords, Ogier crut bon d’ajouter :
    — Si ça va mal pour toi, dans ton galetas, viens me le dire… Je ferai en sorte qu’on te laisse en paix.
    — Comment ?
    Il ceignit son épée.
    — Je peux demander à Tancrède qu’elle te prenne pour chambrière en remplacement d’Anne.
    — Je ne l’aime pas… J’aurais pu crier… Elle aurait su.
    — Ce qu’elle aurait pu penser m’importe peu.
    Il mentait. Comme Aliénor passait près de lui, sa camisole ouverte, il la lui referma ; elle baissa la tête, de sorte qu’il ne pût voir son visage.
    — Cache ces tétons… Et si tu les montres, ne sois pas ébaubie qu’ils affriandent certains culverts et soudoyers !
    — Quand l’envie vous prendra de les revoir encore, faites-moi signe.
    Elle s’était exprimée d’une voix tranquille, les mains à plat sur ses seins, comme pour les protéger. Vivement, elle mit sa robe, puis lentement, afin qu’il ne grinçât pas dans sa gâche, elle tira le verrou. Saladin entra et bondit sur le lit qu’il flaira longuement.
    L’escalier était vide ; Aliénor s’y engagea sans se retourner.
    Ogier la suivit de près.
    Dans la cour, elle avait rejoint Margot et lui parlait avec de grands gestes, et soudain la veuve Champartel se pencha, prise d’un fou rire éperdu.
    — Des veuves ?… Non : des gaupes !… Des godinettes !… Des carognes ! Je suis sûr qu’il est question de moi, voire de Tancrède !
    Le damoiseau courut jusqu’au

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