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Le Hors Venu

Le Hors Venu

Titel: Le Hors Venu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Viviane Moore
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d’un couloir, un Bédouin, escorté de ses serviteurs, les salua. C’était un brouhaha de latin, d’hébreu, de grec, d’arabe. Dans une des salles, ils croisèrent des marchands parlant le dialecte de Venise. Partout des esclaves s’activaient, suivant ou précédant de hauts dignitaires aux riches costumes orientaux. Un moine passa puis un prêtre byzantin reconnaissable à sa longue dalmatique et à sa coiffe.
    La belle assurance que Tancrède avait gagnée grâce au cadeau de l’émir Khalil était en train de s’évanouir. Dans ce palais si étonnant, il était à nouveau un « hors venu ». Y aurait-il un jour où il se sentirait chez lui ? Où il pourrait avoir la même démarche assurée que son maître ?
    Comme s’il avait lu dans ses pensées, Hugues de Tarse l’encouragea du regard. Le chef de la Légion avait ouvert une porte.
    — Asseyez-vous, je vous en prie. Je vais prévenir de votre arrivée.
    Ils se retrouvèrent dans une antichambre où les seuls meubles étaient des banquettes recouvertes de coussins rouge et or. Tancrède allait parler, mais Hugues posa sa main sur ses lèvres en lui désignant les tentures qui masquaient les parois.
    — Ici, les murs ont des oreilles, murmura-t-il.
    — Vous croyez que...
    — Je suis sûr qu’on nous observe. Il est des gens que notre venue escortée par un chef de la Légion n’a pas manqué d’intriguer. Je vous l’ai expliqué, la vie ici se veut à l’image de celle de la cour de Byzance, très réglementée. Chaque audience fait l’objet d’une requête que le logothète Nicolas examine avec soin. Il faut parfois attendre des mois pour rencontrer un dignitaire. Des invités qui, comme nous, brûlent les étapes sont à surveiller.
    — Est-ce que c’est bon signe d’être reçu aussi vite ?
    — Pas vraiment. Mais quoi qu’il arrive, soyez prudent et laissez-moi répondre à votre place le plus souvent possible.
    Tancrède hocha la tête. Quelques instants plus tard, un page entrait.
    — Salut à vous, messires, fit-il en s’inclinant. L’émir des émirs m’a chargé de vous conduire à lui. Suivez-moi, je vous prie.
    33
    Au moment même où Hugues aperçut le visage de Maion de Bari, il se souvint de l’avoir déjà vu dans sa vie d’avant. Une vie où lui était un haut dignitaire et Maion, un petit fonctionnaire œuvrant à se rendre indispensable. Le petit fonctionnaire était devenu un habile et puissant homme politique auquel son protégé allait devoir plaire s’il voulait conserver à la fois sa liberté et sa vie.
    L’homme, assis devant des registres, ne se leva pas pour les accueillir, mais leur fit signe de venir s’asseoir en face de lui, trahissant ainsi son hésitation sur le statut à leur accorder. Vêtu d’un burnous brodé d’or, des babouches à ses pieds nus, l’émir reposa sa plume d’oie et joua avec la lourde chaîne d’or qu’il portait au cou tout en les contemplant d’un air pensif. Un éclatant soleil pénétrait par une fenêtre haute, faisant miroiter les volutes d’encens qui montaient du brasero. Sur une tablette était posé un magnifique jeu d’eschets aux pièces d’ivoire et de cèdre.
    Un courant d’air souleva l’une des tentures recouvrant les murs, donnant à penser à Hugues qu’il y avait là quelque issue secrète, voire quelqu’un de dissimulé.
    — Vous voilà donc, fit l’émir des émirs. Laisse-nous, Gaetano !
    Le page disparut aussitôt et le silence retomba, troublé par le crissement de la plume qu’avait reprise Maion.
    — Nous vous remercions de nous recevoir, émir des émirs, fit Hugues au bout d’un moment. Nous allions demander à l’être dans les jours à venir, mais messire d’Anaor et moi-même n’osions espérer une entrevue particulière.
    Suivant les conseils de son maître, Tancrède n’avait dit mot, se contentant de hocher la tête pour montrer qu’il approuvait. Maion reposa sa plume.
    — Que venez-vous faire en Sicile, seigneur d’Anaor ? demanda-t-il.
    — Mettre mon épée au service du roi Guillaume, émir des émirs, et si je le peux ensuite, revoir le château de mon enfance.
    — Comme c’est émouvant ! déclara Maion dont la sécheresse de ton démentait le propos. Et depuis quand êtes-vous en Sicile ?
    — Nous sommes arrivés, messire de Tarse et moi-même, avec l’esnèque d’Henri II Plantagenêt, il y a plus d’un mois.
    — Cela correspond... Cela correspond, marmonna

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