Le Hors Venu

lui apporte une hache. Quelques instants plus tard, ils pénétraient dans la chambre des amours interdites.
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    Sur le lit défait, quelques vêtements d’homme ; dans un plat, des restes de nourriture... Quelqu’un avait vécu là. Mais qui ? La fouille ne leur apprit pas grand-chose, si ce n’est que cette chambre devait avoir eu d’autres usages tout aussi secrets et que son existence était ancienne.
    — Une chambre d’amour ? hasarda Hugues en se tournant vers le caïd.
    — J’en ai bien peur, approuva Pierre. Une légende courait parmi nous concernant une pièce dont se serviraient les femmes pour accueillir leurs amants. On dit tant de choses dans le harem... Sur ce point, Théodora avait raison, je n’ai jamais cru que ce fut vrai.
    — Des hommes arrivent donc à pénétrer à l’intérieur du harem ? s’étonna Simon.
    — Ce n’est pas cela qui m’intrigue. Avec les complicités qu’il faut ou beaucoup d’argent, on entre partout. Non, c’est le fait que cet endroit soit resté secret.
    — Il fallait que les favorites, ou du moins l’une d’elles, en soit l’organisatrice, reprit Hugues. Cela existait-il avant l’arrivée de Théodora ? En tout cas, elle était assez puissante et respectée pour l’avoir conservé. Ni les amants ni les courtisanes qui y avaient accès ne la trahiraient. Les autres ne pouvaient que rêver d’y pénétrer et essayer de lui complaire.
    — Mieux vaut que tout cela ne vienne pas aux oreilles de notre roi, il serait furieux, conclut le caïd.
    — Cela ne nous dit pas qui vivait là ni où il est parti, maugréa Simon. Ni où est la couronne. Il ne l’a tout de même pas prise avec lui.
    — Je ne comptais pas la trouver ici, répondit Hugues. Mais la nuit n’est pas finie. Il faut aussi fouiller le palais. Je ne crois pas que notre homme soit bien loin.
    L’Oriental se tourna vers le caïd.
    — Vous allez devoir interroger à nouveau Amina et toutes les autres. Prenez un clerc avec vous et notez tout. Il faut trouver qui étaient les gens que fréquentait Théodora. Avait-elle un amant secret ?
    — Avec l’assentiment du roi, qui trouvait là un moyen de s’assurer de la fidélité de ses barons, elle avait de nombreux amants, messire.
    — C’est son amant de cœur qu’il faut trouver, mais peut-être était-il de ceux-là. Vous avez du travail, caïd Pierre.
    Tancrède s’approcha de son maître.
    — Tout a été si vite... je ne vous ai pas dit... Avant de se jeter dans le vide, Théodora a prononcé un nom... Gamaliel.
    — N’a-t-elle rien dit d’autre ? demanda Hugues.
    — Il fallait que je lui dise qu’elle l’aimait.
    — Nous avançons. Voilà qui vous aidera dans vos recherches, caïd Pierre. Avait-elle aussi des amis parmi les eunuques ?
    — Certainement, avoua le caïd, et moi, tout le premier. C’était une femme si charmante et... si persuasive. Et puis, elle était généreuse et distribuait facilement l’or et les bijoux que lui donnait le roi.
    — Faites au mieux, alors. Je veux savoir qui est ce Gamaliel. Le maître capitaine et moi allons prévenir Maion de Bari.
    — Mais vous pensez donc qu’il n’a pas quitté le palais ? demanda Pierre.
    — Bien au contraire, je suis sûr qu’il va chercher à se venger.
    Alors qu’Hugues, Tancrède et le maître capitaine avaient rejoint Maion de Bari, les trompes d’alerte résonnaient dans tout le palais, et les soldats de la Légion de repos dans la salle de garde enfilaient leurs cottes de mailles et saisissaient leurs lances.
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    Alerté par la muette, Gamaliel s’était enfui. Il s’était faufilé dans un conduit d’aération si étroit que ses hanches maigres en avaient raclé les parois. Le boyau ouvrait sur le jardin, il s’était laissé glisser au sommet de l’un des arbres, observant en silence les soldats qui couraient en tous sens à ses pieds.
    Puis des hurlements avaient retenti dans le harem tout proche et le jardin s’était vidé. Gamaliel avait écarté les feuilles. De son observatoire, il avait aperçu la grande salle et failli lâcher prise. Les gens formaient un cercle autour d’une masse où le jaune pâle d’une robe se mêlait au sang et aux entrailles.
    Même si Gamaliel n’avait pas reconnu son amante, il avait deviné que c’était elle qui gisait là sous les regards de la foule. Tout était donc fini. Après son fils, son aimée. Il ne restait plus que la mort. Partout.
    La souffrance était devenue