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Le jardin d'Adélie

Le jardin d'Adélie

Titel: Le jardin d'Adélie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie Bourassa
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putainerie* rue Champ-Flory, tout près du Louvre.
    — Allez-y sans moi. Je m’en vais au bain.
    — Quoi ! Encore ?
    Louis donna un coup de tête en direction du pilori.
    — Ceci vaut beaucoup mieux que votre doloire.
    — Ça, c’est vrai. Alors, on se retrouve quand ?
    — Demain matin. Ce soir, j’ai à faire.
    — Ah, bien… puisque tu le dis. Alors, bonne nuit !
    Gérard se détourna. Soudain, il n’avait plus envie ni de bavarder, ni de boire, ni d’aller aux filles. Quelque chose dans le regard de Louis lui avait donné le frisson.

Chapitre XIII
    Exaudi vocem meam
    (Écoute ma voix)
    Paris, été 1358
    Il n’avait plu que quelques minutes, comme c’était fréquent en été. La lanterne de la boulangerie était encore auréolée d’humidité en suspension. Dans l’arrière-boutique, le souper s’achevait. Les hommes s’attardaient à table pour bavarder, tandis que les enfants qui s’ennuyaient commençaient à se chamailler discrètement avec leurs pieds afin de ne pas trop attirer l’attention des adultes. Clémence et Desdémone avaient déjà entrepris de rassembler quelques ustensiles qui ne servaient plus pour les mettre dans l’évier. Hugues avait l’air exténué. Il cognait des clous, ce qui faisait glousser sa fille. Elle se mit à fredonner une berceuse. Hugues se redressa, mais ce fut pour mieux dodeliner de nouveau de la tête.
    — Je te parie mon souriceau contre ton sifflet en os qu’il va se tremper le nez dans son vin, chuchota le petit frère.
    — Tenu, dit la fillette.
    — Il a fait trop chaud aujourd’hui, dit Clémence. Le temps est à l’orage.
    Desdémone s’essuya le front avec son avant-bras et replongea ses mains dans le cuvier.
    — C’est vrai, on manque d’air. Tiens, écoute. On dirait qu’il tonne au loin.
    — On dirait plutôt des chevaux. Oui, c’est ça. Et il y en a beaucoup. Sûrement encore ces voyous de Navarrais. Il me tarde de voir le calme revenir en ville.
    — À moi aussi. J’en ai marre d’avoir à faire don de la moitié de mon travail, dit Hugues, qui s’était redressé. Firmin rétorqua :
    — Cesse donc de te lamenter. Un jour viendra où tu seras fier de l’avoir fait.
    — Peut-être bien, mais c’est quand même malhonnête d’alimenter gratuitement tous ces excités qui se soulèvent contre l’autorité légitime du régent. On va avoir des emmerdes. En plus, nous avons du mal à joindre les deux bouts. Qu’est-ce que vous faites là, vous deux ?
    L’échange du souriceau contre le sifflet n’échappa pas non plus à l’attention du bébé qui réclamait bruyamment sa part de jouets.
    Le groupe de chevaux déboula dans la rue, et le bruit de leur cavalcade emplit la maison.
    — Chaque fois que j’en entends approcher, dit Clémence, la nervosité me gagne. C’est plus fort que moi.
    Personne n’eut le temps de répondre. Au lieu de passer comme ils le faisaient d’habitude, les chevaux s’étaient brusquement arrêtés tout près. Il y eut quelques éclats de voix rudes, et des coups ébranlèrent la porte verrouillée de l’échoppe.
    — Au nom du roi, ouvrez ! ordonna un homme.
    — Qu’est-ce qu’on fait ? Qu’est-ce qu’on fait ? cria Desdémone, alertée.
    Hugues s’élança en direction de l’évier pour y pêcher un grand couteau et alla se poster dans l’encadrement de la porte. Il appela :
    — Au nom de quel roi ? Qui va là ?
    — Enfoncez la porte, dit la voix de l’autre côté.
    — Non ! attendez ! cria Hugues en s’engageant dans l’échoppe fermée.
    Trop tard. Des haches se mirent à fendre le bois épais de l’huis. Les trois enfants crièrent et éclatèrent en sanglots. Hugues recula, sa main serrant toujours le couteau. Une douzaine d’hommes portant l’écusson royal envahirent la boutique. Celui qui paraissait le chef leur fit un signe et seuls deux d’entre eux se détachèrent du groupe pour le suivre.
    — Qui êtes-vous et qu’est-ce que vous nous voulez ? demanda Hugues qui ne bougea pas de sa place.
    — Jette ton arme, dit le chef qui vint se planter juste devant Hugues en lui faisant signe de son épée au clair.
    Il était très grand, et l’écusson royal était cousu sur une simple broigne, alors que les autres portaient de vraies cottes renforcées de plates d’armure. Il était coiffé d’un vieux heaume cylindrique sans visière, muni d’une simple fente à travers laquelle luisaient des yeux anonymes. Il demeura

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