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Le jardin d'Adélie

Le jardin d'Adélie

Titel: Le jardin d'Adélie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie Bourassa
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discret signe de tête, Adélie tenta de le rassurer à son sujet.
    — Comment ? Serais-tu toi aussi un menteur ?
    La lourde semelle souillée délivra Adélie, qui ne fit que s’asseoir à même le plancher. Firmin s’avança lentement vers son fils. Louis se refusa à bouger et se mordit la lèvre inférieure.
    — Non, Père. Nous n’en avons pas parlé…
    — Ah, cette fripouille, c’est bien de lui, ricana Firmin en suivant sa propre pensée.
    Il n’écoutait plus. À quoi bon répondre oui ou non ? De laquelle de ces deux réponses, vérité ou mensonge, Firmin allait-il faire sa vérité ?
    — De quoi avez-vous parlé, alors ? Ne me dis pas que vous n’en avez pas profité pour me calomnier.
    — Je ne me souviens plus, Père, dit Louis dont l’esprit commençait à s’embrouiller.
    — Ce damné tonsuré aurait dû te faire tâter de sa férule. De ça, tu te souviendrais. Parle, dis-moi tout.
    — Je ne sais plus…
    Firmin pointa Adélie, toujours assise par terre et adossée à un tréteau.
    — Vous manigancez je ne sais quoi dès que j’ai le dos tourné, c’est clair. Qu’est-ce que vous essayez de me cacher, hein ? Tu vas parler, ça, je te le garantis.
    Louis ne comprenait plus rien. Il n’eut cependant pas le temps d’en avertir son père, dont le poing l’atteignit au bras. L’enfant lui tomba presque entre les jambes. L’ivrogne se mit en quête d’un gourdin.
    — Saleté, je t’aurai, dit-il en grognant.
    — Firmin, je t’en prie… dit faiblement Adélie.
    — Toi, la ferme !
    Firmin s’était mis à cracher, car il salivait abondamment.
    Louis s’était faufilé entre ses jambes et relevé. L’homme aux réflexes amoindris dut le poursuivre autour du pétrin avec son bâton. L’enfant avait tenté de profiter de sa distraction. Un croc-en-jambe mit fin à sa course. Ils se firent face.
    — Place-toi, lui ordonna-t-il.
    Louis regarda Firmin. Firmin regarda Louis. Personne ne regarda Adélie, pauvre bannière blanche qui s’effilochait au vent.
    — Oserais-tu me désobéir ? demanda Firmin.
    Il infligea à son fils une gourmade* qui l’assomma presque. Le garçon se mordit la lèvre et dut se résoudre à prendre la position qu’il lui fallait adopter chaque fois qu’il devait être puni : agenouillé, le postérieur relevé d’une façon humiliante. Les premiers coups frappaient de manière précise, douloureuse, mais inoffensive. La tête dans ses bras croisés sur le plancher, Louis parvint à étouffer ses pleurs. Mais il savait déjà que les choses n’allaient pas en rester là.
    Encore une fois, Louis s’était montré un fils indigne. Il n’avait que ce qu’il méritait. Ses parents allaient tous deux être malades par sa faute.
    Les coups de Firmin, sans perdre de leur force, étaient déjà en train de devenir aveugles et désordonnés : ils se mirent à atteindre l’enfant docile aux flancs et dans le dos. Lorsque le gourdin le frappa à la nuque, Louis haleta. Il s’étala de tout son long et ouvrit grand la bouche.
    — Merde, c’est cassé, dit Firmin d’une voix inquiète.
    Il s’accroupit près de son fils et posa le bâton près de son visage. Louis sentit de gros doigts lui tâter les vertèbres cervicales.
    — Non, il n’a rien. Ouf, dit-il en se relevant avec maladresse.
    Depuis son coin, une Adélie impuissante sanglotait, visiblement soulagée. Cet incident avait brusquement fait tomber la rage de l’ivrogne.
    Louis se traîna avec hésitation et se retourna à demi sur le dos, exposant son abdomen. Il rejeta la tête en arrière et parut fixer le plafond. Envahi de points étourdissants, lumineux ou noirs, son champ de vision se rétrécit. La brute grogna de dégoût :
    — C’est ça, tourne de l’œil maintenant.
    Se tournant vers Adélie, il poursuivit :
    — Il est laid à faire peur. C’est un idiot. Il n’y a pas d’autre moyen de lui donner un peu de jugeote. Ça va aussi pour toi, femme. Sers-moi à souper.
    — Oui, Firmin.
    Adélie se releva péniblement. Il lui était interdit de soigner Louis sans l’accord de son mari. Comme il n’avait rien dit à ce sujet, elle dut se rassurer avec ce qu’elle pouvait constater d’un simple coup d’œil. Louis s’était assis, isolé par ses oreilles bourdonnantes. Il luttait contre l’inconscience.
    Firmin quitta le fournil pour aller se soulager. Adélie en profita pour s’approcher de son fils. Son bras droit était bleu là où il

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