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Le jardin d'Adélie

Le jardin d'Adélie

Titel: Le jardin d'Adélie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie Bourassa
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d’ailleurs aucune objection. Cependant, il aurait bien apprécié de pouvoir retourner aux bains.
    Le son d’une toute petite voix parvint à ses oreilles, à peine plus forte que le bruit ténu de l’eau qui s’écoulait. Louis s’arrêta et tourna la tête. La voix se fit entendre de nouveau. C’était un miaulement de chaton qui semblait provenir du mur de l’une des maisons à sa droite. Il s’avança dans cette direction. Les miaulements devinrent plus nombreux et plaintifs. Lorsqu’il s’accroupit, il aperçut par une large brèche de maçonnerie un peu de fourrure dorée. Presque tout de suite, une tête minuscule émergea du trou. Un chaton mouillé âgé de deux mois à peine vint s’agripper à sa cheville et entreprit de grimper le long de sa jambe. Il leva vers Louis ses petits yeux gris implorants, tout remplis de confiance. Il miaulait sans interruption, avec insistance, en ouvrant chaque fois une menue gueule rose.
    — Tu es bien joli, toi, dit tendrement Louis en glissant sa main sous le ventre creux du chaton pour le prendre dans ses bras. Il se remit debout et enfouit la petite bête tremblante de froid sous sa tunique, à même sa peau nue. Louis rit au contact des coussinets et des petites griffes sur sa poitrine, à cause surtout du museau rose qui s’était mis à explorer fébrilement l’un de ses tétons. C’était froid et étrange. Il se remit en marche alors que le chaton, tout heureux, tétait en ronronnant et en le pétrissant.
    — Pauvre minet, tu as perdu ta maman. Je vais prendre soin de toi. Tu n’auras plus jamais froid. C’est promis. Moi, tu sais, j’ai un papa et une maman. Je vais te donner de mon manger comme ma maman fait pour moi.
    Une fois à la maison, Louis s’empressa d’aller vider sa bourse, dans le pot de terre cuite et revint dans la salle. Son père n’était pas encore arrivé, mais Adélie achevait de préparer le souper.
    — Mère, regardez ce que j’ai trouvé.
    Il retroussa sa cotardie pour en extraire le chaton jaune, confus et vaguement inquiet. Adélie ne put s’empêcher de se laisser attendrir par l’affection un peu gauche de Louis. Il posa l’animal sur la table et lui caressa le dos. Le chaton se laissa aplatir et se redressa, intrigué par cet environnement nouveau, pour mieux se faire aplatir encore.
    — Il a très faim, Mère. Si on lui donnait un peu de bouillon ?
    Adélie vint s’asseoir à table et laissa la petite créature s’approcher d’elle, curieuse, sa courte queue dressée comme un bâtonnet. Le chaton lui prit maladroitement la main de ses deux pattes antérieures et entreprit de lui mordiller le bout des doigts.
    — Tu as bon cœur, mon petit roi.
    — Il est si petit. Je vais partager mon manger avec lui. Quel nom devrais-je lui donner ? Je suis sûr qu’il n’en a pas.
    — Louis…
    — Ce sera pas trop dur pour moi, Mère, l’interrompit-il d’une voix un peu inquiète, car le ton de sa mère semblait être un prélude à des objections, objections dont il devinait malheureusement la teneur.
    — Je pourrai le cacher sous les combles. On y est à l’étroit, mais, à lui, ça ne lui fera rien. Et puis, il y sera bien au chaud. Je lui mettrai un linge. Et puis, Père ne grimpe jamais là-haut. Il ne le trouvera pas.
    — S’il te plaît, Louis, écoute-moi…
    — Quand il sera plus grand, il nous aidera, Mère. Les chats, ils attrapent les rongeurs. Père verra bien que c’est une bonne idée de le garder.
    — Mais comment va-on le nourrir, mon amour ? Nous avons à peine de quoi pour nous deux. Et si Père le trouvait ?
    Elle caressa la joue de Louis. Le chaton tournait en rond, cherchant à descendre de la table vide.
    Louis baissa tristement la tête. Le cœur d’Adélie se serra.
    — Je suis désolée, mon petit roi. Si je pouvais…
    — Moi, je pourrai ! J’ai une idée, dit soudain Louis en se redressant.
    Une nouvelle détermination se dessina sur ses traits. Il s’était soudain souvenu d’une anecdote que sa mère lui avait racontée au sujet de l’admirable dévotion de son saint patron. Alors qu’il était encore enfant, le roi Louis IX, le futur Saint Louis, avait dérobé une volaille dans la cuisine du château de son père pour l’offrir à un pauvre. En lui racontant cela, Adélie ne pouvait prévoir que son récit servirait un jour de prétexte à son fils. Louis ajouta seulement :
    — Et je lui ai aussi trouvé un nom : il s’appelle Petit Pain.

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