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Le jeu de dupes

Le jeu de dupes

Titel: Le jeu de dupes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne-Laure Morata
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verve que le maudit Sicilien était en fuite : on le disait à Dieppe chez son ami le gouverneur de Normandie au grand dam du parlement régional qui n'en voulait pas sur ses terres. On ne doutait point que le malandrin serait bien obligé de quitter le royaume et on s'en réjouissait hautement.
    Seule la reine paraissait regretter son ministre. La régente et ses fils, quasi captifs du Palais-Royal, semblaient à la merci de Condé et des frondeurs. François, comme tous les vrais fidèles, était allé saluer Anne d'Autriche et participer à son coucher en signe de soutien. Devant Gaston d'Orléans et le duc de Condé qui s'étaient imposés un quart d'heure dans une tension palpable, la reine avait réussi à faire bonne figure mais sa froideur traduisait son déplaisir. Tous ses proches poussèrent un soupir de satisfaction lorsque les princes prirent enfin congé pour assister au grand souper donné en leur honneur par le duc d'Orléans. François avait été une fois de plus bluffé par la capacité du jeune Louis à cacher son dépit qu'il savait profond. L'enfant était allé jusqu'à embrasser le vainqueur de Rocroi qui n'avait décelé qu'innocence et juvénilité là où n'existaient plus que résolution inébranlable et soif de vengeance.
    Cette nuit encore, François avait mal dormi, envahi par de terribles scènes de cauchemar où il tentait d'étreindre à bras-le-corps une Nolwenn transformée en statue de sable se désagrégeant sousses doigts. Il émergeait de ce mauvais sommeil en nage, malheureux et désespéré. Comment retrouver sa femme ? Malgré l'assistance apportée par Simon, et tous ceux prêts à l'aider comme Paul, le père de Sylvaine, l'ancien mousquetaire dont il avait failli devenir le gendre 1 , le Crochu demeurait introuvable. François se voyait condamné à attendre un nouvel élément pour se remettre en chasse.
    De San Juan, traumatisé par l'annonce du meurtre odieux de sa maîtresse, avait juré de l'épauler à traquer ses assassins et à découvrir pourquoi on s'était attaqué à Mont Menat pour enlever Nolwenn. Sincèrement épris de Violette, Javier aurait voulu l'extraire de sa vie de courtisane et des intrigues menées pour s'assurer une place dans la bonne société ne comprenant pas l'importance que cela avait à ses yeux. C'était pour elle qu'il s'était attardé en France au risque de provoquer les foudres paternelles. Touché par la détresse d'Anne d'Autriche, sœur du roi espagnol Felipe IV, il avait proposé à Arnaud d'aider la régente, cruellement dépourvue d'hommes sur qui compter, en assurant la protection des nièces et du neveu de Mazarin qui requéraient une surveillance étroite et leur confinement au Val-de-Grâce. C'était d'ailleurs une raison supplémentaire pour Louis de haïr les frondeurs qui le privaient ainsi de la compagnie du fameux neveu : Paul Mancini, un de ses meilleurs camarades de jeu avec Brienne, tirailleurs hors pair des canons miniatures qu'abritaient ses châteaux forts en réduction dressés dans les jardins du palais.
    À l'hôtel Bessières, François alla retrouver sa sœur comme chaque matin pour prendre des nouvelles d'Arnaud saisi par une mauvaise fièvre causée par l'infection de sa blessure et dont l'état les préoccupait. Louise était perpétuellement au chevet de son époux, absorbée par les soins à lui prodiguer, manquant de temps pour pouvoir fournir du réconfort à son frère, ce qu'il concevait parfaitement. Fort heureusement son aînée faisait partie de ces personnes que les épreuves galvanisent. Elle avait appris l'enlèvement de Nolwenn de la bouche de Gervais, sommé de s'expliquer après le malaise d'Henri, éprouvé sitôt François parti rejoindre Arnaud. Devant la gravité des circonstances, Louise avait surmonté sa propre peine de n'avoir pu mener sa grossesse à terme et avait repris les rênes de la maisonnée, s'occupant du blessé et du vieil homme avec dévouement. Là au moins elle se sentait utile, ce qui n'était guère le cas quand elle croisait le regard de son frère et la souffrance presque palpable qui en émanait. Elle savait qu'aucune parole ne le consolerait, alors elle s'assurait qu'il ne manquait de rien et parfois elle le rejoignait près du feu se contentant de s'asseoir avec lui et de prendre sa main. L'intermède ne durait jamais longtemps car il fallait toujours changer un pansement ou bien réconforter leur père qui, depuis cette dernière crise, plongeait dans un

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