Le jeu de dupes
homme de cette qualité qui, comme toujours, savait trouver les mots justes.
– Vous avez raison. Je dois arrêter de me torturer, d'autant qu'il faut nous concentrer pour l'instant sur les recherches concernant Nolwenn.
– C'est cela, mon cœur, votre frère a besoin que nous le soutenions dans l'épreuve et c'est ce que nous allons faire.
– Plus de jérémiades, promit-elle en souriant. Je retourne au chevet de Père dès que j'aurai prévenu Malo de votre arrivée, il vient juste de revenir pour une courte permission et n'a pas voulu aller se coucher. Depuis qu'il sait que François est de retour, il a hâte de le voir.
– Lui avez-vous parlé de Nolwenn ?
– J'ai pensé que c'était à François de le faire ; toutefois je l'ai averti qu'il était arrivé un malheur.
– Vous avez eu raison. Dites-lui de descendre. Mais avant…
Arnaud la prit par la taille pour déposer un baiser sur ses lèvres et Louise se lova entre ses bras ayant hâte de retrouver leur intimité. Arnaud rit en constatant l'émoi de sa femme et la serra contre lui avant de la laisser franchir le pas de la porte.
Ce n'est que lorsque celle-ci fut refermée qu'il appela un valet à la rescousse, grimaçant de douleur, pour qu'il le soigne et apporte un verre d'alcool afin d'estomper l'élancement de son épaule devenu insupportable. Même dans son état il entendit Malo se précipiter au rez-de-chaussée pour pouvoir enfin saluer son cousin. L'adolescent dut cependant se contenter d'une rapide accolade avant que François ne lui apprenne la tragédie de Mont Menat. À l'annonce de la disparition de Nolwenn, le garçon fit un effort intense pour ne pas se laisser aller à une trop forte émotion. La jeune femme, malgré leur faible différence d'âge, incarnait dans son cœur une figure maternelle et la perdre après avoir déjà enterré sa véritable mère ainsi que sa mère adoptive était insupportable.
– Dis-moi comment je peux t'aider et je le ferai ! demanda-t-il avec toute la fougue de ses dix-sept ans.
– Je n'en doute pas. Néanmoins, malgré ta valeur, tu es trop inexpérimenté pour pouvoir agir. Nos adversaires sont redoutables… Tiens-toi à l'écart de tout cela et consacre-toi à tes études, c'est tout ce que je te demande.
Vexé, Malo parut consentir mais se promit qu'il ne resterait pas sans réagir alors qu'on s'en prenait à ceux qu'il aimait. Il dissimula sa frustration et se contenta de dire bonjour à Belfond qu'il connaissait bien, ce dernier enseignant dans l'établissement militaire où il était pensionnaire. Puis il alla rejoindre Louise dans la chambre d'Henri, qui fut ravie d'avoir un brin de compagnie pour veiller l'invalide, devinant qu'une fois de plus de sombres affaires occupaient les esprits des hommes de sa vie et que l'adolescent, après le choc de la mauvaise nouvelle, avait besoin du réconfort qu'elle savait prodiguer.
Arnaud, pansé et revigoré, suivit ses amis dans la bibliothèque où la tension était palpable : François faisait les cent pas sous le regard scrutateur de son aïeul – dont le portrait trônait au centre de la pièce – tout en fixant Belfond absorbé par l'examen des documents étalés devant lui, il n'en pouvait plus.
– Par le sang du Christ, que disent ces maudits papiers ?
Le professeur retira ses lunettes et lissa ses bacchantes.
– Pour la première lettre j'y parviendrai si je ne suis pas interrompu. Pour les autres, très complexes, il me faudra beaucoup plus de temps.
– Nous n'en avons pas à notre disposition, Nolwenn est en grand danger…, rugit François endonnant un coup de pied dans une bûche près de la cheminée.
– Nous en sommes tous pleinement conscients, François, t'emporter de la sorte ne nous aidera pas, déclara Arnaud en posant une main réconfortante sur l'épaule de son ami. Allez mon grand, nous allons la sortir de là, je te le jure.
La fureur du gentilhomme retomba d'un coup.
– Veuillez m'excuser. L'attente…
– Nous comprenons parfaitement, déclara Belfond.
– Mettons-nous au travail afin d'y voir plus clair, intervint Arnaud.
Ils s'attelèrent à la tâche et, après une nuit blanche, la première lettre fut enfin intégralement déchiffrée. Son contenu confirmait leurs craintes. C'était une lettre de menaces à peine voilées adressée à Mazarin promettant de révéler le secret de la naissance du jeune suzerain en cas de non-obéissance aux exigences du porteur de la missive. Il y était
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