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Le jour des reines

Le jour des reines

Titel: Le jour des reines Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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constaterons son absence, et le tour sera joué !
    — D’où tiens-tu cette cruche ?
    — J’ai courtisé la bouchère alors que son homme était mandé au château.
    Un chemin s’amorçait entre deux arbres. Ils s’y enfoncèrent, sans trop sinuer, dans une obscurité qui s’allégea lorsque les grosses taupinières où logeaient les captifs apparurent, éclairées par quelques hautes torches. Ces luminaires étaient des armes d’hast aux fers plantés dans la terre, l’extrémité des hampes supportant les gobelets emplis de résine.
    Imprégné des clartés sautillantes des flammes, le brouillard nocturne prenait une teinte soufrée.
    « Dorment-ils tous ? Nous ignorons quand se fait l’échange des gardiens. »
    Deux ombres passèrent devant Ogier accroupi. Ces hommes qui venaient de se rejoindre et de se croiser sans prononcer un mot, se séparèrent lentement. Ils étaient coiffés d’une barbute, revêtus d’un haubergeon ; le fourreau de leur épée cliquetait contre leur genouillère.
    — Ton oncle, chuchota Shirton, doit t’attendre tout près du seuil d’une tente… Trouve-la… N’aie crainte d’être dénoncé : Escot, malandrin d’Angleterre ou Franklin, il n’y a plus d’ennemis, j’en jurerais, dans le malheur où sont ces captifs. Nous nous retrouverons ici… Va, ne perds pas de temps et défie-toi des regards [159] . Il n’y en a que deux, je crois. Je m’en occupe.
    Bientôt, se retournant, Ogier n’aperçut plus Shirton.
    Il l’entendit interpeller un des hommes d’armes et répondre à ses sommations par un rire.
    « Où est Guillaume ? »
    Contrairement à son vœu, Ogier échoua devant trois pavillons d’où filtraient des ronflements et courut vers un quatrième devant lequel, sous un chemineau, brasillaient et fumeronnaient des branches. Emporté par son désir de retrouvaille, il n’éprouvait plus qu’une seule crainte : que son oncle n’eût pas résisté au sommeil.
    Guillaume devait discerner son approche ! Le bruissement des armes avait cessé. Shirton s’exprimait haut et fort et ses rires ajoutaient à ses propos une ponctuation sinistre.
    « Est-ce là ? » se demanda Ogier.
    Dans l’ombre clairsemée par une des torchères, il gagna le seuil d’une tente constituée de toiles rapiécées, crevassées, dont les autorités judiciaires estimaient sans doute toute réfection nouvelle inutile.
    — Mon oncle ?
    Rien. Ce serait donc la cinquième et dernière.
    Il trébucha sur une racine et se reprocha d’être plus bruyant que ces rats dont il décelait soudain la présence. Rien de néfaste ne se produisit. Il entendit les gardes : ils s’ébaudissaient. Rassuré sur leur participation à la buverie de Shirton, il courut.
    Il s’était habitué à la puanteur, ou du moins son émoi et son impatience en amoindrissaient l’importance. Il allait atteindre le dernier logis – le plus grand, le plus dépenaillé –, lorsqu’une paralysie le prit des épaules aux genoux, provoquée par une prémonition terrible : la délivrance de Guillaume, événement sans gravité, serait la source de péripéties mortelles.
    « Reprends courage, bon sang ! »
    Son cœur semblait sauter de sa poitrine à sa gorge. Il fit un pas et s’arrêta. Rien. Aucun autre bruit que des mots d’anglais dans des bouches avinées.
    Il progressa, tellement incliné que ses doigts effleuraient des herbes.
    Piteux obstacle à la punaisie des lieux, une houppelande crottée d’écailles de terre obturait l’entrée de la tente. La soulever, insinuer sa tête :
    — Mon oncle…
    La fruste portière s’entrouvrit tandis qu’Ogier devinait des mouvements dans l’ombre, assortis de plaintes et de grognements.
    — C’est vous ?… Êtes-vous libre de vos gestes ?
    — Non… Ils nous enchaînent, chaque nuit, par paires… Mon compagnon est un chevalier de chez nous : Étienne de Barbeyrac… Nous ne nous sommes pas quittés depuis Auberoche… Holà ! compère : baille-moi quelques anneaux de plus.
    La toile se gonfla tout près de la portière. Le baron de Barbeyrac se déplaçait afin que Guillaume eût ses aises.
    — Les gardes ?
    — Shirton s’en occupe. Il les fait boire…
    Le vieillard apparut, la tête la première.
    — Tudieu que cette chaîne est courte !… Je ne puis avancer davantage, et c’est tant mieux… Me verrais-tu de près que tu serais chagrin.
    — De loin, ce matin, vous paraissiez le même.
    Heureux du

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